Lafarge : les grévistes de la faim iront “jusqu’au bout” pour sauver leur usine

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és de Lafarge en grève de la faim devant le siège du groupe à Saint-Cloud, le 26 septembre 2011 (Photo : Thomas Samson)

[27/09/2011 16:03:09] SAINT-CLOUD (Hauts-de-Seine) (AFP) “On est déterminés, on ira jusqu’au bout”: douze salariés de l’usine Lafarge de Frangey (Yonne), en grève de la faim depuis huit jours pour sauver leur usine, espèrent bien faire plier la direction, avec le soutien des élus locaux et de la gauche.

“Le moral est bon. On est prêts à aller jusqu’au bout”, clame mardi l’un d’eux, Jean-Marc Cartaut, devant une rangée de lits de camp sous une bâche à l’entrée du siège de Lafarge Ciments à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine).

Depuis le début de leur grève pour protester contre la fermeture annoncée en mai de leur usine de 74 salariés, les employés de Lafarge et le maire de leur commune qui les accompagne, ont déjà perdu entre six et huit kilos.

“Cela a été très dur les premiers jours, mais ça va mieux. On n’a plus la sensation de faim”, explique à l’AFP Patrick Martinot, 51 ans.

Pour l’instant, les grévistes, vus quotidiennement par un médecin, n’ont pas peur pour leur santé. “On se parle le soir pour être sûrs qu’il n’y en a pas un qui tombe dans le rouge”, dit M. Cartaut.

Pour eux, l’usine, en activité depuis 1930, est viable et sa fermeture n’est pas justifiée.

“On ne lâchera pas”, dit le maire Jean-Claude Galaud, 61 ans, qui se dit “solide comme du fer” et plaisante, “je ne dirai pas du béton”.

Au total, selon lui, “500 emplois sont en jeu”, avec les emplois induits. “On ne peut pas se permettre ça dans un territoire qui a perdu 2.000 emplois depuis 2002”.

Pour le président du conseil général de l’Yonne et sénateur du département André Villiers, venu avec une délégation d’élus du département, Frangey pose “le problème du maintien de l’industrialisation sur le territoire rural”.

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és de Lafarge en grève de la faim le 26 septembre 2011 à Saint-Cloud (Photo : Thomas Samson)

“Nous ne comprenons pas comment et pourquoi Lafarge a décidé de fermer l’usine”, a indiqué à l’AFP l’élu centriste. Il dit avoir “attiré l’attention des plus hauts représentants de l’Etat” et fait valoir que Lafarge “peut plier par rapport à une décision politique de haut niveau”.

Avant cette visite, d’autres personnalités de droite et de gauche, avaient apporté leur soutien aux grévistes, à l’instar du candidat à la primaire PS Manuel Valls.

“Ils veulent pouvoir vivre au pays”

Même si l’usine de Frangey sera évoquée lors d’un comité central d’entreprise (CCE) jeudi, la direction assure avoir “vraiment étudié l’avenir de ce site et abouti à la conclusion qu’il fallait annoncer sa fermeture”.

Le groupe, qui emploie 8.000 personnes en France, a réaffirmé mardi à l’AFP souhaiter “sortir de cette situation le plus rapidement possible” et rappelé s’être engagé à reclasser 100% des salariés, en proposant notamment la prise en charge de leur logement pendant 15 ans.

Mais les grévistes restent sur leurs positions.

“On ne veut pas négocier sur le social. Nous, ce qu’on veut c’est qu’ils trouvent une solution pour ne pas fermer l’usine”, affirme M. Martinot.

Un des membres de la délégation d’élus locaux note que Lafarge semble ne pas avoir “mesuré la question de la filiation”.

Benoît Kermarrec, gréviste de 44 ans, en est un exemple : son père a travaillé chez Lafarge pendant 40 ans, sa mère était éclusière sur le site.

“J’ai joué dans l’usine quand j’étais petit”, explique le salarié. “J’ai ma maison, ma femme travaille à l’hôpital local, j’ai tous mes amis”.

“Ils ne veulent pas d’argent, ils veulent pouvoir vivre au pays”, plaide Alain Henry, conseiller général communiste du canton.

“Ils ne se battent pas pour eux, mais pour une région”, dit-il, affirmant que le départ de Lafarge entraînerait une “spirale de l’échec”.

“Ils nous tuent nous, mais ils tuent aussi toute la région”, abonde Pierre Goux, l’un des grévistes de 39 ans.