à Athènes lors de la grève générale organisée le 1er décembre 2011 (Photo : Louisa Gouliamaki) |
[01/12/2011 15:53:43] ATHENES (AFP) Thanassis Boumis, 55 ans, ne décolère pas: “Les mesures d’austérité en Grèce frappent les salariés et les retraités, alors que l’évasion fiscale continue dans le pays”, dit-il, résumant un sentiment d’injustice partagé par les employés du secteur public.
Dans la manifestation, qui a réuni jeudi quelques milliers de personnes à Athènes et Salonique contre l’austérité, beaucoup ont dénoncé, comme lui, ce qui constitue un mal endémique dans ce pays surendetté, qui a bien du mal à lutter contre ses déficits publics et à faire rentrer les impôts.
M. Boumis, architecte, travaille dans un ministère et subit de plein fouet, comme la plupart des Grecs, les mesures d’austérité qui accompagnent le sauvetage financier du pays par l’Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) depuis mai 2010. Son revenu a été quasiment divisé par deux en un an, à 1.000 euros par mois au lieu de 2.000, explique-t-il à l’AFP.
“Et le budget ne prévoit pas de rentrées issues de l’évasion fiscale”, se lamente-t-il.
La fraude fiscale reste un sport national en Grèce, insuffisamment combattue par les autorités, alors que le budget 2012, qui sera voté mardi prochain au parlement, prévoit des hausses ou la création de nouvelles taxes, qui, elles, ne peuvent être évitées, prélevées directement sur les salaires ou via les factures d’électricité.
ée à Athènes le 1er décembre 2011. (Photo : Louisa Gouliamaki) |
Dans la manifestation, la banderole de tête des deux principaux syndicats du pays, GSEE et Adedy, qui représentent à eux deux l’essentiel des salariés du privé et des fonctionnaires, résume cette préoccupation : “Non, encore une fois non, il faut que les coupables de la fraude fiscale payent”.
Même s’ils sont eux aussi tentés de frauder, oubliant par exemple de déclarer les revenus de leur deuxième emploi –cours particuliers pour les enseignants, chauffeur de taxi pour d’autres– ou des loyers d’appartements qu’ils possèdent, les salariés et les fonctionnaires sont proportionnellement moins sujets à l’évasion fiscale que les professions indépendantes, leurs revenus étant imposés à la source.
Au total, selon un rapport publié le 17 novembre par la Task Force européenne chargée d’aider Athènes à mettre en oeuvre ses réformes structurelles, la Grèce souffre d’un manque à gagner d’un stock de 60 milliards d’euros d’impôts impayés. Un chiffre record si on le compare aux 350 milliards de dette.
Parallèlement, Athènes cherche à obtenir des accords avec la Suisse sur le modèle de ce qu’ont négocié récemment l’Allemagne et la Grande-Bretagne pour régulariser les avoirs issus de l’évasion fiscale déposés dans la Confédération.
Pour Costas Tsikrikas, président du syndicat Adedy, “les hauts revenus et ceux qui ont de grandes fortunes échappent à l’imposition”. “Nous demandons au gouvernement de résoudre le problème de l’évasion fiscale car c’est le seul moyen d’augmenter les recettes de l’Etat. Les coupes des dépenses publiques conduisent à la pauvreté et la misère”.
Alexis Tsipras, le chef du parti de la gauche radicale Syriza, se fait plus précis: “alors que la société explose, le gouvernement coupe les salaires, les retraites et réduit les primes de chômage et, en même temps, il fait des cadeaux aux armateurs (…) et favorise la corruption et les grands intérêts, c’est là l’injustice sociale”.