Election d’une Constituante ou élections législatives? la question peut être posée face aux conclaves des trois partis de la majorité pour se partager le gâteau. Les gesticulations et les déclarations des responsables politiques d’Ennahdha sur la place des langues étrangères, le statut des mères célibataires ou encore sur l’avènement du 6ème califat bien inspiré… semblent accréditer la thèse selon laquelle nous n’avons pas élu une Constituante pour rédiger une nouvelle Constitution.
La question vaut d’être utilisée comme une devinette, tant elle peut paraître à certains assez cocasse. La voici: pour quoi avons-nous voté le 23 octobre 2011? La réponse pourrait être évidente: pour une Constituante chargée en 1 an d’écrire une nouvelle Constitution.
Les événements qui se succèdent depuis cette date nous donnent à penser que c’est loin d’être le cas. Nous sommes en présence d’élections législatives pour une mandature de trois ou quatre ans. Un des partis concernés par la constitution d’un gouvernement sorti de la Constituante, le Congrès pour la République (CPR), revendique un mandat de trois ans pour cette dernière.
Réunis en conclave, trois partis majoritaires au sein de la Constituante (Ennahdha, le CPR et Ettakatol) n’évoquent, à cet effet, qu’un programme de gouvernement et le partage des fonctions principales du pouvoir.
Et la Constitution? Elle semble reléguée au second plan, sinon aux oubliettes! De toute manière, le régime que le pays devra choisir sera parlementaire. Ennahdha, qui guide ce peloton, semble le vouloir. Et tout faire pour l’imposer. Déjà le fait accompli est là: le nouveau président devra être élu par… la Constituante.
Le chaud et le froid
En plus de l’intérêt sans cesse croissant pour le volet concernant le partage des premières fonctions de l’Etat (la présidence de la République, celle du gouvernement et cette de la Constituante), l’opinion n’a d’yeux que pour les noms de ceux qui seront placés à la tête de des principales institutions de l’Etat. Ou du moins veut-on l’y obliger à penser ainsi.
Les trois partis cités plus haut participent à cette focalisation de l’intérêt de tous en soufflant le chaud et le froid. Le matin, il y a accord, et le soir, il est rompu. Ou pas encore mur.
Un jour, il y a un nom pour tel ou tel ministère et un autre, il y a un autre nom. De quoi perdre son latin, mais aussi son persan et surtout son arabe!
Et la Constitution dans tout cela? On verra plus tard. Histoire de renverser le sablier. Et de dire deux choses: 1/ le peuple s’est trompé d’élections, 2/ le maroquin avant le suffrage du peuple!
Comment en effet interpréter autrement les gesticulations et les déclarations des premiers responsables politiques du pays qui focalisent leurs intérêts sur des aspects qui n’ont rien à voir avec la Constitution.
Ainsi en est-il des “bombes“ lancées de temps à autres par des responsables politiques dont ceux d’Ennahdha sur l’usage des langues étrangères, sur le statut des mères célibataires ou encore l’avènement du 6ème califat bien inspiré (Al Kilafa Al Rachida).
Faut-il du reste s’en étonner lorsque les principales thématiques de la campagne électorale de la Constituante du 23 octobre 2011 n’ont porté que peu sur la Constitution censée remplacer celle de juin 1959.
En lieu et place d’un régime parlementaire ou présidentiel, nous avons vu les candidats nous parler de développement régional, de création de centaines de milliers d’emplois, de baisse du prix du pain ou encore de création d’un fonds pour chômeurs.
Al Aridha Achaâbya (la Pétition populaire), qui ne cesse de défrayer la chronique, et qui compte 26 élus au sein de la Constituante , n’a inscrit aucun point relatif à la rédaction de la Constitution dans son programme.
A croire que nous nous sommes trompés d’élection!