à Paris le 18 août 2011 (Photo : Eric Piermont) |
[14/01/2012 12:41:05] BRUXELLES (AFP) Le nouveau pacte budgétaire en passe d’être conclu en Europe pour renforcer la discipline commune et retrouver la confiance des marchés a du plomb dans l’aile avant même d’avoir vu le jour, après avoir été jugé “insuffisant” par Standard and Poor’s face à la crise de la dette.
L’agence de notation américaine, qui a dégradé vendredi soir la note de neuf pays de la zone euro, a dressé un constat sans appel sur ce projet de texte imposé par l’Allemagne lors du sommet européen du 9 décembre.
Selon elle, il “ne constitue pas une avancée d’envergure suffisante pour pouvoir répondre pleinement aux problèmes financiers de la zone euro”, car il s’attache uniquement au manque de rigueur de certains Etats membres.
Le pacte budgétaire prévoit en effet l’instauration d’une règle d’or pour inscrire dans la constitution un objectif de comptes publics équilibrés, ainsi que des sanctions financières quasi-automatiques lorsque les déficits dépassent la barre de 3% du PIB. Ce futur traité intergouvernemental est destiné aux pays de la zone euro et à ceux de l’UE souhaitant s’y associer.
Or, “il nous semble que les problèmes financiers que connaît la zone euro résultent tout autant des déséquilibres macroéconomiques que des écarts de compétitivité”, poursuit S&P qui ne croit à la rigueur seule comme solution.
D’autant plus que l’Union monétaire n’est toujours pas dotée en parallèle d’un pare-feu convaincant pour les marchés: son Fonds de soutien (le FESF), censé jouer ce rôle, a de fortes chances de perdre son triple A dans la foulée de la France et de l’Autriche. Il risque ainsi de ne plus pouvoir lever de l’argent à des taux aussi avantageux qu’aujourd’hui, pour ensuite prêter à son tour aux Etats en difficulté de la zone euro. En outre, son successeur, le Mécanisme européen de stabilité (MES), ne sera pas mis en place avant l’été.
Un laps de temps pendant lequel la crise peut s’aggraver.
Les dégradations en rafale par S&P vont en tout cas relancer le débat sur un renforcement des moyens financiers de ces pare-feu, malgré l’opposition de l’Allemagne.
“S&P a clairement prévenu les responsables européens, mais ils ont perdu un mois qu’ils auraient pu utiliser pour changer la donne et parvenir à une solution crédible face à la crise”, critique l’analyste Sony Kapoor du centre de réflexions Re-Define. L’agence de notation avait mis la pression sur la zone euro dès le mois de décembre, en la plaçant sous surveillance négative.
Fondamentalement, le nouveau traité budgétaire reste une initiative surtout allemande, à laquelle les autres capitales ont dû se résigner bon an mal an.
“Cette histoire de traité est insensée”, a récemment estimé un responsable européen de haut rang sous couvert de l’anonymat, en jugeant qu’il était uniquement demandé par la chancelière allemande Angela Merkel pour donner des gages à son opinion et à sa majorité parlementaire. Une manière de lui faire accepter en contrepartie plus de solidarité pour les pays fragiles.
De son côté, la Commission européenne juge ce projet superflu: 95% de ce qu’il propose peut se faire sans nouveau traité, a estimé cette semaine le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn.
Pour l’exécutif européen, la priorité devrait être aussi au renforcement du FESF ou du MES.
La pilule a d’autant plus de mal à passer qu’il vient tout juste de mettre en place un ensemble de textes législatifs pour renforcer la discipline budgétaire, après un an de négociations avec les Etats.
Ce texte vient d’être utilisé pour la première fois mercredi, Bruxelles ayant proposé de sanctionner les dérapages budgétaires de la Hongrie.
Enfin, le projet de pacte budgétaire –qui bénéficie désormais d’un accord de principe entre Européens malgré plusieurs points litigieux encore en suspens– a été adouci pour satisfaire les pays qui craignaient l’instauration de règles trop drastiques, ce qui peut créer le doute sur son efficacité.