La société civile joue un rôle très important dans tout processus démocratique. De part son indépendance et les compétences qu’elle présente, elle peut servir de relais pour tout processus démocratique. En Tunisie, les associations ont été toujours manipulées au profit de l’ancien régime et plusieurs d’entre elles ont été asservies pour sa cause.
Dans la Tunisie de l’après 14 janvier 2011, l’engouement pour la création des associations n’est pas à démontrer. Dans une société où la liberté d’expression était prohibée, il y avait assez de restrictions pour démotiver les individus à se dévouer pour les causes sociales. Mais à l’état actuel et avec les malversations et les inégalités sociales qui ont été démasquées, la responsabilité collective semble être la devise de cette nouvelle ère.
Finance islamique…
Au lendemain de la révolution, plusieurs associations ont vu le jour dans toutes sortes de domaine, bien qu’elles soient orientées pour une grande part vers l’aspect social. L’Association Tunisienne de la Finance Islamique (TAIF) en est une. Elle est née le 28 février 2011. De par son nom, elle s’intéresse évidemment à la finance islamique, un domaine novice en Tunisie, qui a fait son grand démarrage avec Banque Zeitouna, créée par Sakher El Materi, gendre du président déchu, actuellement en fuite au Qatar. N’oublions pas que la première banque islamique créée est la Banque Al Barka, jadis BEST Bank, qui ne finançait pas les particuliers au contraire de Zitouna Bank.
Pour Amel Amri, présidente de l’association TAIF et experte de la Chariâa, la finance islamique a un grand avenir en Tunisie, d’autant plus qu’elle a montré son efficacité au niveau mondial. « La création de la Banque Zeitouna a provoqué un engouement de la part des Tunisiens pour les produits islamiques. Ce qui montre que la finance islamique peut réussir en Tunisie. Et puis, plusieurs institutions financières internationales utilisent les mécanismes de la finance islamique qu’ils trouvent plus efficaces que la finance conventionnelle », affirme-t-elle.
La Zakat…
TAIF a été, ainsi, créée dans le but de mettre en place une plateforme de réflexion académique. A but non lucratif et à aspect scientifique, l’association vise la sensibilisation des acteurs du secteur financier à la finance islamique. Une première rencontre a été organisée les 7 et 8 mai 2011 sur la finance islamique et les perspectives de développement.
Une deuxième rencontre est prévue du 23 au 25 courant, portant le nom du premier forum de la Zakat. Elle sera organisée en partenariat avec l’Islamic Research Training Institute, la Banque Islamique de Développement et « Baït Azzaket » (Kuweït).
Le thème n’a pas été choisi arbitrairement, nous dit-on. Dans le contexte actuel dans lequel vit la Tunisie, la ZAKAT peut constituer une solution parmi d’autres pour pallier au déséquilibre social, selon Ali Tabib, membre du bureau directeur de l’association. « Avec la problématique du chômage et le manque de financement, la zakat peut être une solution efficace. L’Etat ne peut pas, à lui seul, tout résoudre. La société civile, le secteur privé, les individus, ont un grand rôle à jouer », ajoute-t-il.
Il affirme que la Zakat constitue, dans d’autres pays islamiques, une source de revenus importante qui peut être très efficace si elle est bien investie. A l’exemple du Soudan, dont l’expérience sera présentée lors du forum, la zakat représente près de 4% du Produit National Brut. En Tunisie, même s’il n’existe pas des études dans le domaine, on estime le pourcentage de 2 à 4%. « La Zakat n’est pas une subvention de consommation. Elle peut être utilisée dans l’investissement, dans le financement de projets. L’objectif du forum est de présenter une nouvelle approche de la Zakat tout en s’inspirant d’autres expériences dans ce domaine, à savoir l’expérience koweïtienne et soudanaise », explique M. Tabib.
Organisme dédié…
Le forum vise également à former les imams, les prédicateurs, les experts comptables et les juristes à la nouvelle approche. Trois ateliers seront organisés. Le premier présentera la Zakat du point de vue de la Chariâa islamique, pour les imams et prédicateurs. Le deuxième s’intéressera aux aspects comptables de la Zakat, pour les experts comptables. Le troisième s’attèlera aux mesures de création d’un organisme de Zakat, avec la participation de juristes.
D’ailleurs, l’association Å“uvre actuellement à la conception d’un premier modèle de ce qu’elle appelle « Organisation nationale de la Zakat » chargé de la collecte et de la gestion de la Zakat. Pour cela, elle a mobilisé un ensemble de juristes pour étudier les expériences d’autres pays afin de présenter un projet de constitution de cette organisation, « selon une approche purement tunisienne », insiste M. Tabib, prenant en compte la loi et le contexte tunisiens.
D’un autre côté, Mme Amri a souligné que l’association encadre les jeunes chercheurs des universités tunisiennes dans le domaine de la finance islamique. « Nous avons remarqué que plusieurs doctorants se sont voués à la recherche dans ce domaine sans avoir une bonne connaissance de ses enjeux. Notre rôle est de les soutenir et de les encadrer dans leurs approches », précise-t-elle.
Pour elle, la société civile devrait être au chevet du développement économique et social du pays. « En apportant son soutien, elle prend le train en marche vers un futur meilleur ».