L’appel au secours des employés de Karthago Pilotage

«Je suis arrivée à une telle situation de besoin que j’ai eu l’idée de me
planter devant le Premier ministère avec une affiche appelant au retour de Zine
El Abidine Ben Ali», s’est écriée, avec tout le désespoir du monde, une employée
du
groupe Karthago.

La dame en question, qui travaille depuis 12 ans payée apparemment un salaire de
misère dans le groupe Karthago, confisqué par l’Etat, n’a pas reçu de salaire
depuis 3 mois: «mes enfants n’auront pas de mouton cette année».

Toutes les administrations sollicitées pour résoudre le problème de ces salariés
sont restées sourdes à leurs appels. «Les mandataires judiciaires désignés par
les tribunaux servent leurs propres intérêts et recrutent leurs parents
proches”.

Pendant ce temps et alors que le mandataire judiciaire, désigné d’office par le
tribunal pour gérer financièrement et administrativement Karthago Pilotage, est
rémunéré mille dinars le mois, ses employés sont privés de salaire. Pire: depuis
janvier dernier, ils ne bénéficient ni de couverture sociale, ni de couverture
médicale.

Le siège du groupe regroupant les employés de toutes les filiales, (vous pouvez
travailler avec un autre d’une entreprise différente dans le même bureau), vous
pourrez avoir «Votre collègue qui son salaire, ses augmentations et ses primes
et vous êtes là devant lui à peiner, pointer et travailler sans rien en échange,
trouvez-vous cela normal? C’est l’absurdité même. Les filiales des groupes
étaient habituées à se dépanner les unes les autres, maintenant que chacune
d’elle a un mandataire judiciaire, chacun se bat pour sauvegarder ses meubles,
les autres peuvent brûler en enfer!», affirme une employée du groupe.

Karthago Pilotage est une société de service qui a pour mission d’approvisionner
toutes les sociétés du groupe. Depuis sa confiscation par l’Etat, elle n’arrive
plus à se faire payer ses factures qui servent, entre autres, à rémunérer son
personnel. «Nous avons harcelé la juge contrôleur à tel point qu’elle a imposé à
une autre entreprise du groupe de débourser un montant de 20.000 dinars à la
nôtre. Ce qui nous aurait permis de recevoir des salaires et au moins de fêter
l’aïd. Malheureusement, le mandataire judiciaire de Karthago Pilotage s’est dit
indisponible. Normal, il perçoit une rémunération qui s’ajoute à ses
appointements, pourquoi se soucierait-il de nous?», affirme notre
interlocutrice.

La juge harcelée de nouveau par les employés aurait ordonné un déblocage de
l’ordre de 29 MDT pour consolider l’assise financière du groupe. La décision
doit être entérinée par la Commission de la confiscation, qui ne s’est pas
prononcée à ce jour.

En désespoir de cause, les employés lésés se sont réfugiés à l’UGTT pour qu’elle
défende leurs intérêts. «On nous a fait payer des adhésions de 12 dinars chacun
et on nous a fait promesses sur promesses sans succès. Nous avons le sentiment
que tout le monde est indifférent à notre sort, médias compris».

Pour le moment et alors que le Groupe Karthago est en passe de devenir
définitivement un patrimoine de l’Etat, les responsables actuels sont en train
de consolider certaines filiales du groupe et de procéder à la réaffectation des
différents personnels pour éviter tout licenciement. «Ce qui m’importe
aujourd’hui c’est d’avoir mon salaire, la réaffectation ce n’est pas le plus
urgent pour moi».