La Tunisie et particulièrement sa capitale ont célébré, samedi dernier, le premier anniversaire de la Révolution du 14 janvier 2011 dans des bains de foules sorties exprimer en liesse la joie de tout un peuple venu, il y a un an, au bout d’un dictateur ayant régné sur le pays durant vingt-trois ans avec une main de fer et sans partage aucun, sinon le partage, avec sa famille mafieuse, des richesses de la nation dérobées sans le moindre scrupule, sans parler de la dignité confisquée d’un peuple bâillonné, infantilisé et régulièrement tenu à l’écart des décisions, petites ou grandes, liées au devenir de la Tunisie.
Totale était donc la fête, le 14 janvier 2012, de ce peuple qui a recouvré sa dignité et ouvert la voie à d’autres pays arabes parvenus à leur tour à se débarrasser des tyrans qui les avaient tout aussi appauvris et martyrisés le long de quelques décades.
Photos souvenirs
Grand théâtre de la Révolution tunisienne, l’Avenue Habib Bourguiba l’a été également avant-hier, pas pour une révolution cette fois-ci, mais pour sa célébration, occasion pour laquelle le cœur de Tunis s’est vu couvrir dans la plupart de ses artères du drapeau tunisien dont bien des citoyens se sont couverts de pied en cap. Du Théâtre municipal jusqu’à la Place du 14 Janvier, une infinité de citoyens ont pris en photos leurs enfants en bas-âge pour des clichés-souvenirs de cette journée mémorable. Ce que le temps passe vite! Le 14 janvier 2011, c’est comme si c’était hier. Mais à regarder l’Avenue, samedi dernier, on se sentait très, très loin de ce grand jour de la Révolution, tant les deux spectacles n’avaient aucune commune mesure: à la débandade générale sur fond de tirs de balles et bombes lacrymogènes, répondait en écho, l’avant-veille, des chants patriotiques et même des youyous face à une police joviale et sereine, quoique sur ses gardes.
Sur le plan officiel
Au Palais de Carthage, trois cérémonies ont eu lieu vendredi 13 sous la présidence du chef de l’Etat qui a rendu successivement hommage aux martyrs de la Révolution du 14 janvier, aux martyrs de l’Armée nationale, et à ceux des forces de sécurité nationale.
Mais c’est au Palais des Congrès à Tunis qu’a eu lieu, samedi, la célébration officielle de la Révolution en présence de chefs d’Etat et de hauts responsables arabes dont on cite le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, l’Emir du Qatar, Cheikh Hamed Bin Khalifa Al-Thani, le président du Conseil national de transition libyen, Mustapha Abdeljelil, le président de la Chambre des députés marocain, Karim Ghalleb, le vice-premier ministre turc, Béchir Atalay, et le ministre des Affaires étrangères palestinien, Ryadh El Melki. Gouvernement tunisien et invités d’honneur ont tous intervenu au micro en vue de saluer l’expérience tunisienne et souhaiter à l’ensemble du monde arabe un avenir respectueux des droits de l’homme, de la citoyenneté et de la démocratie, sachant que pour le président Moncef Marzouki, les deux priorités, pour le moment, sont les martyrs de la Révolution et le développement régional.
Justice
A l’occasion de la célébration de la Révolution tunisienne, le président Moncef Marzouki a décidé de commuer en peine d’emprisonnement à vie quelque 122 condamnations à mort, d’accorder une amnistie spéciale en faveur de 3 868 prisonniers, ainsi que la liberté conditionnelle pour 4 976 autres.
Sidi Bouzid fâché !
On aurait tant souhaité que la fête du 14 janvier soit étendue à tout le pays. Hélas! Sidi Bouzid est fâché. La ville et ses 12 localités qui ont effectivement écrit la toute première page de la Révolution tunisienne ne retiennent, elles, que la date du 17 décembre (jour d’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi) pour être la journée ayant marqué ladite révolution. Par conséquent, elles entendent que le jour férié devant célébrer cette fête soit plutôt le 17 décembre et non le 14 janvier. Les établissements scolaires ont fonctionné, samedi dernier, comme d’habitude.
Extradition
Un important sit-in a été organisé samedi devant l’ambassade du Royaume d’Arabie Saoudite à Tunis par plusieurs familles de martyrs tunisiens revendiquant l’extradition du président déchu vers la Tunisie en vue d’être jugé pour meurtres, et ce en application des dispositions de la Convention arabe de Ryadh sur l’échange de criminels.