à Shanghaï, en septembre 2011 (Photo : Mark Ralston) |
[20/12/2011 09:12:27] PARIS (AFP) Il est accro aux logos et très dépensier lorsqu’il voyage: le client chinois nouvellement fortuné est le chouchou des groupes du luxe, qui s’implantent largement dans son pays et lui déroulent le tapis rouge lorsqu’il vient en Europe.
“La Chine représente actuellement 17% du marché mondial du luxe et 23 milliards d’euros de chiffre d’affaires”, dont 60% réalisés hors de Chine, indique Bernard Malek, du cabinet Roland Berger.
La croissance est phénoménale: selon les prévisions, l’Empire du milieu sera le premier marché du luxe en 2015, générant 57 milliards d’euros et représentant 34% de parts de marché.
Aussi les fabricants mènent-ils en parallèle deux stratégies: l’une, d’ancrage en Chine, l’autre visant à exploiter la manne des 50 millions de touristes chinois qui sillonnent la planète et rentrent chez eux les bras chargés de cadeaux.
A Paris, les touristes chinois débarqués par autocars entiers font la fortune de grands magasins comme les Galeries Lafayette, qui, comme la plupart des grandes enseignes du luxe, ont mis en place un accueil spécialisé avec des vendeurs parlant le mandarin.
“Pour les Chinois, le service est tellement clé qu’il faudrait peut-être réfléchir à ouvrir en Chine les services après vente avant les boutiques…”, ironise Alain Blanc, du cabinet ConnexConsulting.
Des projets ciblés “Chinois” voient le jour. Les Suisses Richemont et Bucherer préparent ainsi l’ouverture à Paris d’un mégastore de montres de luxe. Car les Chinois sont les plus gros “shoppeurs luxe” de la planète, dépensant en moyenne 1.400 euros par jour et par enseigne, selon Global Blue, champion de la détaxe.
Les boutiques Cartier, Yves Saint Laurent, Chanel, Hermès et autres Gucci ont commencé à fleurir dans les années 90 en Chine. Mais rares sont ceux qui mesuraient alors l’enjeu.
Approche délicate
“Quand j’étais chez Hermès et qu’on a ouvert en Chine en 1997/1998, on n’avait pas du tout compris le potentiel, la Chine ne représentait rien sur nos radars”, confiait récemment Christian Blanckaert, ex-patron de Hermès Sellier et actuel PDG de Petit Bateau.
Aujourd’hui, la clientèle chinoise assure 30% du chiffre d’affaires de Gucci.
En Chine, le groupe de luxe le plus largement implanté est Dunhill, avec 95 magasins. Mais Burberry en a une cinquantaine, Gucci et Vuitton chacun une quarantaine…
Capter la clientèle chinoise est “un pari difficile”, mais “dès que les Chinois connaissent la marque, les ventes explosent”, selon le cabinet Roland Berger.
“Pour le Chinois, un produit se définit d’abord par la marque, le logo l’emporte”, estime Emmanuelle Sidem, chez ConnexConsulting. D’où l’intérêt de politiques agressives de pénétration du marché chinois comme ont pu en mener Prada ou l’américain Coach.
Mais attention: “il faut approcher le Chinois par sa culture, avec respect, et dans son pays car c’est là que se forme l’image”, explique à l’AFP Patrick Albaladejo, directeur général adjoint de Hermès.
Avant d’ouvrir son premier magasin en Chine, le sellier a organisé à Pékin une exposition autour du thème du cheval chinois dans les collections des musées chinois. Aujourd’hui, Hermès compte une quarantaine de magasins en “Grande Chine” et inaugurera en 2013, à Shanghaï, une “Maison Hermès” comme il en existe à Paris, New York, Tokyo et Séoul.
Hermès a aussi lancé en 2010 à Shanghaï la marque Shang Xia, qui doit essaimer à Paris et Pékin en 2012.
Presque tous les clients chinois du luxe sont “jeunes et riches”, les deux tiers environ ont moins de 40 ans, ils sont chefs d’entreprises, cols blancs ou descendants d’officiel… et ce sont les hommes qui dépensent le plus, selon le cabinet Roland Berger.
“Beaucoup se serrent la ceinture pour consommer du luxe, parce que cela a valeur de marqueur de réussite”, note Christian Blanckaert. Un cinquième de leurs achats sont des cadeaux qui seront offerts.