Phénomènes naturels exceptionnels par le passé, les crues de l’oued Medjerda sont devenues de plus en plus régulières attestant d’un changement climatique majeur dans notre pays.
Depuis 2003, les crues de cet oued, qui s’étend sur 23.500 km2 dont 7.525 en Algérie, se sont multipliées ces dernières années et charrient, en moyenne annuelle, sur une longueur de 500 kms dont 350 en Tunisie, plus d’un milliard de mètres cubes d’eau et autant d’alluvions, inondent villes et villages et endommagent exploitations agricoles, équipements collectifs et unités industrielles. Un véritable désastre annoncé pour chaque année.
Ces crues sont devenues une sorte de malédiction au point que les agriculteurs des villes riveraines de l’oued et réputées pour être les plus exposées à l’ire de ce cours d’eau aux allures de fleuve, n’osent plus espérer, un jour, récolter régulièrement, comme le faisaient leurs ancêtres, les fruits de leurs investissements et labeur.
Elles sont devenues une lourde charge pour l’Etat en raison des fonds alloués pour compenser les sinistrés et un facteur d’appauvrissement pour les exploitants agricoles en ce sens où chaque fois que ces crues surviennent, elles viennent dépouiller leurs biens, gommer leurs acquis et les ramener, chaque fois comme une fatalité, à un stade de précarité digne de l’âge de pierre.
Les dégâts occasionnés cette année (2011) par ces crues aux habitants de Jendouba, Bousalem, Medjez El Bab, Jedeida, Tébourba et El-Battan sont énormes. Elles sont estimées, officiellement, à plus de 50 millions de dinars.
Face à ce phénomène naturel, l’Etat n’a pas baissé les bras et fait de son mieux, mais pas avec la célérité requise. Alertés, la première fois par les célèbres inondations de 1969, les pouvoirs publics ont réalisé le plus grand barrage du pays (555 millions de m3), celui de Sidi Salem sur oued Zarga (gouvernorat de Béja) et aménagé, durant les années 80, avec le concours des chinois, le fameux canal Medjerda (120 Km) pour acheminer les eaux du nord vers le Cap Bon et le Sahel à des fins d’alimentation en eau potable et d’irrigation.
Depuis la mise en œuvre de ces ouvrages, les crues ont connu un répit avant de reprendre de plus belle à compter de 2003.
Conscients de l’impératif de faire quelque chose, les pouvoirs publics ont mis au point, en 2009, avec le concours cette fois-ci des Japonais, un plan directeur pour la maîtrise des cours d’eau de l’Oued Medjerda.
Ce plan est resté lettres mortes et rien n’a été fait pour protéger les villes exposées contre les inondations, c’est ce qui explique l’ampleur des dégâts occasionnés, cette année, aux villes de Medjez El Bab et Bousalem, particulièrement. D’où tout l’impératif de le dépoussiérer.
Ce plan est pourtant un bon plan. Il prévoit la réalisation, sur une période 22 ans (2008-2030), la réalisation pour un investissement global de 580 MDT de plusieurs projets visant à protéger les villes, villages et zones agricoles riverains de l’oued Medjerda.
Concrètement, il s’agit de réaménager ce cours d’eau depuis le barrage de Laaroussia jusqu’à l’Oued Mellègue. L’objectif est de prévenir les risques d’inondation dans la zone du bassin versant et de limiter les éventuels dégâts dans les plaines avoisinantes.
Les interventions envisagées portent, notamment, sur l’entretien du canal de la Medjerda et la construction d’un bassin et de canaux connexes, à Boussalem et Mejez El Bab. Il s’agit, également, de consolider les bassins régulateurs et de renforcer le système de prévention des inondations et d’alerte.
C’est pour dire au final que ce ne sont pas les solutions qui manquent et que seule la volonté de passer à l’acte fait défaut. Dont acte.