Julie et Wallis Short avec leurs deux filles dans leur maison de Johannesburg le 7 octobre 2011 (Photo : Mujahid Safodien) |
[17/10/2011 10:58:33] JOHANNESBURG (AFP) Dix ans après l’exode des Blancs à la fin de l’apartheid, des familles refont leurs bagages, cette fois en sens inverse, heureuses de fuir la crise économique pour revenir en Afrique du Sud.
“Londres c’était super pour nous, mais on ne s’est jamais senti chez nous”, raconte Julie Short, qui a repris le chemin de Johannesburg où elle a grandi et retape maintenant une maison avec piscine, un luxe inaccessible en Grande-Bretagne, sans parler du soleil qui brille presque toute l’année.
Son mari, Wallis, qu’elle a rencontré à Londres, avait déjà la trentaine quand il a quitté l’Afrique du Sud. 44 ans, cet ingénieur informatique a rapidement retrouvé du travail dans une entreprise sud-africaine, malgré les contraintes du “Black Economic Empowerment” (BEE).
Le BEE désigne la discrimination positive instaurée dans les entreprises en 2000 pour favoriser la majorité noire, longtemps sous-scolarisée et exclue des emplois de cadre.
“J’étais assez confiant de décrocher le job, même avec le BEE”, dit-il. “En fait, pour la partie technique, on n’arrive pas à pourvoir les postes avec des candidats noirs s’ils n’ont pas d’expérience”
Wallis est la cible-type du site internet Homecoming Revolution, qui s’est monté pour aider des Sud-Africains dans leur transition vers le retour au pays.
“Notre but est de cibler les compétences qui manquent en Afrique du Sud, les médecins et les infirmières, les comptables, les informaticiens, toutes ces industries où nous avons un vrai besoin d’expertise, de management et où nous avons besoin que des compétences internationales fortes reviennent sur place et créent des emplois pour aider l’économie à croître”, explique Brigitte Britten-Kelly, à la tête du site.
Malgré un chômage élevé supérieur en moyenne à 25%, il manque près d’un million de professionnels de haut niveau en Afrique du Sud, selon le ministère du Travail qui chiffrait en 2008 à 913.000 la pénurie de professionnels de santé et d’ingénieurs.
La situation tient au faible accès aux études supérieures dans la majorité noire, un héritage de l’apartheid aboli en 1991, et au départ en masse des Blancs.
Environ 800.000 Sud-Africains blancs sont partis à l’étranger entre 1991 et 2001, principalement en Grande-Bretagne, en Australie et en Nouvelle-Zélande, selon des données du recensement.
L’exode a touché environ 15% de la population blanche –qui était de 4,5 millions au plus haut en 1991. Peur de la criminalité, de voir plonger le pays dans la guerre civile, racisme aussi parfois. La tendance semble s’être calmée, voire s’inverser.
Le nombre exact de Sud-Africains qui reviennent, comme Julie et Wallis, n’est pas connu car bon nombre ont la double nationalité et ne comptent pas comme immigrants dans leurs pays d’adoption.
Mais la crise économique dans les pays riches est un important facteur qui déclenchent leur retour, selon des experts.
“L’Europe est perturbée, l’économie américaine est faible également. Une large partie de l’économie mondiale où les gens avaient souvent émigré ne marche pas bien, et les perspectives d’emploi n’y sont pas bonnes. Je pense que ça ralentit aussi le taux d’immigration”, analyse John Loos, économiste à la banque sud-africaine First National Bank.
En comparaison, l’économie sud-africaine connaît une croissance continue, sauf en 2009 où elle a connu seulement neuf mois de récession.
A Londres, où elle était installée avec son mari et ses deux filles dans 75 m2, Julie dit qu’elle “n’a jamais eu la qualité de vie qu’elle peut avoir ici”. Et elle ajoute: “Nous adorons être chez nous, c’est super”.