OPINION Tunisie : Au secours, notre communauté d’affaires fabrique la nouvelle dictature!

affaires-1.jpgLa campagne de séduction d’Ennahdha en direction de la classe entrepreneuriale avait commencé bien avant les élections. La classe d’affaires, aux abois, et cherchant un protecteur, avait déjà entrepris l’identification desquels parmi les partis politiques candidats seraient les mieux aptes à sauvegarder ses intérêts. Plus que l’art d’acquérir la richesse, certains entrepreneurs tunisiens ont acquis l’art de sauvegarder leurs richesses, et en la matière, la devise «le Roi est mort, vive le Roi» n’est vraiment pas pour les sourds…

Ennahdha, pour sa part, n’a pas épargné d’efforts pour réunir nombre d’opérateurs économiques -qui se reconnaîtront-, et leur adresser des discours aussi apaisants que rassurants, allant même et loin des lumières des caméras rendre des visites personnalisées aux grands décideurs économiques, lesquels ne demandaient que cela. «Protégez notre business et vous aurez des alliés incontestables», tant il est vrai que l’argent n’a ni morale, ni odeur et ni principes…

Une autre devise est tout autant valable, «le système de l’argent périra par l’argent»… Ce que semblent oublier nos chers producteurs d’argent…

Nous avons ainsi vu nombre de ténors de l’entrepreneuriat tunisien parrainer le parti Ennahdha. Un parti qui a eu la finesse et l’intelligence de promettre une réconciliation nationale et dans sa grandeur d’âme un pardon inconditionnel à ceux qui le méritent et surtout à ceux qui ne le méritent pas.

Parmi nos vaillants hommes d’affaires qui n’hésitaient pas, il y a à peine quelques mois, à s’écraser devant le pouvoir de Ben Ali et les plus éloignés de ses proches, on en voit qui recommencent les mêmes pas de danse de la lèche au rythme de la darbouka et du tambour.

La décence n’est plus à l’ordre du jour! Ils n’ont même pas appris la leçon d’un passé très proche. Ils avaient fabriqué un dictateur appelé Ben Ali par lâcheté, peur, passivité et par soumission, et ont été les premiers à en payer le prix. Aujourd’hui ils en fabriquent une autre dictature plus dangereuse cette fois-ci car avec des soubassements théologiques…

Quant aux médias, c’est une autre histoire! Les pervertis du temps de Ben Ali continuent leur sale boulot et n’arrivent pas à se libérer d’une tendance presqu’obsessionnelle des «louanges» au plus fort… et vente au plus offrant… Ce sont les tonneaux vides qui font le plus de bruit, dit l’adage…

La communauté d’affaires ainsi que certains représentants de médias opportunistes et soucieux uniquement de leurs propres intérêts sont prêts à sacrifier la Tunisie et les générations futures pour conserver leur statut et leur positionnement. L’argent est une des données essentielles de l’univers politique, nul mieux que nos leaders affairistes ne l’ont le mieux saisi et n’en ont usé aussi puissamment.

Ils ont toutefois, aussi bien que nombre de médias, oublié dans leur arrogance que le peuple est plus fort et plus grand que tous les pouvoirs, et que lorsqu’il se sent lésé ou trahi, il n’hésitera plus à se soulever de nouveau. En Tunisie, le mur de la peur est tombé et la seule vérité qui prime aujourd’hui est celle d’une plus grande équité sociale et d’une démocratie économique. «Je ne m’inquiète plus pour ma Tunisie, nous avons offert 300 martyrs à notre patrie, nous sommes prêts de nouveau à descendre dans la rue pour défendre nos principes d’égalité et de liberté et lutter contre toutes les politiques de discrimination ou de corruption qui appauvrissent le peuple. La mort ne nous effraie plus. Mieux, ils le seront en haut lieu, mieux ça sera. Nous avons libéré les hommes d’affaires du joug de la famille mafieuse et ils nous l’ont rendu en s’alliant de nouveau avec le nouveau pouvoir pour préserver leurs intérêts aux dépens des nôtres», assure Maya Y., étudiante.

En fait, et à voir la situation de la Tunisie aujourd’hui, on peut dire que les vainqueurs n’ont peut-être pas manqué d’argent mais ils manquent assurément d’idées pour être incapables à ce jour de venir à bout d’un seul obstacle permettant un exercice serein du pouvoir.