Le commerce en ligne à l’assaut de la Russie et de ses régions reculées

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à Moscou (Photo : Kirill Kudryavtsev)

[15/11/2011 10:48:22] MOSCOU (AFP) Le commerce en ligne a le vent en poupe en Russie, vaste pays aux régions reculées et formidable marché qui reste à conquérir, mais cette méthode de vente doit composer avec une poste notoirement inefficace et avec la réticence des Russes à l’égard du prépaiement par carte.

Outkonos.ru, labirint.ru, wildberries.ru: du supermarché à la librairie, en passant par les vêtements, les sites d’e-commerce sont aujourd’hui en plein essor dans ce pays de près de 143 millions d’habitants.

“La vente de marchandises via internet est l’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie russe”, indique à l’AFP le service de relations publiques du plus grand supermarché en ligne du pays, Outkonos.

Si la part du commerce en ligne en Russie n’est encore évaluée qu’à 1,6% du chiffre d’affaires global du commerce de détail en 2011 — trois fois moins qu’en Europe –, le secteur est “en croissance rapide”, souligne t-on chez Outkonos.

Une Française à la tête du leader

Symbole de ce succès grandissant, la société de distribution en ligne Ozon, équivalent russe d’Amazon et leader incontesté du marché, a dégagé un chiffre d’affaires de 140 millions de dollars en 2010 et table sur près de deux milliards de dollars dans les années à venir.

Lancé en 1998 et dirigé depuis juillet par une Française trentenaire, Maelle Gavet, Ozon propose aujourd’hui près de 1,5 million de produits en ligne, allant des livres aux films et aux jeux vidéos, en passant par la hi-fi et les réservations de voyages.

Selon Mme Gavet, le succès du commerce en ligne en Russie est dû notamment aux insuffisances du système de distribution classique, en particulier en province.

Plus les régions sont éloignées, moins elles ont “accès aux biens”, souligne la jeune femme, qui a rejoint Ozon début 2010, après l’avoir connu lors d’une mission pour le compte d’un grand cabinet de conseil international.

Il n’est pas rare qu’en province, les consommateurs soient obligés d’acheter au marché toutes sortes de produits – de l’ameublement à la puériculture -, “avec les problèmes de qualité, de marque, qu’on peut imaginer”, explique-t-elle.

Une formidable opportunité pour le commerce en ligne. Pour preuve, si aujourd’hui Ozon réalise 55% de son chiffre d’affaires entre Moscou et Saint-Pétersbourg et 40% dans les régions russes, la tendance “est en train de se renverser”, dit Mme Gavet.

Toutefois, malgré son essor, le commerce en ligne reste confronté à des particularités locales, parfois handicapantes.

Les Russes “ont peur des cartes de crédit”, estime ainsi l’analyste Ivan Nikolaev, spécialisé dans le commerce de détail, pour la banque russe d’investissement Aton.

Du coup, le système de paiement à la livraison est extrêmement prédominant, représentant 80% du chiffre d’affaires d’Ozon et également “la majorité” de celui d’Outkonos, qui n’a d’ailleurs que récemment offert à ses clients la possibilité de payer en ligne par carte bancaire.

Autre obstacle : les insuffisances de la poste russe, très peu fiable. Les envois de colis souffrent couramment de retards dépassant parfois un mois, quand ils ne sont pas perdus.

Pour y remédier, Ozon a dû développer un système de livraison autonome, et a créé une filiale spécialisée qui dispose de ses propres camions et couvre “plus de 70% de la population russe, avec plus de 1.000 points relais”, explique Mme Gavet.

Un système qui coûte toutefois au groupe plusieurs “millions de dollars chaque année”, reconnaît-elle.

Mais les obstacles spécifiques à la Russie freinent aussi les grands concurrents étrangers comme Amazon, qui n’est pas à ce jour implanté dans le pays.