Numérique : inventer un “nouveau modèle” mais lequel ?

photo_1330018865395-1-1.jpg
ordinateur (Photo : Daniel Mihailescu)

[23/02/2012 17:42:06] PARIS (AFP) Hadopi semble dépassée mais comment lutter contre le piratage, rémunérer équitablement les artistes tout en proposant une offre attrayante sur le net ? Face à la révolution numérique, les candidats à la présidentielle s’accordent sur un point: il faut inventer “un nouveau modèle”.

Un tout premier débat sur le sujet organisé par l’Adami, principal gestionnaire des droits des artistes et musiciens interprètes, a réuni leurs représentants (à l’exception du Front National, non invité) mercredi soir à la Gaîté Lyrique à Paris.

“La rémunération des artistes a constamment été éludée, pourtant leur salaire moyen se situe au dessous du smic et leurs revenus issus du net sont quasi inexistants”, a déclaré en préambule Philippe Ogouz, président du conseil d’administration de l’Adami qui a formulé une série de propositions pour “un nouveau pacte entre public, artistes et économie numérique”.

Pour “inventer une exception culturelle française adaptée au numérique” alors qu'”Hadopi n’a rapporté aucun euro aux auteurs” (Aurélie Filippetti/PS), il faut “reformuler l’intervention publique” (Alain Hayot, Front de Gauche) et “réfléchir à un autre système d’offres, dans le cadre d’une économie sociale et solidaire” (Hervé Pérard/EELV), ont expliqué tour à tour les partis de gauche devant 300 personnes.

Mais face au “choc provoqué par le numérique dans le monde de la culture”, le rôle de l’Etat est “de favoriser cette mutation, pas de la freiner, de rééquilibrer et de faire respecter les droits en veillant à l’équité pour tous les acteurs de la filière”, a estimé Arnaud Dassier (MoDem), consultant dans le secteur d’internet.

“Nous ne pouvons pas supprimer totalement le cadre sur lequel tous se sont mobilisés depuis 30 ans mais il faut l’adapter”, a lui-même concédé le rapporteur de la loi Hadopi Frank Riester (UMP), reconnaissant dans cette dernière “un système imparfait”.

Mais comment faire lorsque le consommateur semble de moins en moins prêt à payer ? Comment sanctionner utilement le piratage ? Qui taxer sans fragiliser “l’écosystème numérique français” ?

Gestion collective des droits des artistes, guichet unique de référencement des oeuvres, redevance sur les revenus des fournisseurs d’accès et la copie privée de plus en plus immatérielle….: pour Alain Hayot, le défi dépasse largement “la dimension technologique” et ne peut pas se limiter à “une opposition entre partisans d’Hadopi ou d’une licence globale”. Il faut créer “une sorte de service public du net” pour empêcher “Google et les autres” d’avoir la main mise sur l’ensemble du système.

“A chaque fois que l’Etat se mêle de numérique, ça coûte très cher”, a relevé Arnaud Dassier. Il “peut cependant jouer un rôle de facilitateur, de fédérateur et de financeur”, a-t-il ajouté.

Interrogée sur le “flou” du projet socialiste, Aurélie Filippetti a qualifié la loi Hadopi d'”usine à gaz” (le PS prévoit sa suppression) et insisté notamment sur la nécessité de lutter “contre les sites, du type Mégaupload, qui font de l’argent à travers la contrefaçon commerciale”.

A l’issue du débat, plusieurs professionnels ont pris brièvement la parole (dix minutes étaient accordées aux questions-réponses), regrettant notamment “que les mots +Europe+ et +répartition+ n’aient pas été prononcés une seule fois”.