Tunisie : “Rien ne pourra marcher dans ce pays sans des institutions politiques valables”, déclare Moncef Marzouki

Clair, concis et incisif, c’est le moins qu’on puisse dire du discours de Moncef
Marzouki, président provisoire de la République alors qu’il s’adressait vendredi
23 décembre au patronat tunisien.

“Rien ne pourra marcher dans ce pays sans des institutions politiques
valables”,
a-t-il déclaré. Maintenant que c’est bien parti avec la constitution du nouveau
gouvernement, l’économique doit prendre la place qui lui est due.

Les populations, si elle ne peuvent avoir leur pain quotidien, appelleront au
retour de la dictature. ” Aujourd’hui que la machine politique est remise à
flots, nous estimons que l’économique doit prendre le pas. Toutes ces
manifestations, ces sit-in, ces grèves inexpliquées se justifient par une
situation dramatique vécue depuis des décennies qui a marginalisé des pans
entiers de la population, les affamant et les privant d’un minimum de droits
humains. Toutefois, ce qui se passe aujourd’hui dans notre pays, c’est une
opération suicide qui va nous mener vers le chaos. Il n’est dans l’intérêt de
personne de continuer à priver les outils de production du pays de leurs moyens.
“C’est comme poignarder la Tunisie dans son dos”.

La patience a des limites, a assuré M.
Marzouki, et à un certain moment, il va
falloir passer du langage de la supplication et de la prière à celui de la
primauté de la loi. “La passivité n’est plus de mise et notre peuple doit
pouvoir compter sur lui-même et prendre l’initiative d’améliorer son quotidien.
L’Etat qui lui faisait des promesses qu’il ne tenait pas tout juste pour qu’il
se taise sur ses exactions n’existe plus. Nous sommes tous responsables du
développement et de l’essor de la Tunisie, tout comme nous avons tous notre part
de responsabilité dans la marche arrière vécue ces dernières années”. Les
mentalités doivent évoluer vers plus de responsabilisation et d’initiative.

La bureaucratie doit être bannie, l’Administration doit être réformée dans le
sens de plus célérité, efficience et réactivité. “Est-il normal que les
investisseurs fassent la queue pour investir à Sidi Bouzid et que pour de
simples procédures administratives, on les bloque “?

La réforme de la justice doit se faire au même titre que celle de
l’Administration, car rien ne peut réussir sans une justice indépendante et
intègre, a affirmé le président de la République.

Moncef Marzouki a d’autre part appelé les hommes d’affaires à ne pas se mêler de
politique : “les résultats des élections ont montré que ce ne sont pas ceux qui
ont le plus bénéficié des fonds du secteur privé qui ont gagné les élections. Il
ne sert donc à rien de financer des partis pour avoir leur aval et s’il vous
demandent des financements, je souhaiterait que vous leur demandiez de dégager”.
Le président provisoire a également appelé la communauté d’affaires à
s’acquitter de ses impôts et d’être en règle avec l’Administration fiscale.

Il a par ailleurs assuré que l’Etat veillera à garantir la sécurité pour que les
investisseurs puissent évoluer dans un climat serein et rassurant.

Le discours de Moncef Marzouki a été mobilisateur et encourageant, reste qu’à
notre sortie de l’UTICA, nous sommes tombés nez à nez avec des salafistes qui
nous ont ramené tout d’un coup en Afghanistan…

Entre un discours officiel moderniste et une rue qui s’islamise de plus en plus,
quelle image renvoyons-nous aux investisseurs étrangers?