Tunisie : Chanteurs d’hier et prédicateurs d’aujourd’hui, même combat!

A regarder de près, les prédicateurs comme Amrou Khaled et
Wajdi Ghoneim ne sont
pas très éloignés des artistes comme Amrou… Dhiab, Heïfa Wahbi, Khathem Essaher
et autres Tameur Hosni. Tous veulent nous emprisonner dans un modèle de société
venu d’Orient.

Issam est chauffeur dans une entreprise privée du secteur du bâtiment à Tunis.
Vingt-huit ans et beaucoup d’énergie à en revendre. Comme chaque dimanche, il
prend en ce 11 mars l’estafette, que son patron lui laisse le week-end, pour
faire une sortie avec l’élue de son cœur. Un rendez-vous qu’il ne rate jamais
depuis qu’il a décidé, en décembre 2011, de demander la main de sa douce Khawla,
qui est technicienne supérieure dans la même entreprise que lui.

Mais pour ce dimanche, il n’a pas prévu d’aller boire un chocolat au lait dans
un salon de thé du quartier du Lac où il a l’habitude d’aller s’isoler avec sa
fiancée. Il l’emmène pour regarder un spectacle. Celui qu’anime le prédicateur
égyptien Amrou Khaled vers 16 heures à La coupole d’El Menzah.

Ce dernier se produit dans la première partie du spectacle. Il sera suivi par
les deux chanteurs Faouzi Ben Gamra et Messaoud Kurtis. Il s’agit de la seconde
prestation du prédicateur égyptien en Tunisie après celle de janvier 2012. Et
Khawla ne veut pas la rater.

Elle compte s’asseoir dans les premiers rangs

Il est vrai qu’elle a en grande partie «reconquis son islam grâce à Amrou Khaled
qu’elle regardait toujours sur une chaîne satellitaire». C’est grâce à lui donc
qu’elle «a repris sa prière abandonnée lorsqu’elle a passé son bac. Et qu’elle a
porté le voile».

A ce spectacle, elle s’est bien préparée sortant son plus beau manteau noir et
une écharpe en soie de couleur verte. Comme elle n’a pas oublié de passer du
Khol autour des yeux et une mince couche de rouge à lèvre et de glisser un soda,
des biscuits et un sandwich au thon dans son sac fourre-tout qui ne la quitte
jamais. Il est 14 heures et elle s’apprête à quitter son domicile montant dans
l’estafette blanche de l’élu de son cœur. Le spectacle est pour 16 heures. Fatma
a acquis un billet de 10 dinars et compte s’asseoir dans les premiers rangs.

Changement de décor. Il y a un peu plus d’un an, c’est pour aller voir d’autres
vedettes que des centaines de Tunisiennes se préparaient. Elles ont pour nom
Amrou…Dhiab, Heïfa Wahbi, Khathem Essaher et autres Tameur Hosni.

Leurs spectacles étaient, comme pour celui d’Amrou Khaled, annoncés à force
d’affiches placardées dans nombre d’artères de Tunis. Et faisaient courir les
foules qui n’oubliaient également pas de se mettre sur leur trente-et-un.

Des chanteurs arabes qui n’ont plus apparemment droit de cité depuis que
notamment Mehdi Mabrouk, le ministre de la Culture, a déclaré qu’il faudra
passer sur son cadavre pour que des artistes libanais puissent se produire dans
les festivals d’été.

Le mariage coutumier vaut mieux que l’acte de mariage kairouanais!?

Notons qu’aucun ministre ni responsable d’Ennahdha n’ont cru bon de dire de même
pour les prédicateurs arabes qui sillonnent la Tunisie donnant de la voix à
certaines absurdités. Pour ne pas dire à des propos haineux et violents. Comme
la circoncision des femmes prônée par un certain Wajdi Ghoneim qui est interdit
de séjour dans son propre pays, l’Egypte, tombant sous une condamnation de 5 ans
de prison, si l’on croit certaines informations, pour blanchiment d’argent.

Nos prédicateurs n’ont pas fait mieux en provoquant des slogans haineux contre
les Juifs, lorsque des islamistes sont venus accueillir, jeudi 5 janvier 2012,
le Premier ministre palestinien du gouvernement Hamas, et non moins prédicateur
islamiste. Il prêche tous les vendredis dans une mosquée de Gaza. Des
vociférations reprises par nombre de médias étrangers, heureusement condamnées
par le mouvement
Ennahdah.

Amrou Khaled et Wajdi Ghoneim ne sont pas les premiers prédicateurs à venir
visiter la Tunisie pour prêcher la bonne parole wahhabite et nous apprendre à
être plus musulmans que ce que nous sommes; nous autres Tunisiens qui avons été
à l’origine d’une des plus grandes écoles musulmanes de l’histoire. Et d’où les
cavaliers sont partis pour conquérir à l’islam la plus grande partie du
continent africain.

En fait, il faut bien que la Tunisie épouse le modèle venu d’Orient. Celui qui
veut que certains qui sont plus musulmans que nous –et sans doute plus égaux que
nous- nous dictent ce qui est bon et ce qui est mauvais. Par exemple que le
mariage coutumier vaut mieux que l’acte de mariage kairouanais, qui stipule
qu’un mari ne peut imposer une seconde épouse à l’élue de son cœur.

Comme le font ces Evangélistes notamment américains dont les prédicateurs
puisent dans les méthodes et les discours. Leurs interventions ressemblent ainsi
aux faits et gestes provoquant, ici et là, hystéries et pleurs pour mieux faire
passer les reconversions et les repentances -de préférence s’il vous plaît face
aux caméras.

Les chanteurs venus d’Egypte et du Liban frères ne faisaient pas autre chose. En
chauffant les salles et en faisant danser des milliers de jeunes dans des
espaces comme celui de la «Coupole» où Amrou Kahaled s’est produit le 11 mars
2012. Faisant passer au second plan notre riche patrimoine musical et dissuadant
une partie de nos talents de continuer à produire et à se produire.

Sans oublier qu’ici et là, c’est sans doute une affaire de business. Ne nous
dites pas que Wajdi Ghoneim est venu pour rien. Chacun partira avec un pactole.
Les prédicateurs suivent le pas de leurs «ancêtres» américains: ils roulent
aussi pour de l’argent. De quoi vivent-ils (bien) autrement?

Terminons pour dire qu’en matière de chanteurs comme en ce qui concerne les
prédicateurs arabes, nous ne sommes pas sortis de l’ornière. Hier comme
aujourd’hui, on veut nous emprisonner dans un modèle de société venu d’Orient.