Le Premier ministre du gouvernement provisoire, Béji Caid Essebsi, qui vient d’effectuer une visite de plusieurs jours aux Etats-Unis à l’invitation du président Obama, a passé le plus clair de son temps à amuser la galerie, quémander de l’aide et améliorer sa propre image auprès des Américains qui n’ont joué aucun rôle dans la révolution tunisienne..
Relevons au passage que la chaîne de télévision publique «Al Watanya», réputée depuis quelque temps pour n’être qu’une boîte de communiqués officiels, y a trouvé une précieuse opportunité pour en assurer une large couverture, parfois jusqu’au gavage. Heureusement, les téléspectateurs avaient la possibilité de zapper.
Point d’orgue de cette visite, une vidéoconférence organisée au siège de la Banque mondiale à Washington sur le thème: «Tunisia’s new path, the challenge of transition» (4 octobre 2011).
La représentation de la Banque mondiale en Tunisie a invité des médias tunisiens dont Webmanagercenter (WMC) et plusieurs représentants de la société civile à participer à ce débat, à partir de Tunis.
Au plan politique, M. Essebsi a mis l’accent sur trois choses importantes dont une le concernait personnellement.
Premièrement, «la révolution tunisienne a été déclenchée grâce à une jeunesse issue des régions démunies, une jeunesse sans armes, sans idéologie, sans encadrement politique et sans leadership.
Deuxièmement, interrogé sur ce qu’il entendait faire, après le 23 octobre 2011, le Premier ministre du gouvernement provisoire a déclaré «qu’il n’accepterait pas de nouvelles responsabilités que lorsqu’il serait sûr d’être utile».
Troisièmement, M. Essebsi s’est prononcé clairement sur le modèle turc et déclaré qu’il n’est pas transférable en Tunisie et qu’il avait longuement discuté de cette question avec le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, lors de sa récente visite en Tunisie.
Au plan économique, le Premier ministre, complètement en contradiction avec les objectifs de la révolution et apparemment fort influencé par certains de ces conseillers qui étaient d’anciens ministres de Ben Ali, a repris à son compte le discours propagandiste sur le miracle économique tunisien. Ainsi, son gouvernement a, semble-t-il, créé, en 2011, 50.000 emplois avec croissance zéro, mais il omet délibérément l’aspect provisoire et la précarité de ses emplois. Idem pour l’industrie exportatrice du pays qu’il a qualifiée de première industrie du sud de la Méditerranée, oubliant que les revenus et recettes de cette industrie revient à hauteur de plus de 80% aux maisons mères européennes et que les chétifs sous-traitants et ouvriers tunisiens n’en récoltent que des miettes.
Interpellé par WMC sur la stratégie que le gouvernement comptait mettre en place pour engager des investissements lourds (technopôles, universités, centres hospitalo-universitaires, routes, chemins, autoroutes…) à l’ouest du pays qui n’a bénéficié, à la faveur de l’ancien modèle de développement, que de l’assistance sociale, M. Essebsi a tenu à indiquer que la révolution a condamné plus un système politique qu’un modèle de développement et a confondu investissements lourds et industries lourdes qu’il a jugées, au regard des expériences passées, inopportunes pour ces contrées. Sans commentaire.