ée dans une machine à laver (Photo : MYCHELE DANIAU) |
[08/12/2011 14:04:29] PARIS (AFP) Les quatre principaux fabricants de lessives se sont secrètement mis d’accord pendant six ans sur leurs prix et leurs promotions en France, un cartel sanctionné par l’Autorité de la concurrence qui a infligé à trois d’entre eux une amende totalisant 361 millions d’euros.
Le géant anglo-néerlandais Unilever, qui a dénoncé le cartel, a bénéficié de la procédure de clémence et a été totalement exempté de sanctions, échappant à une amende théorique de 248,5 millions d’euros.
Les groupes américains Procter & Gamble et Colgate-Palmolive, ainsi que l’allemand Henkel ont été sanctionnés, bénéficiant toutefois d’une réduction du montant en fonction de la qualité de leur coopération et de l’ordre dans lequel ils ont présenté leur demande de clémence.
Au final, l’amende s’est élevée 233,6 millions d’euros pour Procter & Gamble, à 92,3 millions d’euros pour Henkel et à 35,4 millions d’euros pour Colgate-Palmolive.
Le cartel entre ces quatre multinationales en situation d’oligopole (acteurs peu nombreux qui contrôlent un marché), a duré de 1997 à 2004, avec une interruption de quelques mois entre octobre 1998 et novembre 1999.
Les directeurs commerciaux de leurs filiales françaises se rencontraient secrètement trois à quatre fois par an dans des hôtels ou restaurants de la région parisienne pour fixer les écarts de prix, les directeurs généraux et PDG pouvant être amenés à intervenir.
Ariel devait ainsi être 3% plus cher que Skip et Le Chat, ou encore Dash 10% plus cher que Omo, Super Croix et Axion. Les marques Gama, Persil et X-Tra étaient aussi concernées par ces ententes qui portaient sur les lessives liquides, en tablettes ou en poudre.
L’Autorité de la concurrence n’est pas en mesure de chiffrer le préjudice pour les consommateurs et les distributeurs, dans un marché des lessives dont les ventes ont représenté plus d’un milliard d’euros chaque année concernée.
Montant très élevé des sanctions
“On touche à un produit de grande consommation courante et incontournable pour les consommateurs, qui ont été fortement lésés”, a déclaré à l’AFP Nicolas Godfroy, directeur juridique de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir.
“On espère que le montant des sanctions, très élevé, sera dissuasif. En même temps, tant qu’il n’y aura pas de véritable répération du préjudice des victimes, c’est-à-dire des consommateurs”, les acteurs économiques peuvent “avoir parfois intérêt à prendre le risque”, a-t-il fait valoir, regrettant l’absence d’action de groupe en France.
Les fabricants disposent d’un mois pour faire appel auprès de la Cour d’appel de Paris.
La Commission européenne avait elle-même prononcé en avril une sanction de 315,2 millions d’euros à l’encontre de Henkel, Procter & Gamble et Unilever pour s’être coordonnés sur certains élements de détermination du prix des lessives en poudre dans 8 pays européens, un dossier initié par une demande de clémence de Henkel.
Les dossiers français et européen sont différents, estime l’Autorité, soulignant que la Commission européenne a fait la même analyse.
Henkel a annoncé de son côté sa décision de faire appel de l’amende française, estimant que la décision européenne vaut exemption d’amendes nationales.
Le cartel français des lessives a donné lieu à la troisième plus forte sanction infligée par l’Autorité de la concurrence ou son prédécesseur, le Conseil de la concurrence, derrière les ententes sur la téléphonie mobile (534 millions d’euros en 2005), et sur les commissions interbancaires sur les chèques (384,9 millions d’euros en 2010).
Une sanction plus élevée avait été décidée contre le cartel de l’acier, 575,4 millions d’euros en 2008, mais la Cour d’appel de Paris l’avait réduite à 74 millions d’euros.