Viktor Orban isole la Hongrie au sein de l’UE, face aux Etats-Unis et au FMI

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à Paris (Photo : Bertrand Langlois)

[30/12/2011 09:11:19] BUDAPEST (AFP) Nouvelle constitution aux accents très nationalistes le 1er janvier, pêle-mêle de réformes controversées: en deux ans, le Premier ministre conservateur Viktor Orban a isolé la Hongrie au sein de l’Europe, face aux Etats-Unis et au Fonds monétaire international.

Sans oublier la loi sur “la stabilité financière” qui impose à l’avenir une majorité des deux-tiers au Parlement pour modifier le taux unique (16%) de l’impôt sur le revenu, une mesure liant les mains d’un futur gouvernement, y compris en matière budgétaire. Il est peu probable qu’un gouvernement issu de l’opposition dispose d’une telle majorité, comme c’est aujourd’hui le cas pour le parti au pouvoir, le Fidesz.

Beaucoup de ces lois ont “valeur constitutionnelle” et ne pourront donc être modifiées au Parlement que par une majorité des deux-tiers. Pour Guy Verhofstadt, ancien Premier ministre belge et président des Libéraux au Parlement européen, la nouvelle constitution est le “cheval de Troie d’un système politique plus autoritaire basé sur la perpétuation du pouvoir d’un seul parti”.

Il y a aussi l’installation aux postes de responsabilité de l’appareil d’Etat de proches de Viktor Orban. Le président de la Banque centrale, Andras Simor, est le dernier à faire de la résistance, avec le soutien de la Banque centrale européenne (BCE), mais pour combien de temps encore?

Dans le secteur culturel, le Fidesz n’a pas hésité à promouvoir des personnalités notoirement d’extrême droite, voire antisémites. Dans les médias publics la mise au pas s’est traduite par des licenciements massifs ou la mise en pré-retraite de journalistes indociles, en dépit d’une grève de la faim de plusieurs d’entre eux, aussitôt licenciés. Klubradio, seule radio d’opposition, a perdu sa fréquence.

La politique économique “non-orthodoxe” de Viktor Orban –taxes sur les banques, les groupes énergétiques et de télécommunication, nationalisation des caisses de retraite privées– a fait plonger la devise hongroise, le forint, de plus de 20% par rapport à l’euro au cours des trois derniers mois.

Signe de tension, le 29 décembre, les obligations d’Etat n’ont trouvé preneurs qu’à plus de 9% de taux d’intérêt, alors que les analystes financiers considèrent qu’à plus de 7% les taux d’intérêt deviennent insupportables.

Deux agences d’évaluation financière, Moody’s et Standard and Poor’s, ont abaissé la note de la dette à long terme dans la catégorie “spéculative”.

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à Paris et le président de la Commission Européenne le 3 février 2011 à Bruxelles (Photo : Georges Gobet)

En dépit du flot de critiques, la dernière en date émanant du secrétaire d’Etat américain, Hillary Clinton qui s’est inquiétée de “la situation de la démocratie” en Hongrie, Viktor Orban fait front, semblant faire fi des conséquences pour son pays et le peuple hongrois.

“Personne ne peut intervenir dans le processus législatif hongrois”, a-t-il affirmé sans ambages vendredi matin, répliquant indirectement à la dirigeante américaine.

Malgré une mise en demeure de la Commission européenne, le Parlement va adopter vendredi la réforme de la Banque centrale, la nouvelle loi sur les religions, qui réduit d’environ 300 à 14 les communautés bénéficiant de subventions publiques, une loi réduisant à la portion congrue les débats au Parlement et une loi sur “les crimes communistes”, visant rétroactivement les dirigeants du Parti socialiste (ex-communiste).

Ces derniers dénoncent “la mise en place d’une dictature”.

La réforme de la Banque centrale retire à son président la prérogative de choisir ses deux adjoints, au profit du chef du gouvernement. Le conseil monétaire de la Banque centrale passera de sept à neuf personnes, ses deux membres extérieurs supplémentaires étant, comme quatre autres, nommés par le Parlement, donc par le Fidesz.

Ce bras de fer intervient au moment où la Hongrie a dû lancer un appel au secours à l’UE et au FMI, alors que Viktor Orban boudait auparavant le FMI.

La Hongrie a besoin d’un crédit d’environ 15 à 20 milliards d’euros, alors que déjà, lors de la crise de 2008-2009, elle avait été sauvée de la banqueroute grâce à un prêt de 20 milliards d’euros du FMI, de l’UE et de la Banque mondiale.

Mais les négociations sont dans l’impasse, suspendues par l’UE et le FMI en raison de la réforme de la Banque centrale, qui risque de porter atteinte à l’indépendance de l’institution.