La France sous la menace d’une dégradation de sa note d’un jour à l’autre

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ésident français Nicolas Sarkozy face au président de la Commisssion européenne Jose Manuel Barroso le 9 décembre 2011 à Bruxelles (Photo : Eric Feferberg)

[10/12/2011 08:51:54] PARIS (AFP) Au lendemain du sommet européen de Bruxelles, la France vit sous la menace d’une dégradation d’un instant à l’autre de la note de sa dette par Standard and Poor’s, qui s’est promis de prendre sa décision le plus tôt possible après ce énième effort de sauvetage de la zone euro.

L’agence, qui a placé lundi cette note sous “surveillance négative” avec celles de 14 autres des 17 pays de la zone euro, dit vouloir “conclure sa surveillance aussitôt que possible après le sommet européen du 9 décembre”.

Si l’Allemagne notamment est exposée au même risque, la France se distingue de ses partenaires : elle est le seul des six pays bénéficiant de la meilleure note, “AAA”, pour lequel S&P envisage un abaissement de deux crans. Le triple A des agences de notation permet d’emprunter à des taux avantageux.

“Je n’ai aucun doute que la note de la France sera baissée. Que ça se passe demain ou dans un mois, pour moi cela ne fait pas grosse différence”, déclare à l’AFP Charles Wyplosz, professeur à l’Institut de hautes études internationales de Genève. “Si j’étais Standard and Poor’s, je tirerais mes conclusions tout de suite”, lance-t-il.

“Les nouvelles qui viennent de ce sommet ne sont pas des nouvelles qui conduisent à accélérer une procédure de dégradation”, tempère Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS.

Celui-ci souligne par ailleurs qu’une procédure normale exige d’une agence qu’elle prenne le temps d’étudier soigneusement l’évolution d’un pays, une fois celui-ci mis sous surveillance. La période habituelle est de trois mois.

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ée nationale à Paris (Photo : Martin Bureau)

Interrogée vendredi sur cette épée de Damoclès, la ministre du Budget et porte-parole du gouvernement Valérie Pécresse a émis l’espoir que l’accord de Bruxelles serait bien accueilli “par tous les observateurs de la zone euro”.

Les Européens se sont mis d’accord vendredi pour renforcer nettement la discipline budgétaire de la zone euro face à la crise de la dette, mais ont échoué à le faire unanimement, le Royaume Uni refusant de suivre.

Selon M. Wyplosz, si les conclusions du sommet sont le “premier vrai pas dans la bonne direction, il y a encore trop d’incertitudes pour pouvoir tirer des conclusions” et des semaines de négociations sont encore à prévoir.

Dans les faits, “la France a perdu son triple A depuis longtemps”, estime-t-il en dressant un tableau sombre de la situation.

“Il y aura des restructurations de dette, elles ne seront pas volontaires. Des banques vont s’effondrer, y compris peut-être un certain nombre de banques françaises, lesquelles sont très exposées à la Grèce, au Portugal, à l’Italie, à l’Espagne”, affirme-t-il.

“Le gouvernement va devoir les remettre à flot, et c’est pour ça que Standard and Poor’s, à mon avis, veut baisser le triple A”, insiste-t-il.

Une dégradation soulèverait à nouveau la question de mesures supplémentaires d’austérité après les deux plans de rigueur annoncés par le gouvernement depuis l’été, alors que les perspectives de croissance se dégradent. Le gouvernement prévoit toujours 1% de croissance en 2012 tandis que l’OCDE a fortement abaissé sa prévision à 0,3%.

“On a même pas assez de croissance pour payer les intérêts de la dette publique”, déplore Marc Touati (Assya Compagnie Financière). “Ca ne sert à rien de mourir guéri”, ironise-t-il, déplorant que le sommet n’ait pas décidé de réelles mesures de soutien à la croissance européenne.

“Tout ça, c’est enterré. Quand les Allemands seront en récession, ils en voudront”, lance-t-il.

M. Wyplosz est sur la même ligne, prônant “un pas de deux” qui consiste à “se lier les mains à long terme” pour assainir ses finances publiques et “se donner de l’air à court terme pour éviter d’entrer en récession”.

“On paye des décennies d’irresponsabilité et l’incapacité à s’occuper de nos banques de manière correcte : tout finit par se payer”, dit-il.