Grande-Bretagne : le gouvernement fragilisé par les doutes de Moody’s

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à Londres le 14 décembre 2011 (Photo : BEN STANSALL)

[21/12/2011 12:06:07] LONDRES (AFP) L’avertissement de l’agence de notation Moody’s sur la pérennité du sacro-saint “triple A” britannique était considéré mercredi à Londres comme un sérieux coup de semonce pour le gouvernement, à la merci de la crise de la zone euro malgré ses tentatives pour s’en tenir à l’écart.

Embarras supplémentaire pour le Premier ministre conservateur David Cameron et son ministre des Finances George Osborne, cette mise en garde est intervenue dans la foulée d’une vive polémique avec la France, qui s’étonnait de se trouver dans le viseur des agences de notation alors que son voisin était épargné.

Dans rapport publié mardi soir, Moody’s a pris soin de rappeler que le Royaume-Uni disposait encore à ses yeux de sérieux atouts, rendant la menace d’un abaissement de la note maximale accordée à sa dette nettement moins pressante que celle pesant sur la France.

Mais les médias britanniques ont estimé que son opinion avait fragilisé le gouvernement. The Times (conservateur) évoquait en première page un “gros revers” pour M. Osborne qui, selon la BBC, a été “secoué par l’avertissement”.

Pour l’analyste Michael Hewson, du cabinet CMC Market, il s’agit d’une “rude mise en garde” qui pourrait annoncer de nouvelles mesures d’austérité.

Depuis son accession au pouvoir en mai 2010, le gouvernement a basé toute sa stratégie sur le redressement des comptes publics pour assurer la meilleure note possible à la dette du pays, et limiter ainsi le coût de son financement. Il y est parvenu jusqu’à présent avec succès, avec l’aide de la Banque d’Angleterre et au prix d’un plan de rigueur sans équivalent parmi les grands pays européens.

Pour le Financial Times, les doutes émis par Moody’s “vont faire des vagues car ils suggèrent que la Grande-Bretagne perdra son statut triple A comme les autres, à moins d’un redressement spectaculaire de l’économie”.

Sur ce point, le gouvernement et les experts partagent l’opinion de Moody’s: l’avenir à court et moyen terme du Royaume-Uni est suspendu à celui de la zone euro, avec laquelle il réalise plus de 40% de ses échanges.

“Le Royaume-Uni n’est pas immunisé aux problèmes de la zone euro, qui ont des effets glaçants sur notre économie”, a répété mardi soir un porte-parole du ministère des Finances, en réitérant l’appel de Londres aux dirigeants européens pour qu'”ils règlent leurs problèmes au plus vite”.

Mais M. Cameron, soumis à la pression des eurosceptiques de son camp, complique en même temps la tâche de ces partenaires en leur refusant toute concession, comme l’a montré son veto au dernier sommet de Bruxelles.

Les atouts du Royaume-Uni relevés par Moody’s (stabilité institutionnelle, compétitivité, détermination à lutter contre les déficits…) compensent jusqu’à un certain point des fondamentaux économiques peu reluisants, dont un déficit supérieur cette année à celui de la Grèce et une dette qui rattrape celle de la France.

Moody’s est surtout inquiète des perspectives de croissance, au moins aussi moroses que celles d’une zone euro menacée d’un retour dans la récession.

M. Osborne a néanmoins enregistré une bonne nouvelle mercredi avec la publication de chiffres officiels montrant une légère amélioration des finances publiques en novembre.

Les marchés semblent quant à eux avoir d’autres priorités: la livre sterling est restée ferme face à l’euro tandis que le taux des obligations d’Etat britanniques à 10 ans se maintenait quasiment au niveau de celui de l’Allemagne, un signe manifeste de confiance.