Limites de l’action de l’Etat
Toute réflexion sur le futur du financement du développement régional en Tunisie doit partir d’une réalité que l’expérience passée a amplement prouvée, à savoir que l’Etat n’a ni les moyens financiers ni la flexibilité comptable ni le savoir-faire économique nécessaires pour assumer, seul, les premiers rôles en la matière.
* Une marge de manœuvre réduite.
En dehors des dotations modestes qu’il est en mesure de consacrer au développement régional dans le cadre de ses budgets fiscaux annuels, ou des financements qu’il peut lever via le crédit bancaire- y compris le micro-crédit- dispensé par les banques publiques, l’Etat n’a guère les moyens de faire face aux besoins de développement de régions qui abritent, selon les méthodes de calcul statistique utilisées, entre 1 million et 3 millions de citoyens tunisiens vivant au-dessous du seuil de pauvreté.
Au titre de la loi de finances complémentaire 2011, l’enveloppe consacrée aux dépenses dits de ‘développement’ (Titre II), – tous projets confondus -dépassent à peine les 4 milliards de dinars, sur un budget total proche de 21,5 milliards de dinars, soit un peu moins de 20%. A l’intérieur de cette enveloppe, les dotations prévues pour soutenir les programmes à caractère régional, entendez par là les aides urgentes octroyées aux régions les plus pauvres, totalisent un peu moins de 1,5 milliards de dinars. Ces chiffres révèlent l’inaptitude de l’Etat à faire face, seul, aux défis d’un développement régional soutenu, équilibré, durable et équitable dans les années à venir. Lorsque paraîtront les premières projections sur les besoins effectifs des régions à moyen et long termes, on prendra alors toute la mesure du gap entre l’immensité de la tâche à accomplir en termes de projets et de financements, et l’indigence des moyens publics disponibles, pour ce faire.
* Une comptabilité publique contraignante
Le financement budgétaire du développement régional ne se caractérise pas seulement par son indigence, mais par la longueur et la complexité de ses procédures, jusques et y compris le déboursement des secours urgents. Les dépenses publiques consacrées au développement figurent dans les budgets de l’Etat comme des crédits d’engagement, non comme des crédits de paiement. Le risque de voir l’Etat engager des dépenses qu’il ne serait pas en mesure d’honorer ultérieurement n’est pas une pure hypothèse d’école. Ce risque est d’autant plus réel que les dépenses de développement dont il s’agit portent, pour l’essentiel, sur des projets d’infrastructure (construction de routes locales et régionales et de pistes rurales, aménagement de zones industrielles et de zones touristiques, hôpitaux, écoles, etc.) dont les délais de réalisation sont longs et les coûts évolutifs.
* L’économie productive, en dehors du savoir-faire de l’Etat
L’économie productive ne fait pas partie du savoir-faire de l’Etat. En dehors de la planification à moyen et long termes, de l’aménagement du territoire, de l’éducation et de la formation, des travaux d’infrastructures et des équipements collectifs, la compétence de l’Etat en terme d’initiation et de gestion de projets productifs, ou de recherche & développement, ou d’investissements à risque, ou de diffusion de la culture d’entreprise, autant d’ingrédients est limitée.
Cela ne laisse guère le choix. Le développement régional futur devra être animé par un partenariat économique et financier public-privé.
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