Le sommet européen de Bruxelles a créé les conditions pour une sortie de crise pour la zone euro. Le salut de la monnaie unique vaut une lueur d’espoir pour le retour de croissance dans notre pays!
L’Union européenne l’a échappé belle. Prise dans le tourbillon de la crise de la dette souveraine de ses pays membres et de l’emballement de leur déficit budgétaire, elle était en risque de dislocation. En effet, sa monnaie était la cible des marchés. Et selon le Président Sarkozy, la pérennité de l’UE pouvait être compromise par l’éventuelle disparition de l’euro, hypothèse extrême mais non moins plausible. Il y avait donc péril en la demeure.
Réunis à Bruxelles, les 26 –car moins le Royaume-Uni- ont opté pour un nouveau traité de convergence budgétaire, principalement, afin d’envoyer un signal fort aux marchés pour qu’ils desserrent la contrainte sur l’euro. D’ailleurs, à signaler que cet engagement de discipline budgétaire n’a pas convenu à l’Angleterre qui prend ses distances avec l’eurozone car elle veut que la City garde les mains libres sans restriction réglementaire.
Le nouveau départ de l’euro lie par conséquent le noyau des 17 pays de «l’euro zone» lesquels ont décidé d’une feuille de route. Elle sauverait l’euro, in extremis. Ce faisant, elle nous (la Tunisie) évite une crise de change qui n’aurait rien arrangé à une situation où la croissance molle de notre premier partenaire économique et commercial nous condamnait à un certain ralentissement?
Le contexte de crise, l’acharnement des marchés
La Grèce, sans le vouloir, aurait pu être le cheval de Troie qui aurait fait imploser l’UE. Embourbée dans une impasse financière qu’elle a bien su dissimuler, elle a fait planer un risque de propagation de crise qui a rendu l’euro la cible des spéculateurs. L’ennui est qu’elle fut suivie de l’Italie, puis l’Espagne, et voilà que la France est menacée de déclassement.
Les chiffres sont affolants. L’encours de la dette de la Grèce est de 357 milliards d’euros, il représente 160% de son PIB. La dette de l’Italie atteint un sommet vertigineux de 1.900 milliards! Et la France n’est pas bien loin avec 1.700 milliards au compteur. Ces pays avaient pour dénominateur commun des déficits budgétaires qui se creusaient régulièrement au mépris de la contrainte des 60%, imposée par le Traité de stabilité.
La Grèce, pour sa part, s’est contentée de s’en laver les mains et ce sont les pays européens qui ont pris son ardoise en charge. Les banques européennes ont accepté la restructuration de la dette grecque en effaçant la moitié des encours qu’ils détiennent.
Et pour échapper au diktat des marchés, les Etats se sont associés pour créer un Fonds Européen de Stabilisation Financière -FESF- en le dotant d’un capital de 440 milliards d’euros. Il devient le premier bailleur public du continent. Cette enceinte financière étatique a servi de bouclier et semble circonscrire le phénomène.
L’Italie, à titre d’exemple, en phase avec cette volonté unitaire, a dû improviser un gouvernement de guerre pour appliquer un plan d’austérité. Elle a accepté que ses finances soient sous contrôle. Il ne faut pas oublier que les agences de notation veillent au grain. Elles ont dégradé, bien évidemment la Grèce, l’Espagne a laissé deux crans de sa note, et la France est menacée de perdre son triple A; même l’Allemagne. Moody’s a mis la France sous surveillance négative, c’est-à-dire que le déclassement est acquis dès la première contreperformance économique. La France s’est mise à la diète mais, menacent les agences, cela ne suffit pas. Les agences pensent que la faiblesse de la croissance, conjuguée avec l’augmentation de la charge de la dette, rendront l’objectif de réduction du déficit public plus difficile et affaibliront la capacité politique des gouvernements à imposer plus d’austérité.
Une solution à la crise à Bruxelles: stabilité budgétaire et réforme de la gouvernance de la zone euro
Les cris d’alarme ont fusé. En effet, les pays européens étaient dans une situation où ils risquaient de perdre la maîtrise de leur destin, et l’Europe risquait d’être balayée. Là-dessus, les 17 pays de l’eurozone ont décidé d’aller vers un nouveau traité. Il stipule que les gouvernements s’engagent à résorber les déficits à horizon de 2016, à la suite de quoi ils inscriront la règle d’or de l’équilibre budgétaire comme règle constitutionnelle. La responsabilité de cette convergence budgétaire revient désormais aux chefs d’Etat et de gouvernement et non plus aux seuls ministres des Finances.
