Les six indicateurs mondiaux de la gouvernance (IMG), développés par la Banque
mondiale (BM), pour mesurer la qualité des pays, sont construits à partir de
données liées à la perception d’un certain nombre de phénomènes.
En effet, procéder avec exactitude à une comparaison de la gouvernance entre des
différents pays au moyen d’indicateurs agrégés semble être une méthode peu
fiable. Daniel Kaufmann, membre affilié de Brookings Institute et spécialiste
international des questions de la gouvernance, semble convaincu de ce manque de
fiabilité. C’est en tout cas ce que nous avons constaté lors de la
conférence-débat organisée lundi 14 novembre 2011 par le centre de recherches et
d’études financières relevant de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur le
thème «la gouvernance et le monde arabe en transition démocratique».
Ainsi, M. Kaufmann a indiqué que «les utilisateurs doivent tenir compte des
marges d’erreur clairement indiquées à côté des scores de chaque pays. Les
données visent en fait à établir une norme de transparence». C’est le cas
notamment de l’indicateur mesurant la «maîtrise de la corruption», qui dépend en
réalité de la perception de ce qu’est la corruption.
Toujours selon M. Kaufmann, en l’absence de progrès dans les domaines de la
capacité et de la responsabilité et dans la lutte contre la corruption, les
autres réformes n’auront qu’un impact limité. Mais la bonne gouvernance et la
maîtrise de la corruption sont-elles vraiment si importantes pour le
développement dans le monde arabe?
Plusieurs chercheurs, à l’instar de M. Kaufmann, ont pu étudier l’influence de
la maîtrise de la corruption sur le développement. Il ressort généralement de
leurs travaux que les pays arabes, particulièrement ceux qui ont connu des
révolutions, pourraient tirer d’une gouvernance plus efficace de gros dividendes
du développement. «Un pays qui porte sa gouvernance d’un niveau bas à un niveau
moyen pourrait quasiment tripler son revenu par habitant dans le long terme. Et
c’est le cas pour la Tunisie», estime l’expert tout en signalant que la
corruption fragilise incontestablement les démocraties naissantes.
Pour finir, M. Kaufmann tient à préciser que les enjeux politiques de la “bonne
gouvernance” pour les pays arabes concernent principalement la question
“sensible” de la démocratisation au sens large de ces pays. Comme le démontre le
tableau ci-dessous, parmi 113 pays qui ont connu des révolutions depuis le début
du dernier siècle, seuls 57 pays ont en fait réussi leur parcours vers la
démocratie.