Tunisie – Investissement étranger : Un potentiel à préserver

Le climat était assez tendu au cours de la rencontre qu’a accueilli, ce 30 septembre 2011, le Centre de Promotion des Exportation portant sur le thème du “partenariat international“, initié par l’Agence de promotion des investissements extérieurs (FIPA Tunisia), et ce dans le cadre du “Mois de l’emploi“.

Une opération de séduction voire de réconciliation, visant à redonner confiance aux investisseurs étrangers en la destination Tunisie, mais aussi de leur donner la parole et discuter de leurs préoccupations actuelles et futures. «On constate qu’il règne encore un climat peu propice à l’attraction des entreprises. Un sondage que nous avons fait dernièrement a montré que 94,4% des interviewés prévoient une stagnation voire une baisse de leurs chiffres d’affaires et 83% estiment qu’ils vont réduire l’extension de leurs investissements», affirme Foued Lakhoua, président de la Chambre tuniso-française du commerce et de l’industrie (CTFCI).

Campagnes de promotion

La CTFCI a, ainsi, entrepris des campagnes de promotion à l’étranger ainsi qu’une campagne d’information sur la situation politique et économique pour rassurer les partenaires étrangers. Ce qu’ont fait aussi les autres chambres mixtes, telle que la Chambre tuniso-italienne qui a tenu des rencontres dans plusieurs régions en Italie et a formé une cellule de crise.

La Chambre tuniso-allemande (AHK) n’est pas en reste, puisqu’elle a organisé, elle aussi, des manifestations sur la Tunisie dans certaines régions en Allemagne. Elle a anticipé un programme de promotion de l’emploi et de l’investissement avec la GIZ (Coopération allemande). Du 23 au 30 novembre 2011, selon son président Sami Hadji, organisera un forum économique tuniso-allemand.

Quant à la Chambre tuniso-américaine, elle est fait à la réticence des entreprises américaines à venir investir en Tunisie, non seulement à cause de la distance et l’inexistence des lignes américaines directes mais aussi du fait d’’un climat d’affaires peu propice. Après la révolution, on compte relancer la démarche, et Sami Chahed, président de la Chambre, annonce qu’une délégation américaine sera bientôt en Tunisie.

Blocages…

Du côté des entreprises, elles sont confrontées à des problématiques sociales sans précédent. Croire en la révolution tunisienne est une chose mais faire face à des revendications tumultueuses en est une autre. Hédi Maaroufi, représentant d’une société italienne, indique que son entreprise est toujours fermée à cause de revendications qui ne finissent pas du syndicat. Elle connaît des difficultés extrêmes et elle risque de fermer définitivement si la situation ne se débloque pas très rapidement.

Une autre problématique concerne les conditions d’investissement. «Nous sommes très optimistes pour la Tunisie. Nous voulons investir et nous avons déjà un projet d’extension. Mais nous avons une expérience négative avec les procédures bureaucratiques dans l’administration tunisienne», indique Giuliana Giunta, gérante d’une société italienne dans le secteur aéronautique. Elle souligne qu’en comparaison avec d’autres pays comme le Maroc, la situation est plus difficile. Une remarque que la FIPA (Agence de promotion de l’investissement extérieur) devrait prendre au sérieux.

Arnaud Boulard, directeur du site NIEF Plastic Tunisia, qui emploie 400 salariés à Ben Arous, se plaint de zones industrielles présentées en friche. «Il y a un manque flagrant de moyens de transport dans ces zones mais aussi de sécurité. Ce qui laisse l’accès très difficile à nos salariés. Il faudra que ces zones deviennent des centres de vie», souhaite-t-il.

Formation…

Il s’agit aussi du problème de la formation professionnelle qu’on estime en décalage avec les besoins réels des entreprises. M. Boulard signale qu’il faudrait développer plus la formation en alternance et créer un statut pour les stagiaires et les assurer en période de stage. «Nous recevons des centaines de candidatures mais nous n’avons pas de place pour eux parce que leur formation ne correspond pas à nos besoins», regrette-t-il.

Des préoccupations qui témoignent bien de la situation actuelle que vivent les investisseurs étrangers dans notre pays. Cela n’empêche pas Noureddine Zekri, directeur général de la FIPA, d’être optimiste. «Ce qui est réconfortant c’est que les investissements n’ont pas baissé. On a des niches structurelles qu’on peut développer. On peut améliorer l’offre locale par les lois, les réglementations, les infrastructures», souligne-t-il. Il ajoutera que plusieurs pays qui étaient jusque-là réticents à approcher le marché tunisien s’y intéressent maintenant, à l’instar de l’Europe de l’Ouest. Concernant le climat social, il indique que les crises se sont nettement atténuées par rapport aux premiers mois qui ont suivi la révolution.

Espoir…

A rappeler que la Tunisie compte 3.000 entreprises à participation étrangère, générant 351 mille emplois. Pendant la période 2007-2010, la création d’emplois a augmenté de 26%. La croissance de ces entreprises dans les secteurs à forte employabilité est de 36% par an pour les services, 4,1% pour l’industrie et 3,2% pour l’agriculture.

Durant les huit premiers mois 2011, on compte la création de 98 nouvelles entreprises à participation étrangère et 136 opérations d’extension. On estime que 6.770 emplois ont été créés.

Un potentiel qui ne doit pas laisser indifférent les autorités concernées. Le maintien de cet investissement signifie la préservation de milliers d’emplois mais aussi d’une valeur ajoutée bénéfique pour le développement de l’économie tunisienne.