Des sanctions, à l’initiative de la Commission européenne, sont prévues en cas d’infraction. Elles émaneront de la Commission européenne. Certains observateurs voient dans cette résolution une victoire de la ligne allemande. La RFA, traumatisée par l’hyperinflation qu’elle a connue entre les Deux Guerres, appelle avec acharnement au sevrage du déficit. De la sorte, la monnaie unique est assurée de ne pas être gangrénée par l’inflation.
De plus, et afin de répondre aux besoins en «trésorerie» des pays membres, un FMI européen a vu le jour, avec la création du Mécanisme Européen de Solidarité (MES), lequel bénéficie d’une dotation en fonds propres de 80 milliards d’euros. Cela lui confère, selon les experts, un potentiel de prêts de 500 milliards. Le MES est un mécanisme pour venir en aide aux pays européens membres de l’eurozone qui n’auraient pas un accès suffisant aux marchés pour financer leurs dettes. Par ailleurs, l’eurozone va apporter un concours, en capital au FMI, de 200 milliards d’euros.
En résumé, les pays de l’eurozone se donnent une armature de financement qui fera qu’ils pourront souffler en empruntant auprès de bailleurs communautaires, qui ont des conditions plus clémentes que les marchés. Cependant, ils s’obligent à satisfaire aux exigences de la rationalité dans la gestion des finances publiques. Plus de solidité et moins de vulnérabilité, c’est sûr c’est l’équation qui pourrait sauver l’euro, faisant de sorte qu’il renoue avec ses repères de stabilité.
Cependant, l’arrangement budgétaire et fiscal ne résout qu’une partie du problème. D’autres résolutions ont suivi.
La feuille de route de l’eurozone: booster la compétitivité en priorité
Dans ce climat lourd, l’eurozone considère qu’il ne faut pas faire supporter aux entreprises le coût du sauvetage de l’euro. Ainsi, il a été décidé de parer au mouvement de resserrement du crédit, tendance naturelle chez les banquiers, par crainte du risque.
Dans cette perspective, la BCE va baisser son taux directeur à 1% et le maintenir à ce niveau pendant trois ans. Cette résolution est destinée à faire en sorte que les banques puissent retrouver de la marge et qu’elles ne rechignent pas à acheter des obligations d’Etat.
Mais les pays de l’eurozone se projettent en situation dynamique. Ils savent que la stabilisation de l’euro et l’arrêt de l’hémorragie budgétaire à eux seuls sont nécessaires mais pas suffisants. Tout le temps que la croissance sera molle, la sévérité budgétaire maîtrisera les dépenses mais n’augmentera pas les rentrées fiscales de manière significative. L’eurozone a bétonné ses fragilités. Elle veut, toutefois, se donner du punch. Les 17 ont évoqué sérieusement le redressement de leur compétitivité. Ils reconnaissent qu’il faudra se pencher sur des problèmes sensibles, telles que l’industrie et la recherche. Et ces deux aspects nous concernent directement.
De quoi sera fait demain?
La thérapie budgétaire nous a évité de l’incertitude. A un moment, certains pays ont évoqué le sabordage de la monnaie unique. Cela aurait agité les marchés et provoqué une crise de change. A coup sûr, cela n’aurait pas été du meilleur effet pour la tenue de la monnaie nationale tunisienne.
Le sommet de Bruxelles était, de ce point de vue, salutaire pour la stabilité du dinar. Ceci, pour ce qui concerne les questions budgétaires et financières. Mais la relance industrielle en eurozone s’accompagnera-t-elle d’un même espoir de relance de la croissance dans les pays du pourtour méditerranéen et, naturellement en Tunisie? Tout dépend de la volonté d’ouverture de l’eurozone. Si ses pays membres considèrent que le partenariat avec les pays du pourtour est une partie de la réponse à leur redémarrage, il faut espérer un reflux d’IDE et des perspectives expansionnistes pour nous. En revanche, s’ils estiment qu’ils peuvent commencer par la relocalisation, alors nous serons très exposés au plan de nos exportations et notre développement en pâtira.