Les compagnies aériennes se tournent vers l’Asie pour financer leurs avions

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Un avion dans le ciel au-dessus de la France (Photo : Fred Dufour)

[05/03/2012 07:44:01] SINGAPOUR (AFP) Les compagnies aériennes en mal de fonds se tournent de plus en plus vers les prêteurs asiatiques pour financer l’achat de leurs avions, leurs pourvoyeurs européens habituels – banques françaises et allemandes notamment – fermant les vannes du crédit.

Qu’il s’agisse de prêts bancaires, de financements obligataires ou de crédit-bail, l’Asie commence à prendre le pas quand il s’agit de permettre aux compagnies d’élargir leurs flottes, relèvent dirigeants et analystes du secteur, y voyant un nouveau signe de la nouvelle donne économique mondiale.

“Dans cette partie du monde, il y a beaucoup de financements”, a souligné Jim Albaugh, le directeur général de Boeing Commercial Airplanes lors d’une visite au Salon aéronautique de Singapour le mois dernier.

“Si vous parlez aux compagnies de +leasing+ (crédit-bail), elles vous diront qu’elles pensent que c’est là que se trouvent les capitaux pour financer les avions qui vont être vendus au cours des prochaines années”, a dit le patron de la division aéronautique civile du géant américain.

Boeing estime que les compagnies aériennes auront besoin de trouver 100 milliards de dollars cette année, contre 75 milliards l’an passé, en grande partie du fait du bond de la demande d’appareils en Asie.

En effet, la moitié des 1.000 nouveaux avions qui devraient être livrés chaque année d’ici 2021 le seront sur le continent, selon David Stewart, le vice-président de la société de conseil en aéronautique ICF.

Mais il n’y a pas que les avions: le marché du financement lui aussi se déplace vers l’Asie.

En janvier, la Royal Bank of Scotland a ainsi vendu sa division de leasing aéronautique à la banque japonaise Sumitomo Mitsui, pour 4,7 milliards de livres (5,1 milliards d’euros).

Quant aux banques chinoises, après s’être jusque-là cantonnées à leur marché national, elles “commencent à regarder à l’étranger pour des clients potentiels”, assure Paul Ng, directeur aviation du cabinet d’avocats Stephenson Harwood.

Et les compagnies américaines ou européennes “commencent à apparaître” aux salons de financement en Asie “pour parler à des banques asiatiques, ce qui était rare il y a encore quelques années,” dit cet expert à l’AFP.

Les poids respectifs de l’Europe et de l’Asie dans le secteur sont l’objet d'”un changement assez radical”, acquiesce Nicolas Parrot, directeur Asie-Pacifique du financement aéronautique de la banque française BNP Paribas.

La compagnie de financement aéronautique basée à Singapour BOC Aviation, détenue par la Bank of China, tire déjà 70% de ses ressources via des banques asiatiques, explique aussi son patron Robert Martin.

“Le vrai problème depuis l’an dernier et pour le futur va être l’accès aux dollars américains”, selon lui. “Mais la bonne nouvelle c’est que nous avons vu beaucoup d’établissements asiatiques qui sont très actifs sur ce marché”.

La Chine et Singapour s’affirment comme les coeurs du crédit-bail asiatique, souligne pour sa part David Brotherton, du cabinet Berwin Leighton Paisner. Un de ses clients, le chinois ICBC Financial Leasing, a “un certain nombre” de contrats en dehors de ses marchés captifs, dont des A319 pour Air Berlin.

Côté marchés, le californien Aviation Capital et la hongkongaise Cathay Pacific ont récemment levé respectivement 150 et 100 millions de dollars singapouriens (90 et 60 millions d’euros) sur le marché obligataire à Singapour, selon des sources industrielles.

Si l’Asie perce sur ce nouveau marché du financement, le “contrat du siècle” de 230 appareils et 22,4 milliards de dollars décroché par Boeing avec l’indonésienne Lion Air le mois dernier est resté plus classique dans ses sources financières.

Outre un apport de la riche famille propriétaire des Kirana, le contrat sera financé par des fonds de l’Export Import Bank, l’agence américaine de crédit aux exportations, ainsi que des prêteurs privés comme BNP Paribas.