«Je ne sous-estime pas les problèmes auxquels nous devons faire face pour créer des emplois et rééquilibrer les régions. J’ai toutefois confiance dans les partis politiques en lice pour les élections et dans les propositions du gouvernement provisoire. Ce qui est rassurant est que tout le monde tient à ce que l’idéologie soit laissée de côté et que le pragmatisme domine», a indiqué Ahmed Abdelkefi, PDG du groupe Tuninvest-Africinvest qui vient d’effectuer le premier closing de MPEF III.
Le Maghreb Private Equity Fund (MPEF III) est l’un de fonds d’investissements gérés par le groupe Tunisie Valeurs. Il fait suite à MPEF et MPEF II, créés respectivement en 2000 et 2006. Il servira au financement ou à l’extension de 20 à 25 projets situés en Tunisie, Algérie, Maroc et Libye. Tuninvest a contribué dès les années 90 à la création d’une centaine de projets dont la moitié en Tunisie et représente en tant qu’investisseur, d’après son fondateur: «L’allié objectif de la direction des impôts, agissant de l’intérieur pour faire apparaître les véritables bénéfices et payer la part qui revient à l’Etat».
Ceci même si on déplore que ce rôle d’allié reste mal perçu par les administrations concernées. «Aujourd’hui, je suis plus optimiste car maintenant que la parole est libre, les entrepreneurs aspirent à la paix fiscale dont l’absence était leur véritable hantise jusqu’au 14 janvier dernier».
Investir est un métier utile à différents niveaux: introduire les règles de bonne gouvernance dans le secteur privé et, bien entendu, soutenir la création de l’emploi. «L’apport de notre métier dans le soutien à l’emploi est de plus en plus évident. Tout comme celui d’imposer une nouvelle éthique dans la gestion des affaires. La présence d’un capital investisseur dans une société favorise, il est vrai, l’accès aux crédits mais surtout le respect des règlements en vigueur et la transparence comptable et fiscale. Si l’entrepreneur dissimule ses bénéfices, le capital investisseur est la première victime», explique Ahmed Abdelkefi.
Alors que le marché des capitaux en Tunisie était embryonnaire, Tuninvest a, non seulement, osé mais bien réfléchi ses investissements. Ainsi, parmi tous les projets réalisés, trois sinistres seulement ont été enregistrés et qui ont représenté uniquement 1% des capitaux gérés. Neuf sociétés qui représentent 14% des capitaux gérés sont en difficulté, par contre, 18 entreprises (30% des capitaux gérés) ont accompli des surperformances et 20 autres dans lesquelles ont été investis 34% des capitaux gérés se développent en conformité avec les prévisions.
Les investissements les plus intéressants sont l’école d’ingénierie ESPRIT, d’ailleurs citée dans le palmarès des universités africaines les plus brillantes; Médis évoluant dans le secteur pharmaceutique; SOTUPA, VITALAIT et Nouvelair.
Les risques que prend Tunisie Valeurs sont calculés, il ne s’agit pas de financer n’importe quel projet: «Nous validons non seulement le projet mais l’entrepreneur. Il faut qu’il soit un bon manager, transparent et expérimenté. Il doit pouvoir analyser ses échecs, s’il en a, lucidement et en tirer l’enseignement pour ses projets futurs. Par rapport au projet, la dimension innovation est très importante tout comme de véritables débouchés sur le marché, qu’il soit national ou international», précise Ahmed Abdelkefi qui estime que les marchés, vu la mondialisation, se confondent entre intérieur et extérieur.
C’est ce qui explique que Tuninvest ait toujours soutenu les start-ups ou les quasi-start-ups. Les maîtres à bord ont toujours cligné de l’œil par rapport à ce qui se passe à l’international. Ils n’ont pas hésité à financer des projets tels Médis, Maghreb Leasing Algérie, Icosnet ou des opérations en préparation à des introductions en Bourse comme MATEL sur le marché de Casablanca ou GTA sur celui de Lagos.
«Notre talent consiste à identifier une TPE ou une PME et veiller à accélérer sa croissance pour en faire un champion côté maghrébin ou africain sur une ou deux Bourses».
Pour le fondateur de Tunisie Valeurs, le marché des capitaux est appelé à se développer dans le Maghreb et en Afrique et bien sûr en Europe, «où les banques sont appelées à ramener de la voile».
En Tunisie, nous sommes déjà dans la réforme du système financier et du marché des capitaux. Le ministère des Finances s’apprête à rénover complètement le statut des SICARS pour qu’elles assurent leur rôle dans le financement des PME. «Cela permettra de mettre fin à la situation de blocage que nous avons vécue depuis trois ans à cause d’interprétations fiscales de dernière minute, dénuées de fondement et aujourd’hui en jugement devant les tribunaux».
Le groupe Tunisie Valeurs s’intéresse de plus près au marché libyen. «Ce marché est important pour nous. La moitié de nos participations exportent vers la Libye. Ceci ne veut pas dire que l’Algérie et le Maroc ont une moindre importance car les opportunités d’investissements s’y multiplient».
Le secteur financier est riche en systèmes d’investissements et de financements plus diversifiés les uns que les autres. La voix choisie par Tuninvest-Africinvest est celle de mobiliser des capitaux sur 10 à 12 ans au terme desquels elle restitue les fonds et la plus-valeur à l’investisseur initial. Elle n’use pas de revolving mais la bonne presse du groupe lui facilite la mobilisation de nouveaux capitaux. Le MPEF III en est la preuve. «Les neuf fonds d’investissement que nous avons créés depuis les années 90 ont été pour beaucoup dans la décision d’investisseurs tels que la SFI, Proparco, BAD, Averroes, FMO, DEG, BIO et CDC entreprises de s’engager avec nous. La confiance y est».
Tuninvest-Africinvest a résisté aux différentes crises financières internationales de ces dernières années. Un signe de solidité et d’efficience qui ne trompe pas. Son cheval de bataille est la PME. «Elles ont un énorme potentiel de croissance et de création d’emplois qui ne se concrétise pas, faute de moyens en fonds propres. Nous les soutenons et nos investisseurs nous soutiennent».