Plan de sauvetage ou “jeu” avec l’avenir, s’interrogent les Grecs

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écembre 2011 à Athènes (Photo : Aris Messinis)

[21/02/2012 18:06:24] ATHENES (AFP) Sur la place Syntagma, théâtre habituel de la colère grecque contre l’austérité appliquée au pays, le plan de sauvetage sans précédent débloqué par la zone euro en faveur d’Athènes ne suscitait mardi que des commentaires sceptiques, voire ironiques.

“Au lieu de s’écrouler tout de suite, ce sera un peu plus tard et dans un cas comme dans l’autre, il n’y pas d’avenir”: l’annonce de l’accord trouvé entre les ministres des Finances de la zone euro sur un vaste plan de renflouement et de désendettement de son pays n’illumine pas vraiment la journée de Dimitri, un fonctionnaire de 56 ans.

Et il en faudrait plus pour rassurer Maria Voutsina, professeur de français dans le privé, au chômage depuis plusieurs mois, qui attend des “assurances” là où elle ne voit qu'”incertitudes” pour le futur.

“Tout ça, c’est un jeu politique, on ne sait pas exactement ce qu’il se passe. Il n’y a personne pour nous le dire”, estime cette quadragénaire qui souffre autant des difficultés économiques que de la “pression morale” née de la confusion où se trouve la Grèce.

Sentiment partagé par Soula qui se méfie de la satisfaction affichée par le Premier ministre grec Lucas Papademos et ses partenaires européens à l’issue de treize heures de tractations: “ils disent que c’est bien. Est-ce si sûr? Je crois que c’est un jeu pour nous emmener à la faillite”, suppose cette fonctionnaire de 48 ans.

“Ils disent qu’on a gagné mais on verra ça dans la pratique”, renchérit Evgenia Tsiodridou, 43 ans qui prend le soleil sur l’un des bancs de la place où les planches de bois fraîchement remplacées rappellent les violences qui ont accompagné la dernière grande manifestation contre l’austérité imposée à la Grèce.

Le 12 février, alors que les députés grecs adoptaient le principe d’un nouveau paquet de rigueur conditionnant le déblocage du plan de sauvetage financier de leur pays, plus de 80.000 personnes avaient manifesté à Athènes.

“Je crois qu’il aurait fallu envisager la question différemment, que l’annulation de la dette soit plus large, que des mesures de soutien à la croissance soient prises, comme dans d’autres pays, assorties d’une baisse des taxes”, analyse Giorgos Pipikakis, étudiant, l’un des rares jeunes interrogés à se dire au courant des événements de la nuit concernant son pays.

“La voie choisie par ce programme n’est pas la bonne”, estime également Aspotolos Maliakos partagé entre tristesse de voir son pays enfoncé dans la dépression et sévérité vis à vis des comportements individuels.

“Les Grecs ne savent pas travailler ensemble et avec les autres. Ils ne savent vivre que dans le chaos”, observe ce retraité qui réside en Allemagne depuis 45 ans.

Cette appétence serait-elle en train de changer? La perspective d’un renforcement du pouvoir de contrôle des Européens “sur l’application du programme économique” élaboré pour le pays ne soulève pas d’indignation.

Plutôt l’amertume, la peine, la résignation: “bien sûr que j’aurais préféré un pays où il n’y ait pas de contrôle extérieur, ou tout fonctionne bien, où tout marche bien, mais ce n’est pas le cas, alors…”, se convainc Tassos.

“A partir du moment où un pays a une constitution et des lois, il devrait exercer son propre contrôle mais les Européens ont bien compris que les hommes politiques grecs sont incapables de discipline”, déplore Maria Voutsina.

Et ce qui au final irrite le plus Giorgos, 48 ans, c’est que chacun de ces fonctionnaires européens “touchera certainement le même salaire que cent Grecs ensemble”.