Une campagne électorale dominée comme jamais par l’économie

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à Toulouse, le 13 janvier 2011 (Photo : Philippe Wojazer)

[18/02/2012 11:25:29] PARIS (AFP) Crise de la dette, réduction des déficits, réindustrialisation: jamais sous la Ve République une campagne présidentielle n’est apparue autant dominée par les enjeux économiques.

Quel qu’il soit, le prochain locataire de l’Elysée devra affronter d’emblée une situation budgétaire tendue.

Certes, la croissance positive (+0,2%) au dernier trimestre 2011 a écarté provisoirement le spectre d’une récession, et les déficits publics ont été contenus l’an dernier sous la barre des 5,7% du PIB, comme la France s’y était engagée.

Pour autant, le rouge reste, du commerce extérieur à la dette en passant par l’emploi, la couleur dominante des grands indicateurs du pays.

Le gouvernement a dû se résoudre à repousser d’un an, à 2014, la perspective d’un reflux de la dette, attendue en 2012 à 89,1% du produit intérieur brut (PIB).

Pour la première fois aussi depuis 2009, l’économie française a détruit des emplois salariés fin 2011 (-0,2% au 4e trimestre), alors que le chômage est à son plus haut niveau depuis douze ans.

“L’actuelle campagne fait moins rêver, c’est une bonne chose (…) Les hommes politiques doivent vivre dans le monde réel”, résume Jean-Paul Betbèze, chef économiste du Crédit Agricole et auteur de “2012: 100 jours pour défaire ou refaire la France” (éd. PUF).

“Chacun a bien conscience qu’il faut faire acte de prévisibilité, ce qui veut dire que c’est une campagne sans promesses”, renchérit Nicolas Bouzou, du cabinet Asterès.

Contraint d’assumer un bilan économique mitigé, Nicolas Sarkozy a tenté de retourner à son profit l’argument de la crise en officialisant son entrée en campagne pour un second mandat mercredi.

Le président sortant a notamment justifié sa candidature en posant au “capitaine” refusant d’abandonner un navire “en pleine tempête”, alors que “la France, l’Europe et le monde” connaissent depuis trois ans “une succession de crises d’une violence inouïe”. Il a évoqué la poursuite de “la réduction indispensable des dépenses”, alors que l’objectif de retour à l’équilibre budgétaire a été fixé à 2016 par l’actuel gouvernement.

“Nous sommes des gestionnaires efficaces”, a répliqué jeudi François Hollande, qui prévoit la même échéance un an plus tard.

Les précédents programmes du PS étaient marqués “par des réformes ambitieuses, suivies d’une pause et d’une déception”, celui-ci “commence par le redressement”, souligne à l’AFP son directeur de campagne, Pierre Moscovici.

Deux exemples: le 54e engagement du candidat socialiste “garantit” un maintien “à leur niveau actuel” des dotations aux collectivités locales, un euphémisme pour annoncer leur gel. Et si 60.000 emplois doivent être créés dans l’éducation et quelques milliers d’autres dans la police, la gendarmerie et la justice, ils le seraient à effectifs de fonctionnaires constants. “Pour le reste, il y aura des économies à faire”, a reconnu M. Hollande.

Les deux principaux prétendants à l’Elysée ne sont pas seuls à faire assaut de sagesse comptable. En champion du désendettement, François Bayrou (MoDem) s’engage au zéro déficit pour 2015. Il prévoit de réaliser 50 milliards d’économies mais ne dit pas comment. Dominique de Villepin (République solidaire) surenchérit: il en annonce 60.

La réindustrialisation, sortie du créneau du Parti communiste ou de Lutte ouvrière, est aussi cette année dans tous les discours, du “pacte productif” de François Hollande au “produire en France” version Bayrou ou Sarkozy, ou au protectionnisme vanté par Marine Le Pen (Front national).

Fin janvier, M. Hollande venait à peine de promettre la création d’une “banque publique d’investissement” en faveur des PME et d’un livret d’épargne industrie que Nicolas Sarkozy, dans l’une des dernières réformes du quinquennat, annonçait pour février sa “banque de l’industrie”, avec une dotation d’un milliard d’euros tirés du “grand emprunt”.