La vente du Rafale aux Emirats en difficulté

photo_1321460592834-1-1.jpg
çais Dassault, le 23 juin 2011 au Bourget (Photo : Pierre Verdy)

[16/11/2011 16:23:44] DUBAI (AFP) Les Emirats arabes unis ont douché mercredi les espoirs du Français Dassault de lui vendre son avion de combat Rafale, jugeant son offre “non compétitive” et ouvrant le marché à ses concurrents.

Dassault et les Emirats négocient depuis des années la vente de soixante avions de combat multirôle Rafale, en service dans l’armée française, mais qui n’a jamais trouvé acheteur à l’étranger.

Après avoir sollicité des informations sur l’Eurofighter, construit par un consortium européen mené par EADS, puis sur les F-15 et F-18 de l’Américain Boeing, les Emirats ont porté un coup terrible à Dassault.

“La France a fait tout son possible aux plans diplomatique et politique pour conclure la transaction” et “Dassault était en tête de nos considérations à la lumière du suivi personnel par le président Sarkozy” de l’affaire, a déclaré le prince héritier d’Abou Dhabi, cheikh Mohamed ben Zayed, cité par l’agence officielle Wam.

“Malheureusement, il semble que Dassault ne réalise pas que la volonté politique et tous les efforts diplomatiques ne peuvent pas faire passer des conditions commerciales non compétitives et irréalisables”, a ajouté le prince héritier, également commandant en chef adjoint de l’armée des Emirats.

Cette déclaration publique peut apparaître comme une façon de faire monter la pression, mais les signes de l’insatisfaction émiratie se sont multipliés ces derniers jours.

Le patron de Dassault Charles Edelstenne a été accueilli dimanche au salon aéronautique de Dubaï par des articles dans la presse spécialisée révélant que les Emirats s’étaient intéressés à l’Eurofighter, concurrent du Rafale.

Eurofighter – un consortium conduit par EADS, et qui associe le Britannique BAE systems et l’Italien Finmeccanica – confirmait aussitôt qu’il préparait une offre.

Mais dans la foulée, Boeing a confirmé qu’Abou Dhabi l’avait également sollicité, comme l’a révélé la revue spécialisée Defense News. Le Rafale était jusque-là seul en course.

“Les Emirats arabes unis ont reçu des briefings sur le F-15 et le (F-18) Super Hornet”, a déclaré un porte-parole de Boeing, Paul Lewis. “Nous restons en contact avec le client et fournissons les informations qu’il demande”.

Abou Dhabi peut se montrer d’autant plus exigeant que ses besoins en avions de combat ne sont pas urgents.

Les Emirats sont déjà équipés des meilleurs avions Mirage de Dassault, soixante Mirage 2000-9, et des plus avancés des F-16 de Lockheed Martin, soixante F-16 Bloc 6.

L’achat du Rafale apparaissait comme une faveur pour le gouvernement français. “Il n’y pas de besoin. C’est un achat politique”, a déclaré à Defense News une “source au courant des discussions”. Dassault ne comprend pas “la nature politique” du contrat et “le prix est ridicule”, ajoute-t-elle.

Interrogé par l’AFP, Dassault s’est refusé à tout commentaire.

La France ne s’attendait manifestement pas à ce nouvel éclat. Dimanche encore, en visite à Dubaï, le ministre français de la Défense Gérard Longuet s’était montré confiant sur la conclusion de la vente avant la fin de l’année.

Les observateurs dans la région rappellent cependant que les Emiratis avaient déjà brandi la menace de se tourner vers d’autres constructeurs avant de conclure l’achat des Mirage 2000-9 en 1998.

Un des arguments qui pèsent toujours en faveur de Dassault est que seule la France pourrait reprendre les Mirage 2000-9 en surnombre si les Emiratis achetaient de nouveaux avions. M. Longuet a laissé entendre que Paris pourrait s’engager à faire de son mieux pour les revendre à des tiers.

Le Rafale est encore en compétition sur d’autres marchés, en Inde où la décision est attendue dans les prochains mois, en Suisse et au Brésil.