C’est le monde à l’envers?! Non, pas du tout. C’est bien Hamma Hammami, gardien de l’orthodoxie marxiste en Tunisie, adversaire résolu de la propriété privée et leader incontesté du Parti Ouvrier Communiste Tunisien (POCT), qui est l’invité de marque de l’Institut arabe des chefs d’Entreprise (IACE), tout au long de cette 26ème Session des Journées de l’Entreprise, organisée à Port El Kantaoui- Sousse.
Mais que fait l’éternel pourfendeur de la bourgeoisie et du capital national et international au milieu de la classe possédante? Aux côtés des exploiteurs? A la gauche de Tarek Chérif, parrain d’une organisation patronale rivale? S’est-il rétracté? Cherche-t-il à plaire? A faire amende honorable ? A obtenir des subsides pour son parti? Rien de tout cela, affirme Hamma Hammami, qui était tout de même la star de la matinée. Des panels. De cette session. Au point de susciter, nous dit-on, la jalousie de certains patrons, habitués aux caméras, aux regards admiratifs, aux sollicitations des journalistes et de l’assistance et aux yeux de Chimène des uns et des autres.
Eh oui… la Tunisie a bel et bien changé. La révolution de la liberté et de la dignité fait des miracles, me dit un confrère éberlué. Les chantres de la finance tunisienne font la part belle à l’un des symboles du communisme le plus radical dans le pays.
Cela dit, Hamma Hammami garde la tête froide. Ne perd pas les pédales. Répond à toutes les sollicitations. Distribue les sourires. Evite la dispersion. Et profite de son audience pour lancer quelques fléchettes à la troïka (Ennahdha, Ettakatol, CPR), mettre en garde contre l’opportunisme ambiant. Et rebondir sur le rôle des entrepreneurs tunisiens dans la relance de l’emploi, le tassement du chômage et l’émergence des champions industriels citoyens.
«Beaucoup d’hommes d’affaires ont subi, pendant deux décennies, le joug de l’ancien système, la corruption de ses réseaux, le clientélisme de ses ramifications et la mainmise de ses sbires», nous dit le chef du Parti Ouvrier Communiste Tunisien, qui considère sa présence parmi les convives de l’IACE comme le signe d’une réconciliation entre toutes les composantes du peuple tunisien. En dépit de la persistance des différences au niveau de la perception de plusieurs problèmes politiques et sociaux du pays.
In fine, notre interlocuteur a tenu à préciser que 16% seulement des hommes d’affaires tunisiens s’étaient impliqués avec l’ancienne dictature. La révolution du Jasmin, ajoute Hamma Hammami, était l’expression d’un ras-le-bol généralisé. Ce qui a précipité, dit-il, sa chute.