ès de Madrid (Photo : Dominique Faget) |
[28/03/2012 06:07:14] MADRID (AFP) Devant les entrepôts aux enseignes écrites en chinois, les camions déchargent des piles de marchandises bariolées dans un ballet incessant. Les commerçants chinois de Cobo Calleja, vaste zone industrielle proche de Madrid, s’adaptent pour lutter contre la crise.
“Cela fait environ deux ans que les ventes ont beaucoup chuté. Mais nous travaillons dur et nous nous en sortons”, explique Jian Weiwuliu, 41 ans, alias Carlos, dans son immense magasin de vente en gros où il entrepose robes et chemises pour femmes.
“Je vends à des boutiques dans toute l’Espagne, il y a encore assez de clients”, déclare-t-il.
Cobo Calleja emploie au total 10.000 personnes, dont 3.000 dans la seule partie chinoise, présentée comme la plus grande zone commerciale chinoise de vente en gros en Europe, selon la mairie de Fuenlabrada, la banlieue de Madrid où elle est installée.
Sur les 800 entreprises de la zone, 377 sont chinoises et affichent un chiffre d’affaires annuel de 870 millions d’euros.
à Cobo Calleja, près de Madrid (Photo : Dominique Faget) |
“Contrairement aux Espagnols, les Chinois n’ont pas peur de la crise,” affirme Jorge Garcia, président de la chambre de commerce hispano-chinoise et consultant pour investisseurs des deux pays.
“Ils savent qu’il faut travailler plus et parfois plus longtemps tout en gagnant moins”, ajoute-t-il.
Pour mieux contrer la crise, certains parient sur des secteurs plus pointus que le commerce traditionnel.
“Je rencontre souvent des entrepreneurs chinois qui viennent ici pour faire des affaires: ils apprécient beaucoup l’Espagne”, affirme Amanda Kuo, 31 ans, consultante taiwanaise pour les entreprises espagnoles qui vendent des produits de luxe en Chine.
Elle espère désormais développer ses activités en attirant les investisseurs chinois en Espagne.
à Cobo Calleja, près de Madrid (Photo : Dominique Faget) |
“C’est l’avenir”, lance-t-elle. “Je leur conseille d’investir dans le secteur de la haute technologie, qui offre la plus grande valeur ajoutée.”
“Je veux capter les sociétés chinoises qui sont déjà sur ce secteur en Chine mais veulent s’internationaliser. Elles sont intéressées par la technologie et le savoir-faire que l’on trouve en Espagne et veulent investir ici”, ajoute-t-elle.
Les commerçants chinois qui signent les commandes et dégustent leurs bols de nouilles appuyés derrière les caisses enregistreuses de magasins comme celui de M. Wu ont parcouru un immense chemin depuis que leurs prédécesseurs ont commencé à acheter petites épiceries et solderies en Espagne.
Venant majoritairement de la ville de Wenzhou, dans l’est de la Chine, la communauté chinoise s’est intégrée dans la routine quotidienne en Espagne, vendant de la nourriture, des vêtements, gérant des auto-écoles et des salons de coiffure, servant même les traditionnels petits déjeuners espagnols aux comptoirs de bars typiques.
Plus de 167.000 Chinois sont inscrits sur le registre de l’Institut national de la statistique.
“Ils ont commencé par tenir leurs boutiques puis se sont tellement développés qu’ils ont commencé à se charger de l’import eux-mêmes”, explique Jorge Garcia.
“Ils sont venus en Espagne pour travailler et gagner de l’argent”, renchérit Jin Wu, 35 ans, en souriant au souvenir de ses prédécesseurs.
En fumant devant son épicerie, ouverte 12 heures par jour à Usera, un quartier populaire de Madrid, il admet cependant souffrir de la crise: “C’était mieux avant. Maintenant il n’y a plus d’argent et les prix ont explosé.”
Après avoir enregistré une maigre croissance de 0,7% de son PIB en 2011, l’Espagne s’apprête à replonger en récession. Le chômage devrait encore grimper, à 24,3%.
Face à ces sombres perspectives, la croissance de la Chine, à 9,2% du PIB en 2011, a de quoi faire pâlir d’envie même si elle a baissé par rapport à 2010 (10,4%).
Elle offre en tout cas de grandes opportunités aux commerçants d’Espagne spécialisés dans l’import-export avec la Chine.
Leur essor a “transformé l’Espagne en une cible d’importance pour les entreprises chinoises”, explique Jorge Garcia. “C’est la porte d’entrée sur l’Europe des marchandises chinoises”.