Le modèle de société jacobin, centralisateur, omniprésent, dépositaire des espoirs de la nation et clientéliste à volonté, a vécu en Tunisie, affirment des observateurs avertis. Avec l’avènement de la révolution de la liberté et de la dignité. Dont les soubresauts, sur le plan économique et social, continuent de mordre à belles dents sur la réalité quotidienne des tunisiens. Epris de justice, de renouveau, de démocratie et d’équité dans les rapports marchands. Entachés d’opacité et de subordination durant les deux dernières décennies.
Cela dit, en dépit d’un léger redressement, constaté au mois d’avril 2011, dans certains secteurs liés aux industries manufacturières, la baisse de la production totale du pays, au cours du premier trimestre de 2011, de 3,3%, la persistance d’une croissance négative à hauteur de 2,3%, la régression de l’activité touristique d’environ 50%, la perturbation, pendant des mois, des exportations des phosphates, la diminution sensible du trafic aérien, la dégradation de la situation de l’emploi et le recul des investissements nationaux et internationaux, qui se sont tassés du quart, ont fini par interpeller l’ensemble des forces vives nationales, nous dit Hamadi Ben Sedrine, vice-président de l’UTICA, afin d’apaiser les tensions, de supplanter les idéologies, de maîtriser le temps, de réinventer l’espérance, de hiérarchiser les priorités, de renverser la tendance à l’alourdissement et d’évacuer les nuages, qui s’amoncellent dans le ciel économique d’un pays, en quête de stabilisation institutionnelle et politique.
Au fait, de 13 milliards de dinars fin 2010, les avoirs nets en devises de la Tunisie sont passés à 11 milliards de dinars, fin août 2011. Ce qui dégage, nous dit-on, 4 mois d’importation, soit 124 jours contre 147j fin 2010. Si le stock relativement confortable des réserves de change dans le pays, au début du mois de janvier 2011, a permis d’atténuer les interruptions brutales des entrées en devises, liées aux tassements des IDE, à l’arrêt, au début de la révolution, de la machine productive et aux reflux des touristes, les tirages, réalisés au mois de juillet et début août 2011, dans le cadre des prêts accordés par la BAD, la BERD et l’Agence Française de Développement (AFD), ont réussi à maintenir, déclare un expert financier, un niveau de réserves globalement acceptable, susceptible d’assurer trois mois d’importation, de gérer les vulnérabilités aux chocs, d’activer l’utilisation des lignes de financement bilatérales et multilatérales, de préserver la valeur de la monnaie nationale, de garantir une certaine stabilité des changes, d’honorer les engagements extérieurs du pays et de ramener la confiance chez les investisseurs.
A cet égard, l’institution bancaire, dont la principale priorité, depuis le 14 janvier 2011, est de préserver l’outil de production du pays à travers le rééchelonnement des crédits, fait face maintenant à des défis relatifs aux retombées de la récession économique, à certaines créances douteuses (3 milliards de dinars accordés aux membres de la famille du président déchu, soit 4,5% des engagements bancaires) et aux impératifs de la restructuration du secteur. D’après certains économistes, en dépit d’une conjoncture aléatoire, les banques tunisiennes ont augmenté, durant les sept premiers mois de l’année 2011, de 9,4% l’octroi des financements à l’économie nationale en comparaison avec la même période de 2010. Ce qui doit, bien entendu, s’accompagner d’un renforcement des capacités organisationnelles et institutionnelles des banques, de la poursuite de l’assainissement du portefeuille, de la consolidation du cadre réglementaire et prudentiel actuel et de l’intégration des normes internationales en cours dans les principales places financières du monde occidental.
Finalement, les Tunisiens, tout en retenant leur souffle en vue des élections de la Constituante prévues le 23 octobre 2011, gardent un œil bien ouvert sur les indicateurs économiques de leur pays, s’interrogent sur la soutenabilté de la dette extérieure, attendent, des compétiteurs politiques, des réponses à la montée du chômage, appellent au retour de la confiance et espèrent, au plus vite, la réalisation d’un taux d’investissement élevé, condition sine qua non, affirment des financiers, d’une croissance économique, accoucheuse d’emplois, de reprise, de productivité et d’énergies motivationnelles.