Assis sur des poufs couleurs pastel, Franck et Marie-Angèle, deux “sans-bureau-fixe”, discutent de leurs projets professionnels autour d’un café. Ils sont membres du même espace de “coworking”, une structure qui met des bureaux à disposition des travailleurs nomades.
Consultant indépendant auprès des collectivités territoriales, Franck Piffault se rend tous les mercredis à l’espace Soleilles Cowork, qui a ouvert à Paris en septembre. “J’y trouve un environnement plus calme et adapté au travail que chez moi”, explique ce père de deux enfants.
Il apprécie la “souplesse” de ce système, qui lui permet aussi de “rompre avec la solitude du travailleur indépendant et de rencontrer des gens d’univers différents”.
A quelques mètres de Franck, Marie-Angèle Muraccioli pianote sur son laptop. Elle dirige une entreprise de lissage capillaire. Avant de découvrir l’espace, la trentenaire travaillait de son domicile et avait “beaucoup de mal à séparer la sphère privée de la sphère professionnelle”.
Fondé par cinq femmes, Soleilles Cowork met l’accent sur l’aspect communautaire. “L’objectif est de faire en sorte que nos membres collaborent, qu’ils établissent des connections entre eux”, ambitionne Sandrine Benattar, l’une des cofondatrices. Pour ce faire, l’espace organise des événements fédérateurs: “Par exemple, nous allons faire venir un photographe et proposer à nos membres de faire leurs photos professionnelles.”
Soleilles Cowork marche sur les traces de La Cantine, pionnier français du “coworking”. Elle a été créée en 2008 par Silicon Sentier, une association de start-ups franciliennes, et cible en priorité les acteurs des nouvelles technologies.
“L’idée de départ était de créer une cantine pour les start-ups, un lieu de rencontres informelles et fortuites”, raconte Marie-Vorgan Le Barzic, fondatrice de cet espace qui accueille une quinzaine de “coworkers” par jour.
Fiodor Tonti est l’un d’eux. Ce designer milanais de 32 ans a sympathisé avec un compagnon de “coworking”. Il leur arrive désormais de collaborer sur des projets professionnels. “Je lui offre un peu de mon temps et de mes compétences. Il en fait autant si je le lui demande, assure Fiodor. Sans La Cantine, nous ne nous serions sans doute jamais rencontrés.”
En presque quatre ans d’existence, l’espace parisien a fait des petits: quatre Cantines ont vu le jour à Toulouse, Toulon, Rennes et Nantes.
Toutes enseignes confondues, la France compte plus de vingt espaces de “coworking”, dont sept à Paris. Dix-huit sont en projet selon le site Internet Coworking initiatives.
“La particularité des espaces français, par rapport à ceux des autres pays, c’est qu’ils sont généralement soutenus par les pouvoirs publics”, indique Jean-Yves Huwart, organisateur depuis 2010 de la conférence européenne du “coworking”.
Loin devant l’Hexagone, les Etats-Unis dénombraient 350 espaces à la fin mai, sur 820 dans le monde, selon le “webzine” de référence Deskmag. “A San Francisco, où le phénomène est né en 2005, il y a un espace tous les deux ou trois blocs”, lâche Jean-Yves Huwart. En Europe, l’Allemagne (67) mène la danse.
“Le +coworking+ connaît une croissance exponentielle, affirme Jean-Yves Huwart. En moyenne, on observe chaque année un doublement du nombre d’espaces.”