Neige recouvrant des vignobles en Suisse le 31 janvier 2012 (Photo : Fabrice Coffrini) |
[31/01/2012 17:42:45] PARIS (AFP) La vague de froid qui s’abat sur l’Europe pourrait être dévastatrice pour les cultures, notamment le blé et le colza très avancés cette année après un début d’hiver particulièrement doux, avec une hausse des prix pour conséquence probable.
“Les marchés sont déjà en alerte rouge”, indique Michel Portier, directeur général d’Agritel.
“Alors que les cultures sont dans une phase végétative très avancée du fait de la douceur de l’automne et du début de l’hiver, le gel fera beaucoup de dégâts”, ajoute cet expert.
Certaines plantes ont en effet à la faveur de la clémence de l’hiver pris jusqu’à deux mois d’avance sur leur développement habituel.
Et toute l’Europe est concernée par cette baisse soudaine des températures: pour la fin de la semaine, le thermomètre devrait atteindre -30°C sur l’Ukraine et la Russie, -15°C sur la Pologne et l’Allemagne et -10°C sur l’Est de la France.
“Cela n’a rien d’exceptionnel pour un mois de février mais ce froid arrive extrêmement tard dans la saison”, note Edward De Saint-Denis, courtier en céréales pour la société Plantureux.
Pour l’Europe de l’Est (Allemagne, Pologne, Ukraine et Russie), la situation est particulièrement critique dans certaines régions car le manteau neigeux, rempart naturel contre le gel, n’est pas suffisant pour protéger efficacement les cultures.
Ainsi, les spécialistes estiment qu’en Ukraine cette situation après un automne très sec pourrait être dramatique pour la production de blé qui pourrait baisser de 30%.
Les craintes des experts portent pour l’instant principalement sur le colza (qui sert en partie à l’alimentation du bétail) et le blé dur qui est plus sensible au froid.
“Les premiers touchés seront les pays importateurs et notamment ceux du Maghreb qui consomment comme denrée de base beaucoup de blé dur (destiné aux pâtes et à la semoule, Ndlr) et qui risquent donc de voir les prix flamber”, selon M. Portier.
La France, premier exportateur européen de blé, qui exporte en moyenne trois fois sa consommation intérieure de blé dur le fait principalement en direction du Maghreb.
Pour les experts, qui craignent toujours une réédition des émeutes de la faim comme celles de 2008, la situation est sérieuse.
“Il est encore trop tôt pour se prononcer mais la situation est dangereuse et il y a bien un risque de voir le contexte se tendre cette année”, explique M. De Saint-Denis, qui mentionne parallèlement les incertitudes concernant la situation nord-américaine.
En raison d’un temps très sec dans les plaines des Etats-Unis et du Canada actuellement, il faudra que le printemps soit pluvieux sinon la situation pourrait être aussi tendue de ce côté là.
Mardi, dans ce contexte général fébrile, les cours du blé ont progressé. Vers 17H00 GMT, la tonne de blé progressait de 5 à 7 euros pour les échéances de 2012, à 216 euros pour le mois de mars.
Et sur le marché américain, le boisseau de blé s’appréciait de 16 cents à 6,6125 dollars à la même heure.
Malgré tout certains souhaitent rester positif. Dans certaines régions, la baisse des températures devrait être progressive et donc permettre aux plantes de s’habituer progressivement ce qui devrait limiter les dégâts, tempère Rémy Acquin, agriculteur dans l’Oise et président du conseil spécialisé des céréales de FranceAgriMer.
Il faudra de toute façon attendre le fin de l’hiver et même mai ou juin pour avoir une idée précise des dégâts de cette vague de froid.