à Emeryville, en Californie, en mars 2011. (Photo : Romain Raynaldy) |
[06/10/2011 20:22:01] LOS ANGELES (AFP) En rachetant le studio d’animation Pixar au père de “Star Wars” en 1986, Steve Jobs a transformé, par sa persévérance et son génie visionnaire, une petite société de graphisme numérique en l’un des studios les plus rentables et les plus influents de l’histoire du cinéma.
Ecarté d’Apple en 1985, Steve Jobs, décédé mercredi à l’âge de 56 ans, jette son dévolu l’année suivante sur la division de graphisme par ordinateur de George Lucas, créateur de “La Guerre des Etoiles”.
Racheté pour 10 millions de dollars, Pixar est alors davantage une société d’informatique qu’un studio de création.
“Au début, l’idée de Steve Jobs n’était pas tant de faire des films d’animation que de mettre au point des logiciels de graphisme pour ordinateur”, déclare à l’AFP Tom Sito, vétéran de l’animation hollywoodienne et ancien de Disney (“Aladin”, “La petite sirène”) et Dreamworks (“Shrek”).
à San Francisco (Photo : Kimihiro Hoshino) |
“Mais il s’est rallié à l’idée de faire des films après le succès des courts métrages de John Lasseter, comme +Luxo Jr+ ou +Tin Toy+”, ajoute-t-il.
Les petits chefs-d’oeuvre de John Lasseter — aujourd’hui tout-puissant directeur créatif de Pixar et Disney — étaient certes prometteurs, mais il fallait du culot et un certain génie visionnaire pour penser que l’animation par ordinateur pouvait être un marché lucratif.
Steve Jobs, ne manquant d’aucun des deux, mise sur la création et offre à Pixar la stratégie qui lui faisait défaut.
“Pixar était alors un repaire de scientifiques et d’artistes qui n’y connaissaient rien en affaires”, remarque M. Sito, également professeur de cinéma à l’Université de Californie du Sud (USC) à Los Angeles.
“Ils lisaient des bouquins pour savoir comment faire leur trou dans une industrie brassant des milliards de dollars. Steve Jobs leur a donné une stratégie pour conduire la compagnie”, dit-il.
Mais ces bonnes intentions ne suffisent pas à faire tourner Pixar, qui reste chroniquement déficitaire.
“Ils avaient beau avoir du succès avec les courts métrages, faire des publicités et chercher d’autres relais de croissance, à la fin du mois, Steve Jobs devait toujours sortir son chéquier”, observe Tom Sito.
A cette époque, le cofondateur d’Apple aurait injecté dans la société quelque 50 millions de dollars de sa fortune personnelle.
Mais en 1991, Steve Jobs est l’artisan de l’accord avec Disney, qui permet de produire “Toy Story”, premier film d’animation réalisé entièrement par ordinateur, qui met la société à l’abri du besoin.
Mais Steve Jobs, avec son intuition hors pair et son génie marketing, a encore un combat à mener: imposer la marque Pixar.
En 1982, le film culte “Tron” des studios Disney avait été réalisé par trois sociétés informatiques dont personne ne se souvient aujourd’hui car leurs noms étaient enterrés dans le générique de fin. Steve Jobs ne veut pas le même destin pour sa société.
“Pendant les négociations sur +Toy Story+, Steve était intraitable sur le fait de mettre le nom Pixar au début du film, à côté de Disney. Il voulait que la marque Pixar soit connue du public”, explique M. Sito.
Le sens des affaires de Steve Jobs se reflètera également dans la stratégie de mise en Bourse, lancée en même temps que la sortie de “Toy Story”, à l’automne 1995. Fort d’un excellent box-office et de critiques dithyrambiques, Pixar faut chavirer les investisseurs et l’entrée en Bourse est un succès.
La part de Steve Jobs dans le studio — il en détient 80% — est alors évaluée à 600 millions de dollars.
Après son retour chez Apple en 1997, Steve Jobs laisse les rênes de Pixar aux créatifs maison, qui enchaîneront les chefs-d’oeuvre (“Cars”, “Ratatouille”, “Le monde de Nemo”, “Là-haut”…) et accumuleront plus de 6,5 milliards de dollars de recettes.
Il en restera néanmoins président jusqu’au rachat en 2006 de Pixar par Disney, dont il entre alors au conseil d’administration.