De nombreux observateurs prédisent –et espèrent- que le taux d’abstention ne gâchera pas les élections législatives du vendredi 25 novembre 2011. Des élections dont les enjeux sont des plus importants. A commencer par celui d’engager le Maroc sur la voie d’une plus grande démocratie assurant notamment le passage vers une monarchie constitutionnelle.
S’il est une crainte qui habite aussi bien le Makhzen, expression dans le langage familier marocain pour désigner l’État marocain, que les partis politiques, la société civile, les médias et les intellectuels, à l’endroit des élections législatives de ce vendredi 25 novembre 2011, c’est bien celle d’une forte abstention.
Nombre de journalistes et d’intellectuels, médiateurs par excellence de la société marocaine, estiment, à ce juste propos, que cela serait fort dommage pour la dynamique engagée dans le pays depuis le discours du roi Mohamed VI du 9 mars 2011. Discours dans lequel il avait annoncé un ensemble de réformes inscrites pour l’essentiel dans une nouvelle Constitution approuvée par 97,58% des voix pour un taux de participation jamais atteint au Maroc: 73%.
Ces réformes, inscrites du reste dans l’ouverture amorcée par le souverain chérifien, depuis son accession au trône en 1999, doivent engager le Maroc sur la voie d’une plus grande démocratie assurant notamment le passage vers une monarchie constitutionnelle.
Les raisons de la crainte de nombreux Marocains? L’appel en faveur d’un boycott des élections législatives lancé au cours de grandes manifestations qui ont été organisées, les 23 octobre et 20 novembre 2011, dans certaines villes du Royaume.
Renouvellement et rajeunissement du personnel politique
Cette crainte se nourrit également, estiment certains observateurs, du fait que le Maroc est «habitué» à l’exercice de l’abstention. Le taux d’abstention a été de 37% au cours des dernières élections législatives. Les observateurs estiment –et espèrent- que ce taux ne dépasserait pas, le vendredi 25 novembre 2011, 45% ou 50%.
Ils fondent cette prédiction sur l’importance des enjeux des élections du 25 novembre qui n’ont, aux dires de nombreux analystes, rien à voir avec les précédentes.
La spécificité de ces élections a été largement étayée à longueur de colonnes par la presse écrite, du reste riche et diversifiée, mobilisant les quelque 13, 6 millions d’inscrits sur les listes électorales pour un vote historique.
La lecture de la presse marocaine permet, cela dit, de dégager deux enjeux importants. Et ce, évidement, en dehors de l’enjeu relatif aux nouvelles perspectives ouvertes en matière de nouvelles conquêtes en matière de démocratie et de libertés apportées par la Constitution du 1er juillet 2011, qui sera le cadre d’évolution de la nouvelle mandature.
Premier enjeu: le renouvellement et le rajeunissement du personnel politique dont la Chambre des représentants est sans doute un des plus importants lieux d’expression. Selon les statistiques diffusées par les médias marocains, 36% des candidats ont au moins de 45 ans et 36% ont entre 45 et 55 ans. 87% des candidats se présentent, par ailleurs, pour la première fois aux suffrages des Marocains. Une révolution dans un pays marqué par un «certain immobilisme» de son personnel politique, comme dans nombre de pays arabes du reste.
Le souverain a déjà voulu souligner fortement l’importance de l’étape
Second enjeu? La situation économique du pays qui préoccupe de nombreux observateurs. Et notamment le chômage des jeunes. Il est à rappeler qu’«un rapport préliminaire du Conseil économique et social a soutenu que près d’un jeune marocain sur trois (31,3%) dans la tranche des 15-24 ans est au chômage». Et que «le taux des sans-emploi chez les diplômés de l’enseignement supérieur et de la formation professionnelle est de plus de 16%, soit 7 points au-dessus de la moyenne nationale» (notre confrère du 11 septembre 2011).
Par ailleurs, le déficit du budget est estimé à 5,7%. Et sans mesures drastiques, celui-ci devrait atteindre 7,5% en 2012.
Le Maroc, dont l’économie est largement ouverte sur l’économie mondiale et notamment européenne, s’inquiète, en outre, de la récession qui frappe de plain-pied les économies des pays de la zone euro.
Le souverain a déjà voulu souligner fortement l’importance de l’étape. Ainsi a-t-il consacré un pan entier de son discours à la nation, le 6 novembre 2011, à l’occasion du 36ème anniversaire de la Marche verte, initiée par son père, le roi Hassan II (1929-1999), aux élections du 25 novembre 2011.
Le roi Mohamed VI a notamment souligné que le scrutin constitue «le principal indicateur à l’aune duquel se mesure la mise en œuvre démocratique de la nouvelle loi fondamentale».
En ajoutant que «tous les acteurs de l’opération électorale, en l’occurrence les partis politiques assurant l’encadrement des citoyens, les autorités organisatrices, les structures associatives dynamiques, les médias professionnels et les électeurs responsables, se doivent-ils d’être à la hauteur de la nouvelle ère constitutionnelle qui exige probité civique et citoyenneté engagée. Fortes de leur crédibilité et de leur efficience, les institutions législative et exécutive deviendront ainsi une force motrice pour la démocratie et le développement, jouissant de la confiance populaire et assurant la réconciliation du citoyen avec les institutions élues».
Il ne pouvait être plus clair.