ès à Paris, en septembre 2011 (Photo : Eric Piermont) |
[20/12/2011 17:26:31] PARIS (AFP) Le numéro un mondial du luxe LVMH a encore accru sa part dans Hermès, une annonce en forme de pied-de-nez à la famille Hermès qui vient de lancer une holding pour contrer les appétits du patron de LVMH, le milliardaire Bernard Arnault.
Entré par surprise en octobre 2010 dans le sellier, en prenant 17% du capital, puis passé à 21,4% malgré les hauts cris de la famille Hermès, LVMH détient désormais 22,28% du capital et 16% des droits de vote, selon une déclaration de franchissement de seuil publiée mardi par l’Autorité des marchés financiers (AMF).
“C’est assez symbolique, Bernard Arnault maintient la pression, c’est tout un travail d’intimidation”, commente auprès de l’AFP Xavier de Villepion, de Global Equities.
Pour Serge Carreira, professeur à Sciences Po et spécialiste du luxe, “on peut voir l’annonce d’aujourd’hui sous deux angles. Soit comme la poursuite d’un investissement de bon père de famille, dans une maison rentable et à développement fort. Soit comme une démonstration de détermination face à Hermès. Il y a sûrement un peu des deux…”
Il y a moins d’une semaine en effet, les actionnaires familiaux de Hermès, qui détiennent plus de 72% du capital, avaient annoncé le lancement d’une holding baptisée H51, arme anti-LVMH dans laquelle ils ont immobilisé 50,2% de Hermès pour 20 ans, avec un droit de préemption sur 12,3% supplémentaires. Seul le principal actionnaire familial n’y participe pas, Nicolas Puech, qui détient 6%.
Dans la foulée, Patrick Thomas, le gérant de Hermès, assurait que “s’il y a eu une guerre (avec LVMH), elle est finie”. Pour autant, ajoutait-il dans cette interview au Figaro, “nous avons toujours la même demande” envers LVMH… à savoir qu’il quitte le capital de Hermès.
Niet, répond aujourd’hui LVMH. Le groupe détient désormais, via des sociétés qu’il contrôle, plus de 23 millions d’actions Hermès sur un total de quelque 105 millions. Quant au franchissement du seuil de 15% de droits de vote, il “résulte d’une réduction du nombre total de droits de vote de la société Hermès International”, selon l’AMF.
Et LVMH n’entend pas s’arrêter là. Dans sa déclaration au gendarme de la Bourse, il reconnaît “envisager de poursuivre, le cas échéant, ses achats d’actions Hermès International, en fonction des circonstances et de la situation du marché”. Et d’évoquer un investissement “stratégique et de long terme”, mais sans intention de “prendre le contrôle de Hermès International ou de déposer une offre publique d’achat”, ni de demander un poste au conseil de surveillance…
Dans les faits, si LVMH réclamait un tel poste, il se verrait sans nul doute opposer une fin de non-recevoir.
Aujourd’hui, la famille Hermès fait bloc et s’estime à l’abri de toute prise de contrôle hostile grâce à sa holding.
“A moyen terme, c’est assez blindé. Mais ce qui est fait peut se défaire. Après l’entrée tonitruante d’Arnault, il y a eu un réflexe de solidarité des actionnaires familiaux de Hermès. Mais on verra dans les années à venir”, estime Serge Carreira.
“Bernard Arnault est quelqu’un de patient, qui sait guetter dans l’ombre. Et il a les moyens d’attendre”, renchérit Xavier de Villepion.
Le flottant (actions en circulation en Bourse) se situe désormais autour de 5%, la famille détenant plus de 72% des actions de Hermès.
LVMH a indiqué à l’AMF détenir un contrat d’échange de flux financiers sur actions “equity swaps”, qui porte sur l’équivalent de 205.997 actions Hermès, à échéance de moyen terme (début de la période de dénouement le 4 avril 2014).
C’est par le biais d’equity swaps, ces complexes instruments financiers, que le numéro un du luxe avait réussi l’an dernier son entrée par surprise dans Hermès, une méthode considérée comme indigne par la famille Hermès.