Italie : la recette de Mario Monti continue de fonctionner malgré des remous

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à Rome (Photo : Alberto Pizzoli)

[23/03/2012 10:24:45] ROME (AFP) Après l’austérité et les libéralisations, le chef du gouvernement italien Mario Monti s’est attaqué à un autre chantier délicat, le marché du travail, mais malgré des remous à gauche, sa popularité apparaît pratiquement intacte et extrêmement haute après quatre mois au pouvoir.

Un sondage de l’institut Demos publié cette semaine crédite le successeur de Silvio Berlusconi d’une cote de confiance de 62%. Un niveau très élevé pour un président du Conseil qui a fait adopter un sévère plan de réduction du déficit public, a durci les régimes retraites et veut assouplir la réglementation sur les licenciements.

“Même si une majorité de la population désapprouve toute modification de cette législation, cela ne suffit pas à modifier de façon substantielle le jugement sur le gouvernement des +technocrates+”, souligne le sociologue Ilvo Diamanti en commentant le sondage.

Massimo Franco, éditorialiste du Corriere della Sera, pense même que M. Monti “marque des points en montrant qu’il mène les réformes que demandent les institutions européennes”.

Fondamentalement, les Italiens lui sont reconnaissants d’avoir évité au pays de sombrer dans une situation à la grecque et de lui avoir redonné une crédibilité à l’étranger. Selon Demos, 60% des Italiens trouvent l’ancien commissaire européen et ses ministres “technocrates” plus aptes à diriger le pays que “les politiciens de profession”.

Pour Marc Lazar, politologue français spécialiste de l’Italie, la popularité persistante de M. Monti s’explique par le fait que “des électeurs déçus de Berlusconi retrouvent dans son programme des promesses non tenues du magnat (…) et par l’excellente pédagogie de Monti et son discours de vérité” sur l’ampleur de la crise et les sacrifices nécessaires.

A l’inverse, la confiance dans les partis politiques s’est effondrée à un minimum historique de 4% et, selon l’expert en sondages Renato Mannheimer, “l’envie d’élections est à des minimas historiques car un Italien sur deux ne sait pas pour qui voter”.

De récents scandales n’ont rien fait pour arranger les choses: 10 des 80 élus régionaux de Lombardie, pour la plupart de droite, font l’objet d’enquêtes judiciaires à divers titres (corruption, violation de la loi sur le financement des partis, etc).

A Rome, l’ex-trésorier de La Marguerite (centre) est accusé d’avoir détourné 25 millions d’euros des caisses de ce parti pour se payer des villas ou des vacances de luxe au Bahamas ou à Paris. A Bari, le maire de gauche est dans la ligne de mire après avoir reçu des huîtres d’une famille de constructeurs.

L’Italie est “dans une phase de déstructuration du système politique caractérisée par une rupture des alliances traditionnelles — à gauche comme à droite — et des troubles internes aux grands partis, au sein du PD (premier parti à gauche, ndlr) et du PDL (de Berlusconi)”, analyse encore M. Lazar pour l’AFP.

Le PDL doit affronter le défi de “survivre à son leader alors que ce parti avait été fondé par et pour Berlusconi” tandis que le PD est “dans une situation intenable” et risque l’éclatement avec les divergences profondes qui sont en train d’apparaître sur la réforme en cours du marché du travail, estime le politologue.

Les municipales des 6 et 7 mai prochains permettront de faire un premier état des lieux.

Même si la situation est très confuse: aux primaires organisées à gauche, les vainqueurs ont été ceux qui ne disposaient pas de l’appui du PD, par exemple à Gênes et Palerme. Ailleurs ce sont les candidatures de pornostars qui défrayent la chronique comme le retour de la Cicciolina qui postule à la mairie de Monza.

En attendant, 7 Italiens sur 10 voudraient, selon l’étude de Demos, que Monti ne se limite pas à tenter de relancer l’économie et se penche aussi sur la télévision publique Rai (considérée comme trop inféodée aux partis politiques), sur la justice (dossier brûlant de la corruption) ou la loi électorale.

Plus étonnant encore 27% souhaiteraient que Monti se succède à lui-même aux prochaines législatives de 2013, quel que soit le parti ou la coalition remportant le scrutin. Et déjà certains évoquent de façon récurrente la possibilité d’un gouvernement “Monti-bis”.