Le Portugal entame son plan de privatisations avec succès, grâce aux Chinois

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électrique portugais EDP au siège de la compagnie à Lisbonne, le 23 décembre 2011 (Photo : Patricia de Melo Moreira)

[03/02/2012 13:40:47] LISBONNE (AFP) Tenu de privatiser à tout va pour réduire son niveau d’endettement et éviter le sort de la Grèce, le Portugal a déjà encaissé plus de la moitié des recettes prévues par son plan d’aide UE-FMI, essentiellement grâce à l’investissement d’entreprises publiques chinoises.

Sur les quelque 5 milliards d’euros que le Portugal espère obtenir avec l’ensemble de son programme de privatisations, plus de 3 milliards ont déjà déjà assurés par la vente de participations publiques dans les électriciens EDP et REN aux groupes chinois Three Gorges et State Grid, respectivement.

La conclusion de ces opérations fournit à Lisbonne un argument supplémentaire pour se distinguer de la Grèce alors que nombre d’analystes craignent que le Portugal soit à son tour contraint de demander une rallonge de son plan de sauvetage de 78 milliards d’euros, voire de restructurer une dette publique qui a dépassé 100% du PIB l’an dernier.

“La privatisation de REN a été un succès”, s’est félicité vendredi le Premier ministre portugais Pedro Passos Coelho. “Nous avons réussi à encaisser davantage que prévu, alors que certains disaient qu’on se préparait à vendre au rabais”, a-t-il souligné au Parlement.

Le gouvernement a décidé jeudi de vendre 25% du gestionnaire du réseau électrique REN au chinois State Grid, pour 387,15 millions d’euros, et une participation de 15% au groupe omanais Oman Oil pour 205,06 millions d’euros.

Cette opération représente “un deuxième grand succès du programme de privatisations portugais” après la vente en décembre de 21,35% d’Energias de Portugal (EDP) à China Three Gorges pour 2,7 milliards d’euros, a estimé José Maria Ricciardi, président de BES Investimento, qui a conseillé State Grid dans le rachat de REN.

Selon ce banquier, cela montre que “notre pays est un cas totalement distinct d’autres pays comme la Grèce, incapables de poursuivre leur programme de privatisations”.

Si State Grid et Oman Oil ont fait les seules offres définitives pour REN, Three Gorges est devenu le premier actionnaire d’EDP en l’emportant sur l’allemand EON et les brésiliens Eletrobras et Cemig.

Les deux opérations ont été assorties d’un engagement de la part des Chinois à assurer le financement des sociétés dont ils ont pris le contrôle.

L’intérêt chinois pour les actifs énergétiques portugais s’était déjà manifesté en novembre, avec le rachat par Sinopec de 30% de la branche brésilienne du groupe pétrolier et gazier Galp Energia, pour 3,54 milliards de dollars (2,6 milliards d’euros).

Avec trois opérations en trois mois, la Chine a remplacé l’Angola, ancienne colonie portugaise riche en pétrole, au rang de premier investisseur étranger au Portugal, notait le quotidien Diario de Noticias.

Selon Rui Santos, économiste à la banque BPI, le verre peut être vu “à moitié plein ou à moitié vide”. D’une part, “il a été possible en pleine crise financière de trouver des investisseurs prêts à investir au Portugal. D’autre part, “la vente d’actifs dans un marché actionnaire déprimé implique nécessairement un sacrifice de recettes”.

Après la vente du joyau EDP, la suite du programme de privatisations s’annonce plus délicate car “l’Etat doit maintenant relever le défi de vendre des entreprises moins rentables ou qui affichent des pertes”, telles que la compagnie aérienne TAP, ajoute M. Santos.

“Ce programme de privatisations rend le Portugal plus pauvre et les Chinois plus riches”, tranche Paul de Grauwe, professeur d’économie à l’université de Louvain, en Belgique.

En cédant EDP notamment, Lisbonne a fait “un cadeau aux Chinois” et s’est privé d’une source de revenus futurs, victime de “la stupidité des Européens qui forcent les pays à vendre des actifs très rentables à des prix de solde”, explique l’économiste.