C’est à la faveur des rencontres sportives entre la Tunisie et le Maroc que Slim Chaker, ministre de la Jeunesse et des Sports, s’est rendu récemment au Maroc. Il a eu le temps de se rendre compte des avancées d’un pays qui connaît autant de transformations que le reste des pays de la région. L’œil de l’expert qui a beaucoup travaillé, au Cepex notamment, sur l’export du «made in Tunisia», a constaté les changements au niveau de l’artisanat, de l’offre touristique, de la manière de faire et de concevoir les événements. Il estime que le Maroc a pris dix ans d’avance sur la Tunisie.
La récente ouverture du «Morroco Mall» ne contredira pas la diversification sur laquelle mise le royaume chérifien. Dans le domaine des sports, «les Marocains sont en train de se voir confier l’organisation de beaucoup de compétitions sportives pour les trois prochaines années. Ceci leur permet de construire leur image pays/image globale en plus des différentes images destinations qu’ils sont en train de mettre en place. Ils consolident ainsi différentes images produits comme le shopping, la culture, l’événementiel, les sports …», résume le ministre tunisien de la Jeunesse et des Sports.
Le soleil brille-t-il toujours plus ailleurs? Certainement pas, mais lorsque l’on érige un secteur comme le tourisme en priorité nationale, cela porte ses fruits. Même si toutes les destinations marocaines ne sont pas Marrakech, il n’en reste pas moins vrai que le pays donne l’image d’un pays qui gagne. Le Maroc s’est érigé en une destination touristique à la mode. Il a inscrit ses événements dans les calendriers internationaux, reçoit la Jet set internationale et exporte son art de vivre aux quatre coins du monde.
Les plus sceptiques estiment que le pays avance mais commence à envoyer des signes d’essoufflement. «Les investissements réalisés jusque-là n’ont concerné que le cadre immédiat des stations touristiques. La réhabilitation des voiries du transport, les espaces verts, l’écologie sont quasi absents. Idem pour les populations et les riverains qui restent souvent réduits au rôle de témoins d’un changement qui ne leur profite pas».
Marrakech est-elle l’arbre qui cache la forêt? Issam B. est agent de voyage et opère au Maroc. Il reconnaît qu’Agadir souffre des mêmes maux que la Tunisie: «Le Maroc cherche à se créer une destination balnéaire sans y arriver et ne parvient pas à se développer sur le segment du tourisme de masse. Celui-ci, bien que largement décrié par la Tunisie, reste un tourisme très intéressant car c’est là où la demande mondiale est la plus élevée». Autrement dit, le tourisme marocain jouit d’une image plus haut de gamme et vise à se recentrer sur un tourisme plus accessible. La Tunisie, elle, souhaite de sortir de cette image «cheap» pour monter en gamme et rentabiliser un segment où elle perd des points. La concurrence est, pour le moins qu’on puisse dire, de plus en plus rude.
Pour en revenir au tourisme, les diverses destinations marocaines ont misé sur le tourisme golfique jusqu’à totaliser plus de 30 golfs. Le tourisme de santé et de bien-être s’y développe avec des centres de thalassothérapie des centres de Spa labélisés aux plus grandes marques. Le Maroc se positionne aussi dans le segment médical. Un secteur resté longtemps l’apanage des Tunisiens.
Mariage tourisme et sport
Qu’en est-il au terme des événements sportifs ? Au terme d’un récent séjour accompagnant l’équipe sportive tunisienne, Slim Chaker, ministre de la Jeunesse et des Sports, a pris le temps de découvrir Casablanca et d’en mesurer les changements. Une ville qui bouge et où près de 4 millions d’habitants fourmillent sans cesse. En peu de mots, il dit l’essentiel: «Le Maroc prendra le relais du Japon pour organiser en 2013 et 2014 la Coupe du Monde de Football des Clubs. Il s’est également vu confier par la CAF l’organisation de la CAN 2015. Cela mettra le Maroc sous les projecteurs mondiaux de la galaxie foot pendant trois années consécutives. Et donc, trois années consécutives durant, des millions de sportifs et de journalistes à travers le monde parleront du Maroc et des compétions sportives qui s’y déroulent. A la solde, ce sont des milliers de touristes additionnels qui viendraient encourager leurs équipes, loger dans les hôtels, acheter l’artisanat marocain, faire du shopping au Morocco Mall, voyager sur la RAM… C’est ce mariage du couple Sport-Tourisme qu’on devrait développer. Cela permettrait de sortir des sentiers battus été/soleil et plage/mer pour aller vers des concepts plus élaborés et à très grande valeur ajoutée. Cela permettrait également de casser le handicap de la saisonnalité du secteur et participerait à la construction d’une image pays globale».
Durant cette année d’exercice au sein du gouvernement de transition entre le Tourisme et le Sport, Slim Chaker est à même de convertir la complémentarité et la synergie entre les deux secteurs. Aujourd’hui, il n’a qu’un seul souhait: «La Tunisie a des atouts à faire valoir: une démocratie naissante, une liberté retrouvée, une exposition médiatique jamais égalée et une capacité d’innovation, d’invention et d’humour qui viennent s’ajouter aux qualités ancestrales de ses hommes et femmes faites d’hospitalité, de tolérance et d’ouverture».
Il enchaîne avec son air paisible et affichant son sourire timide: «Je rêve d’une image Tunisie qui aurait pour slogan: Tunisie, Capitale du printemps arabe. L’image et la communication autour de cette image sont le nerf de la guerre, nous avouera-t-il « Le Maroc est en train de développer des images de destinations spécifiques: Casa, Marrakech, Agadir… avec des produits Shopping, Culture, Evénementiel, Sport…».
L’ouverture du Morocco Mall, qui cartonne déjà, est l’exemple de cette stratégie qui se déploie. Le centre commercial sera un bel outil pour faire de Casablanca une destination touristique, en plus de son statut de ville économique et de «business». Avec des enseignes de renom, comme les Galeries Lafayette qui sont implantées pour la première fois en Afrique, un cinéma 3D qui est une grande première dans le monde arabe et la fontaine musicale qui ressemble à celle que l’on trouve à Dubaï ou à Las Vegas, le centre commercial a engendré 5.000 emplois directs et en a créé 20.000 indirects.
Après quatre ans de travaux, le Morocco Mall a ouvert 3 étages totalisant 70.000 m² de surface commerciale. Pour les chiffres, retenez qu’il s’y propose 350 points de vente et plus de 600 marques de mode, d’équipement de la maison, de la restauration et de loisirs… Pour le prestige, sachez que des magasins de luxe comme Louis Vouitton, Fendi, Gucci, etc. y ont élu domicile. Autant d’arguments pour attirer une clientèle férue de shopping notamment dans les marchés émergeants.
Alors qu’il s’ouvre bientôt le Festival International du film de Marrakech, le Tourisme marocain subit toutefois de plein fouet les turbulences liées aux révolutions dans la région. Le recul du tourisme pour cette année est aussi conséquent qu’ailleurs. Reste que la destination travaille à de jours meilleurs et s’outille pour cela. L’Office national marocain du tourisme a organisé le mois dernier la première édition des journées professionnelles du tourisme d’affaires. Un rendez-vous qui a permis de mettre en lumière l’offre MICE sur des destinations à fort potentiel comme Agadir, Casablanca, Fès, Marrakech, Ouarzazate…