Sarkozy somme l’Europe de favoriser les entreprises européennes

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à Villepinte, le 11 mars 2012 (Photo : Eric Feferberg)

[11/03/2012 19:36:56] PARIS (AFP) Nicolas Sarkozy a sommé dimanche l’Europe de s’ériger en rempart contre la mondialisation avec un “+Buy European Act+ (loi “achetez européen”), sur le modèle américain, pour réserver les fonds publics européens aux entreprises produisant sur le Vieux continent.

“Le libre-échange, oui! La concurrence déloyale non!”, a proclamé le président-candidat, ovationné par des dizaines de milliers de militants et sympathisants dans l’arène de Villepinte (Seine-Saint-Denis).

“Pourquoi ce que les Etats-Unis, pays le plus libéral du monde, s’autorisent, l’Europe devrait se l’interdire? (…) Ainsi bénéficieront de l’argent public européen les entreprises qui auront choisi de produire, de fabriquer en Europe. Et peu importe leur nationalité”, a-t-il martelé.

Parallèlement, le président-candidat a promis, s’il est réélu, d’exiger de ses partenaires que “les PME européennes aient une part des marchés publics (européens) qui leur soit réservée” comme les petites entreprises américaines aux Etats-Unis.

Sur un ton d’ultimatum, il a affiché sa volonté d’aller de l’avant en solo, en cas d’échec à faire avancer ces deux revendications “au bout d’un an”. Dans un tel scénario, la France déciderait “unilatéralement” de leur mise en oeuvre “jusqu’à ce que les négociations aboutissent”, a-t-il assuré.

Récusant toute étiquette protectionniste, Nicolas Sarkozy a fait valoir que l’Europe, qui “a ouvert tous ses marchés publics quand d’autres n’en ouvrent aucun”, ne devait pas à ses yeux être pour autant une “Europe passoire”.

L’Europe doit être “politique” et “protéger les citoyens contre une “concurrence sauvage, sans règles, sans limites, sans équité qui tire tout le monde vers le bas”, a-t-il insisté. Dans cet esprit, a-t-il réaffirmé, “la technocratie ne peut plus être seule à décider”.

“Du neuf avec du vieux”

“Le jour où nous n’aurons plus d’usine, qu’irez vous dire aux ouvriers? Qu’il faut qu’ils croient en l’Europe? Eh bien ce jour là, les ouvriers vous tourneront le dos et il sera trop tard pour leur dire: +ne vous abstenez pas ou ne votez pas pour les extrémistes+”, a-t-il enchaîné, offensif.

Nicolas Sarkozy “fait du neuf avec du vieux”, a réagi auprès de l’AFP Thomas Chalumeau, un économiste de l’équipe de campagne de François Hollande. Selon lui, “une grande partie” des marchés publics européens “sont d’ores et déjà fléchés sur les entreprises européennes et de facto conditionnés à des garanties d’emploi dans l’Union européenne”.

Quant aux PME européennes, “elles se voient réserver une part importante des marchés publics européens dans le cadre du Small Business Act européen voté en juin 2008”, a-t-il assuré.

L’idée d’un “Buy European Act” est ancienne et séduit la gauche depuis longtemps. Elisabeth Guigou, ministre des Affaires européennes de François Mitterrand, l’avait évoquée dès mars 1993 comme une “contre-offensive européenne en réponse au +Buy American Act+”.

Ce que le député PS Jean-Christophe Cambadélis n’a pas manqué de rappeler dimanche, soulignant que Nicolas Sarkozy reprenait “une proposition des socialistes”.

A droite, elle avait aussi été évoquée par Christine Lagarde au printemps 2011, avant qu’elle ne quitte Bercy pour le Fonds monétaire international (FMI) à Washington. Elle devait concourir dans son esprit au “renforcement de la gouvernance économique au sein de l’Union européenne”.

Le “Buy American Act”, une loi américaine de 1933, s’applique à tous les marchés de l’administration fédérale. Elle est héritée du “New Deal” voulu par Franklin Delano Roosevelt pour relancer l’économie de son pays après la Grande Dépression de 1929.