Les querelles qui se font de plus en plus instantes, jour après jour, entre les acteurs médiatiques dans notre pays ont des explications. Certains pensent, sans doute, y jouer leur survie. La publicité –et le financement d’un paysage médiatique qui prend du volume à grand pas- s’est invitée dans le débat.
Ca se dispute sur l’échiquier médiatique tunisien. Depuis quelque temps, en effet, les uns offrent le spectacle désolant d’avoir décidé de se dresser contre les autres. Il y a eu, au début, Hannibal Tv et Nessma Tv contre l’Instance Nationale pour la Réforme de l’Information et de la Communication (INRIC), qui n’a pas, du reste, ménagé les deux chaînes privées du pays.
Et puis, ça s’est élargi: l’INRIC contre le Syndicat Tunisien des Directeurs des Médias (STDM) et vice versa; le Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT), du Syndicat Général de la Culture et de l’Information (SGCI) relevant de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) et l’INRIC contre «les tentatives de putsch menées actuellement contre des syndicats légitimes dans le secteur de la presse».
Des disputes qui occupent nombre d’articles de presse et d’émissions de radio et télévisions, nourries, le plus souvent, par les médias impliqués dans des combats sans fin.
La gabegie doit bien se mériter
Ces disputes ne dérogent pas, selon certains, à la règle, depuis quelque temps, dans le pays où tout le monde se ligue contre tout le monde. La gabegie doit bien se mériter.
Mais ce qui se passe au niveau des médias est symptomatique d’une évolution et augure, à ce titre, d’un contexte nouveau dans lequel les protagonistes sont en train de chercher une légitimité… dans l’adversité.
Observons, d’abord, qu’après le trop vide, nous vivons à l’heure du trop plein. On ne compte plus en effet le nombre de structures qui souhaitent «encadrer» le secteur de l’information et de la communication: la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, pour la réforme politique et la transition démocratique, qui avance avec sa sous-commission de l’information, mais aussi l’INRIC, la SGCI de l’UGTT, le SNJT, le SNDM, l’Association Tunisienne des Directeurs de Journaux (ATDJ), l’Association des Directeurs des Journaux Tunisiens (ADJT) et le Conseil National Indépendant pour l’information et la Communication (CNIIC).
Ces structures évoluent dans un contexte nouveau dans lequel, la donne principale consiste en la multiplication des journaux ainsi que des chaînes de radios et de télévision: outre les 14 radios que compte le pays (9 radios publiques et 5 radios privées) et les 4 chaînes de télévisions (2 publiques et 2 privées), l’on s’attend à l’émergence, dans les six mois à venir, de 12 nouvelles radios (privées) et 8 nouvelles télévisions (dont une publique). Et ce n’est, nous dit-on, qu’une première fournée.
Le nerf de la guerre
Sans compter les nouveaux titres de la presse électronique. L’avenir, ou une partie de l’avenir, est aux contenus web. En témoigne l’intérêt manifesté par tous les médias dans les pays développés pour des déclinaisons sur Internet et pour une complémentarité entre médias classiques et médias en ligne.
Empressons-nous de dire que ces nouvelles chaînes ne sont pas de trop: la pluralité des opinions ne s’en trouvera que renforcée. Il en est de même pour la satisfaction des auditeurs et téléspectateurs. Il y en aura pour tous les goûts.
Mais dur, dur pour le gâteau publicitaire. C’est, du reste, le nerf de la guerre. Comment départager tous ces supports. En clair, les quelque 184 millions de dinars promis annuellement à tous les médias tunisiens (desquels il faut enlever les sommes réservées à l’affichage: 19 millions de dinars) sont-ils suffisants?
La réponse est évidement non. Une partie de la bataille livrée sur l’échiquier médiatique concerne cet aspect des choses. Le refus de certains médias audiovisuels de respecter l’interdiction de diffuser la publicité politique est en rapport avec cette réalité.
Le financement des médias devra se poser avec grande acuité durant les prochains mois. La situation économique aidant (on parle déjà d’une récession), le problème va être bien entier.
Les comptes des entreprises de presse montrent déjà des «gouffres». Confidences d’un responsable d’un média audiovisuel: «Il me faut une quarantaine de spots par jour pour gagner de l’argent, je ne totalise aujourd’hui qu’à peine la moitié».
L’INRIC a tout intérêt à s’intéresser à cet aspect. Il y va de l’avenir de la pluralité des opinions. D’autant plus que des gisements existent en matière de publicité. La question du financement des médias est déjà, du reste, là. Et de nouvelles aides à la presse se doivent d’être imaginées. Il s’agit, comme savent le faire les Anglo-saxons, de faire un bon «benchmarking» et de dégager les bonnes pratiques.
Il ne s’agit pas de la seule explication aux disputes qui se font jour. Une autre peut être présentée. Il s’agit de faire de la surenchère pour «se protéger» de tous ceux qui souhaitent s’immiscer dans les affaires des médias. Ou que l’on croit nourrir cette ambition. Histoire de montrer –déjà– ses griffes. C’est de bonne guerre!
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