Gaz : la suspension du gel des prix est un coup dur pour le gouvernement

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Un compteur de gaz (Photo : Mychele Daniau)

[28/11/2011 16:21:10] PARIS (AFP) Le gouvernement a perdu lundi une manche dans la bataille des prix du gaz, en voyant retoqué par le Conseil d’Etat son gel des tarifs de GDF Suez –une de ses promesses en terme de pouvoir d’achat– avec un mois pour revoir sa copie.

Saisie par la procédure d’urgence du référé, la plus haute juridiction administrative a relevé “un doute sérieux sur la légalité” de l’arrêté officialisant le maintien au 1er octobre des tarifs réglementés de GDF Suez dont bénéficient quelque 10 millions de ménages français.

Le Conseil d’Etat relève que selon la Commission de régulation de l’Energie (CRE), qui avait désavoué le gouvernement dans un rare “avis défavorable” fin septembre, les prix auraient dû augmenter “de 8,8% à 10% selon les tarifs” dans le cadre de la formule en vigueur.

Critiquée notamment par les associations de consommateurs qui l’accusent d’être défavorable au client, la formule est actuellement en cours de révision. Mais le gouvernement n’était pas en droit de la jeter aux oubliettes, selon la justice.

“Contrairement à ce que soutenait l?administration, aucune disposition du décret du 18 décembre 2009 ne permettait aux ministres de suspendre l?application de la formule tarifaire”, a répliqué le Conseil d’Etat, qui donne un mois à Bercy “pour se prononcer à nouveau” sur les tarifs.

Le coup est rude pour le gouvernement et le ministre de l’Energie Eric Besson, qui avait confirmé la semaine dernière le gel des prix du gaz et de l’électricité d’ici la présidentielle, un coup de pouce pour le pouvoir d’achat et une promesse phare dont se targuait la droite à l’approche des élections.

Sollicité par l’AFP, le cabinet du ministre n’a pas réagi dans un premier temps à cette décision pour l’heure sans impact pour les foyers.

A la Bourse de Paris, GDF Suez surfait sur l’enthousiasme général: vers 16H15, son action s’envolait de 6,45% à 19,30 euros, mais dans un marché lui aussi en très forte hausse (+4,97%).

“La décision du Conseil d’Etat confirme notre analyse juridique, qui est que la loi doit s’appliquer”, a dit une porte-parole du groupe.

Le recours en référé n’émanait pourtant pas du géant gazier mais de ses petits concurrents: l’association nationale des opérateurs détaillants en énergie (Anode), qui regroupe les fournisseurs alternatifs Direct Energie, Poweo, Altergaz et Gaz de Paris.

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ée nationale le 22 novembre 2011 (Photo : Jacques Demarthon)

GDF Suez avait lui aussi attaqué l’Etat –une première à l’encontre de son actionnaire principal– mais s’était contenté d’un recours.

L’Anode faisait valoir que les tarifs bas imposés à GDF Suez créaient une distorsion de concurrence dont ses petits concurrents, à la situation financière beaucoup plus fragile, faisaient les frais. Le Conseil d’Etat a reconnu le caractère “urgent” de leur demande, l’hiver représentant le gros des ventes de gaz.

“Ce rappel à la loi était indispensable, le gouvernement étant tenu de respecter les règles qu’il a lui-même fixées”, a fait valoir à l’AFP Me Frédéric Thiriez, un des avocats de l’Anode.

“Au-delà, le Conseil d’Etat affirme son attachement à une ouverture effective du marché du gaz à la concurrence qui profitera, à terme, aux consommateurs”, a-t-il espéré.

Car l’ouverture à la concurrence, effective depuis 2007, reste globalement une chimère en France, sans compter une hausse importante des prix ces dernières années.

Plus de 90% des particuliers sont restés clients de GDF Suez, et les quelques centaines de milliers d’abonnés qui lui ont échappé ont rejoint… EDF.