«Les entreprises tunisiennes n’ont jamais arrêté de fonctionner, et ce depuis le 14 janvier 2011 si ce n’est des empêchements d’ordre sécuritaire ou social. Notre seul souci était de préserver l’emploi et de maintenir l’activité économique. Aujourd’hui, il revient à l’Etat de donner des signaux positifs en lançant lui-même de gros investissement et en communiquant plus sur le programme économique pour assurer plus de visibilité» a indiqué Wided Bouchamoui, présidente de l’UTICA, lors d’une conférence de presse organisée à la centrale patronale, mercredi 7 mars.
La présidente du patronat tunisien a exprimé son souci face au nombre important d’hommes d’affaires interdits de voyages sans progrès notables dans le traitement de leurs dossiers: «Nous souhaiterions que la justice accélère le processus d’instruction afin que les responsables jugés coupables assument et les autres soient définitivement blanchis. Il n’est pas normal, aujourd’hui, qu’à chaque fois que l’un de nous se rende à l’aéroport, il doute de pouvoir partir ou pas parce qu’il n’est pas dit que son nom n’a pas été cité dans une affaire ou une autre. Sans parler des décisions prises à l’encontre de nombre d’entrepreneurs à titre préventif. C’est une image négative que nous donnons de notre pays à l’international et qui fera hésiter plus d’un investisseur qui désirerait s’implanter chez nous».
Rappelons qu’à ce jour, 462 hommes d’affaires sont interdits de voyages et attendent que la justice se prononce sur leur cas.
Pour l’UTICA, il est impératif de rassurer les entrepreneurs nationaux et de faire en sorte que les étrangers implantés en Tunisie ne partent pas ailleurs. «Nous avons discuté avec Leoni, Yazaki pour calmer les choses. Nous essayons de faire de notre mieux pour assurer un minimum de stabilité sociale pour que les entreprises s’investissent plus dans la conquête de nouveaux marchés et le développement de leurs productions et leurs produits». D’ailleurs, c’est le but de la réunion qui avait mis autour d’une même table les représentants de l’UGTT et de l’UTICA. «Nous sommes deux institutions indépendantes et responsables. Nous (UTICA) défendons l’entrepreneuriat, l’UGTT défend les travailleurs. Notre souci à tous les deux est le maintien en vie de l’entreprise tout en préservant la dignité du travailleur et ses droits et en assurant la prospérité des projets qui marchent. Nous avons besoins les uns des autres et nous sommes conscients que nous avons tous intérêt à résoudre toutes les questions se rapportant aux relations patrons/travailleurs». La rencontre entre le patronat et la centrale ouvrière a abouti à une sorte de “pacte social“ et à la constitution d’un comité représentant l’UTICA et l’UGTT et chargé de résoudre les conflits sociaux.
Depuis, une amélioration notable a été remarquée pour ce qui est du climat social au sein des entreprises, ce qui n’a pas été sans rassurer entrepreneurs et travailleurs.
L’UTICA qui n’a pas cessé d’être malmenée depuis début 2011 commence à reprendre du poil de la bête. Les congrès régionaux pour l’élection de nouveaux bureaux se tiennent régulièrement. A ce jour, 11 congrès ont déjà eu lieu dont 10 ont abouti à de nouveaux bureaux et présidents parmi lesquels figurent deux femmes.
Reste 13 congrès qui devront se tenir d’ici le 19 avril au plus tard avant la tenue du congrès national pour décider d’une date précise pour le conseil national prévu pour début juin. «Généralement, le renouvellement des structures prend entre 8 mois et une année, j’estime que nous sommes dans les délais au vu de la conjoncture exceptionnelle qu’a traversée le pays et bien entendu l’UTICA».
L’UTICA, qui a été déchirée autant que le pays par des conflits internes illustrés la semaine dernière lors d’une réunion improvisée de centaines de personnes amenées dans des bus et qui ont forcé les portes de la centrale alors que s’y assemblaient des représentants diplomatiques étrangers avec le PNUD. «Pour éviter des incidents qui pourraient nuire à l’image de notre institution, j’ai autorisé l’ouverture de la salle de réunion à tous ce beau monde amené dans des bus et dont la réunion est illégale. Le plus triste, c’est que pour la plupart, ce sont des jeunes dont l’âge ne dépasse pas les 24 ans et qui ne savaient même pas ce pourquoi ils étaient là». En réaction, à cet acte inconsidéré, l’UTICA a porté plainte contre les principaux protagonistes de l’opération dont Tarak Boulifa et Jameleddine Ouididi.
L’année dernière, 13 fédérations sur 24 étaient déchirées par des rivalités et des antagonismes, pour éviter que cela ne se renouvèle, l’UTICA a mis en place un comité indépendant d’observateurs présidé par Ghazi Gherairi et constitué de magistrats, hommes de loi et universitaires afin de régler les litiges électoraux et de veiller à ce que personne ne soit lésée. Ce comité se déplace dans les régions et veille à ce que tout se déroule dans la transparence et la légalité.
Cela ne s’est jamais fait à l’UTICA, le vent de la démocratie est contagieux, c’est ce qui explique l’existence d’autant de contestataires, tribut d’une liberté de ton et d’action nouvellement acquise.