La Grèce sous pression maximale de ses créanciers

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élos Vénizélos, le 28 janvier 2012 à Athènes (Photo : Angelos Tzortzinis)

[29/01/2012 09:57:55] ATHENES (AFP) Athènes, tout proche d’un accord sur un effacement de dette avec ses banquiers, a subi samedi des pressions maximales de ses créanciers institutionnels dont certains ont menacé de prendre directement les commandes du pays faute d’avancée dans les réformes d’assainissement.

Après plus de deux semaines de négociations intermittentes et orageuses à Athènes, le gouvernement grec semble sur le point d’avoir trouvé un accord avec ses créanciers privés en vue de l’effacement de 100 milliards d’euros de dette.

L’effort des banques doit permettre de faire tomber la dette du pays à un niveau jugé soutenable bien qu’encore très élevé de 120% du PIB d’ici 2020, au lieu de 160% actuellement.

Après une nouvelle réunion samedi, les créanciers privés représentés par l’Institut de la finance internationale (IIF), aussi bien que la Grèce, représentée par son ministre des Finances Evangélos Vénizélos, ont utilisé quasiment les mêmes termes pour se déclarer “proches” de la finalisation d’un accord volontaire d’échange de dette, dont ils attendent la conclusion “la semaine prochaine”.

Sans bouclage de ce plan –qui butait notamment sur le montant du taux d’intérêt que devra payer Athènes à ses banques sur les nouvelles obligations émises–, la Grèce est sous la menace d’un défaut de paiement dès le 20 mars, lorsque le remboursement de 14,5 milliards d’euros de vieilles obligations arrivera à échéance.

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énéral du lobby bancaire mondial IFF, Charles Dallara (G), et Jean Lemierre de BNP Paribas, le 28 janvier 2012 à Athènes (Photo : Angelos Tzortzinis)

Le principe du plan d’effacement de dette, dans lequel les créanciers privés devraient subir des pertes de quelque 70% sur les anciennes obligations souveraines qu’ils détenaient, avait été décidé fin octobre lors d’un sommet de la zone euro à Bruxelles.

Mais pour assurer sa survie, et lever les pressions qui pèsent sur la zone euro, Athènes négocie parallèlement avec ses créanciers institutionnels, Union européenne (UE), Banque centrale européenne (BCE) et Fonds monétaire international (FMI), en vue du déblocage d’un deuxième plan de soutien, décidé lui aussi fin octobre.

Et là, le bras de fer s’est nettement durci samedi entre le gouvernement grec et ses créanciers publics sur les nouvelles mesures de rigueur et de déréglementation réclamées au pays pour lancer le plan de renflouement de 130 milliards d’euros prévu par la zone euro.

Profitant du fait que l’accord de désendettement bancaire n’est pas encore complètement bouclé, la troïka UE-FMI-BCE semble vouloir battre le fer tant qu’il est chaud, en tentant d’arracher des concessions importantes au gouvernement grec en matière d’économies budgétaires, privatisations, recapitalisations bancaires et réformes structurelles.

La pression est aussi montée à l’extérieur de la Grèce: plusieurs pays de la zone euro dont l’Allemagne, perdant manifestement patience vis-à-vis d’Athènes, ont demandé un contrôle européen direct du budget grec.

“La Grèce va devoir vivre avec le fait que ceux qui donnent beaucoup d’argent pour assainir le pays doivent davantage être inclus dans les décisions sur la répartition” de cet argent, a notamment déclaré l’Allemand Martin Schulz, président du Parlement européen et membre du parti social-démocrate allemand SPD.

Cela signifie “sûrement une limitation temporaire de sa souveraineté”, a-t-il ajouté, tandis que la Commission européenne à Bruxelles tentait d’arrondir les angles.

L’hypothèse d’une telle perte de souveraineté a fait voir rouge au gouvernement grec qui a immédiatement rejeté cette option.

Mais sur le terrain des discussions concrètes, le ministre des Finances a confirmé la rudesse des discussions qu’il mène avec la “troïka” des créanciers.

“Nous devons faire face à de difficiles dilemmes (…) les jours prochains seront déterminants”, a affirmé M. Vénizélos, lançant un “appel national” aux partis soutenant le gouvernement à aider à la négociation.

En jeu se trouve aussi bien une probable nationalisation des banques grecques qu’une réforme du marché du travail qui devrait libéraliser l’économie du pays engluée dans la récession, mais aussi ouvrir la voie à des abaissements de salaire et de statut chez les salariés.

Le gouvernement respectera “les principes inviolables de défense de l’intérêt public face aux intérêts privés”, a déclaré M. Vénizélos au sujet de ces tractations. “Mais cela doit être fait de manière organisée, sans rien qui n’aggrave la récession”, a insisté le ministre.

En vue des arbitrages qu’Athènes devra faire, le Premier ministre Lucas Papademos, qui a reçu la troïka dans la soirée, doit réunir dimanche les chefs des partis socialiste, conservateur et d’extrême droite de la coalition le soutenant, pour tenter d’obtenir leur soutien aux mesures.

La zone euro, se méfiant du contexte politique mouvant en Grèce, où de prochaines élections sont prévues, souhaite demander des engagements écrits à chacun des partis pour qu’ils mettent en oeuvre les changements qu’elle juge nécessaire pour relancer l’économie du pays, avant de verser les milliards prévus.