Outre l’expertise, le Centre pour le Contrôle Démocratique des Forces Armées (DCAF) reconnaît au ministre de l’Intérieur et à ses collaborateurs la volonté de mener à bien la réforme de l’institution sécuritaire.
«Les forces de sécurité veulent tourner la page du passé et construire une nouvelle relation avec le citoyen». En prononçant l’allocution de bienvenue aux participants à la première conférence sur la réforme du dispositif juridique de l’institution sécuritaire -à laquelle ont été invités des représentants de la société civile-, organisée jeudi 8 mars 2012 par le ministère de l’Intérieur en collaboration avec le Centre pour le Contrôle Démocratique des Forces Armées (DCAF), Moncef Sakouhi, directeur général de la Garde Nationale, en annonce également la couleur: à l’image des autres composantes de la société, les forces de sécurité veulent se transformer en profondeur pour se mettre à l’heure de la révolution. Et il n’y aura pas de demi-mesures dans ce vaste chantier, assure Ali Laaridh, ministre de l’Intérieur. Qui en a esquissé la feuille de route.
Le gouvernement précédant ayant commencé à déblayer le terrain, le nouveau n’entend pas repartir de zéro. Le travail réalisé en matière de réforme –notamment le Livre blanc, réalisé sous la houlette de Lazhar Akremi, ex-ministre délégué chargé des réformes auprès du ministre de l’Intérieur- sera mis à profit pour aller plus loin en approfondissant les différentes propositions. A titre d’exemple, celle consistant à créer une agence de renseignement indépendante du ministère de l’Intérieur ne sera pas écartée, affirme Saïd Mechichi, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur chargé de la Réforme, mais «étudiée au niveau du gouvernement et présentée par la suite à l’Assemblée Nationale Constituante».
Mais en attendant de toucher l’organisation même du ministère, le processus de réforme va concerner quatre aspects de l’institution sécuritaire, à savoir le système d’enseignement et de formation des forces de sécurité «afin d’enraciner la prise de conscience des droits de l’homme et de l’orientation démocratique, loin de toute ingérence dans les domaines politiques, intellectuels, partisans, etc.»-, le dispositif juridique –chose déjà entamée avec la révision en cours de la loi n°4 de 1969 régissant l’intervention des agents de l’ordre pendant les troubles-, la restructuration –visant à «rendre le travail sécuritaire transparent, et à mettre la sécurité sous le contrôle des institutions, notamment législative, et de la société civile-, et l’amélioration des conditions et des moyens de travail.
Vue de l’extérieur, la Tunisie paraît bien partie pour mener à bien ce vaste chantier dont dépend dans une large mesure la réussite de sa transition vers la démocratie. C’est du moins ce qu’en pense Arnold Luethold, directeur adjoint du Centre pour le Contrôle Démocratique des Forces Armées (DCAF) et son chef des opérations pour l’Afrique et le Moyen-Orient. Ayant eu de longues discussions avec le ministre de l’Intérieur et avec des experts de ce département, le n°2 de la DCAF affirme avoir constaté chez ses interlocuteurs «de la volonté et de l’expertise» et est, surtout, devenu confiant que «ce processus va dans la bonne direction et qu’il n’y a pas de retour à des pratiques que vous avez connu par le passé».