Areva victime d’une “escroquerie” en acquérant Uranim, affirme l’auteur d’un audit

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éaire Areva (Photo : John Macdougall)

[13/01/2012 09:20:51] PARIS (AFP) Le groupe nucléaire Areva aurait été victime d’une “escroquerie” en acquérant la société de gisements d’uranium Uramin, une opération de 2,5 milliards de dollars qui s’est avérée un désastre financier, affirme dans Le Parisien l’auteur d’un audit réalisé en 2010 pour le groupe.

“Il y a un faisceau d’indices sérieux et concordants qui démontrent qu’Areva a été victime d’une escroquerie”, selon la conclusion du rapport de Marc Eichinger, dirigeant de la société de conseil Apic, interrogé par le quotidien dans son édition de vendredi.

L’expert financier avance “un soupçon de délit d’initié avec des opérateurs ayant connaissance très tôt” de la future OPA en 2007, alors que le cours de Bourse d’Uramin -société canadienne détenant trois gisements d’uranium en Afrique – a été multiplié par six dans les six mois avant l’opération.

L’acquisition d’Uramin s’est faite “dans des conditions de gouvernance irréprochables”, avait assuré fin décembre Anne Lauvergeon, ex-patronne du groupe, en rappelant au passage que le cours de l’uranium était à l’époque très élevé.

Vendredi, interrogé par l’AFP, Areva a refusé de commenter ces accusations sur le fond, une porte-parole indiquant simplement que le groupe est “prêt à répondre à la justice si nous sommes interrogés”.

Malgré l’ampleur de l’investissement, Areva n’a évalué les réserves minières d’Uramin qu’en utilisant des documents d’une société, SRK, “rémunérée par le vendeur”, n’a dépêché aucune équipe sur place ni demandé une étude des experts miniers de l’Etat, affirme M. Eichinger dans le Parisien.

Areva, détenu à 87% par l’Etat, a passé en décembre une nouvelle très lourde provision de 1,46 milliard d’euros sur la valeur d’Uramin, qui ne vaut plus comptablement que 20% de sa valeur d’acquisition.

Ce désastre financier plombe à posteriori le bilan de Mme Lauvergeon, évincée du groupe nucléaire au printemps au profit de son numéro 2 Luc Oursel.

Areva a formé le mois dernier un comité interne composé de trois administrateurs indépendants, chargé de rendre d’ici fin février un rapport sur les conditions d’acquisition d’Uramin. Le paiement de 1,5 million d’euros d’indemnités de départ à Anne Lauvergeon est suspendu aux conclusions de ce comité, qui seront annoncées en février.

Parmi les éléments troubles du dossier, M. Eichinger avance également que le patron de la division minière d’Areva à l’époque de l’achat d’Uramin, Daniel Wouters, était en parallèle responsable d’une société d’exploration minière en Afrique, Swala Resources, même s’il admet ne pas avoir “pu prouver d’enrichissement personnel indu”.

M. Wouters, recruté rapidement en 2006, “connaissait le mari d’un cadre dirigeant, dont je ne peux pas dévoiler le nom”, selon M. Eichinger, qui accuse également Areva d’avoir publié “des informations mensongères” après l’acquisition d’Uramin “jusqu’au moment où il n’était plus possible de les cacher”.

Le rapport, réalisé sous l’ère d’Anne Lauvergeon, a été commandité selon l’auditeur par la Direction de la protection du patrimoine d’Areva, “qui a reçu une demande interne”. Il affirme n’avoir “à aucun moment été en contact avec Anne Lauvergeon ou un membre de la direction générale”.