L’économie française “a besoin de banques fortes”, selon Frédéric Oudéa

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édéric Oudéa, le 4 août 2010 à La Défense (Photo : Eric Piermont)

[01/02/2012 11:36:38] PARIS (AFP) Frédéric Oudéa, président de la Fédération bancaire française, récuse dans une interview à l’AFP le discours de François Hollande visant le secteur et la taxe sur les transactions financières voulue par Nicolas Sarkozy, estimant que la crise n’est pas “de la faute des banques”.

Question: La Fédération bancaire française (FBF) lance une campagne de communication. Quel en est l’objectif?

Réponse: Notre objectif est de mettre en avant les chiffres qui montrent que les banques françaises ont assuré pleinement le financement de l’économie française en 2011, comme en 2009 et 2010. Il y a 90 milliards d’euros de crédits en plus entre fin 2011 et fin 2010 soit +5,3%.

Q: S’agissait-il aussi de faire passer un message aux politiques, qui ne vous ont pas épargnés ces derniers jours?

R: Pour être dynamique, une économie a besoin de banques fortes. On parle du monde de la finance et on fait un amalgame en mettant tous les acteurs sur un pied d’égalité. Or, les banques françaises n’ont rien coûté au contribuable, aucune d’entre elles n’est nationalisée et cela fait trois ans que la croissance du crédit en France est bien supérieure à celle de la zone euro. Il faut sortir de cette logique où on oppose les uns et les autres.

Q: Les banques cherchent-elles à s’affranchir de leurs responsabilités?

R: Chacun a sa part de responsabilité, il est clair qu’il y a eu un certain nombre d’erreurs, de la part de certaines banques, dans un certain nombre de pays, et nous en avons tiré les leçons collectivement. Mais le discours selon lequel la crise actuelle est de la faute des banques a ses limites. Il s’agit d’une crise de l’endettement public.

Q: Quel regard portez-vous sur la taxe sur les transactions financières, qui est en passe de devenir réalité en France?

R: Les banques doivent déjà s’adapter à (la nouvelle réglementation dite) Bâle III dans des délais plus courts que prévu. Le régulateur européen nous demande de renforcer fortement nos fonds propres dans une conjoncture incertaine. Pour ce faire, la mise en réserve de nos résultats est un élément clef. Toute taxation supplémentaire (…) ne peut que limiter la capacité des banques à faire du crédit et donc le soutien à la croissance. Une taxe, si tant est qu’elle ait du sens, ne peut être qu’internationale.

Q: Y a-t-il un risque de délocalisation de certaines activités?

R: Notre pays doit avoir un objectif de création d’emplois, de compétitivité et on est en train de créer un instrument fiscal dont tout le monde s’accorde à dire qu’il va supprimer des emplois. Or, il est indispensable qu’il y ait des acteurs financiers ancrés dans la zone euro qui soient présents dans les activités de marché, car la nouvelle réglementation va inciter à se financer davantage par les marchés. C’est un enjeu de souveraineté et de développement. Si la zone euro ne dépend plus pour se financer que des acteurs et des places hors de la zone euro, elle va avoir des difficultés (…) Si cette taxe existe, elle doit être au minimum européenne au sens large et donc inclure Londres.

Q: Les derniers chiffres de la Banque de France font état d’un ralentissement du crédit sur les derniers mois de l’année. Comment l’analysez-vous?

R: Les patrons des principales banques françaises ont été dans une dizaine de régions entre le 15 novembre et le 15 janvier à la rencontre des PME/TPE. Chaque fois, il y avait dans la salle 150 à 200 chefs d’entreprise qui avaient plus d’inquiétude liée à leur niveau d’activité en 2012 qu’à un problème d’accès au crédit. En effet, à partir d’octobre, l’environnement général est devenu plus inquiétant et les chefs d’entreprise abordent 2012 avec prudence. Cela dit, il n’y a pas de catastrophe, d’effondrement de l’activité économique comme en 2009. Nous leur répétons : vous aurez accès au crédit, si vous avez un bon projet, ne bridez pas vos initiatives.