Espagne : grève générale sur fond de récession et d’austérité

photo_1333005772793-1-1.jpg
ève générale contre a réforme du travail le 29 mars 2012 à Madire (Photo : Pedro Armestre)

[29/03/2012 07:25:06] MADRID (AFP) L’Espagne au ralenti vivait jeudi une grève générale de 24 heures contre la réforme du travail mise en place par le gouvernement de droite, point d’orgue de l’exaspération sociale face au chômage, à la récession et à l’austérité.

Portant des drapeaux rouges et des pancartes avec les mots “Réforme du travail, NON”, ou “Grève générale”, les piquets de grève se sont installés aux portes des entreprises, du marché de gros de Madrid, des banques ou des principales stations de transports en commun.

Alors que les syndicats annonçaient déjà un “immense succès”, le ministère de l’Intérieur a indiqué tôt jeudi matin que 58 personnes avaient été interpellées, six policiers légèrement blessés ainsi que trois grévistes dans des incidents mineurs.

Le face-à-face entre grévistes et policiers a parfois été tendu, comme devant la station de bus de Carabanchel à Madrid, où un manifestant a été blessé au visage.

Les syndicats Comisiones Obreras (CCOO) et UGT, qui appellent les Espagnols à manifester dans une centaine de villes, dénoncent la réforme du marché du travail approuvée le 11 février par le gouvernement dans le but de combattre un chômage record, à 22,85% des actifs. Selon eux, cette réforme aura pour seul effet d’aggraver le fléau, alors que le gouvernement lui-même prévoit déjà la destruction de 630.000 emplois en 2012 et un chômage à 24,3% en fin d’année.

Ce jeudi “doit être une grande journée, une marée démocratique”, a lancé Ignacio Fernandez Toxo, secrétaire général de Comisiones Obreras, au début de la grève.

Son impact pourrait toutefois être limité par l’accord de service minimum conclu entre les syndicats et les pouvoirs publics, sans compter le souci de nombreux Espagnols de ne pas perdre une journée de salaire dans un contexte de rigueur.

photo_1333005827533-1-1.jpg
à Madrid (Photo : Pedro Armestre)

“Je comprends qu’ils fassent grève. La réforme ne servira qu’à licencier les gens plus facilement et avec moins d’argent”, remarquait Pedro Moreno, employé dans une grande surface des environs de Madrid. “Mais ce n’est pas le moment de perdre des jours de travail. J’ai la chance d’avoir un travail”, ajoutait cet homme de 32 ans qui prenait le métro à la Plaza de Castilla, l’une des principales gares de transports en commun de Madrid.

“Je ne vais pas mettre mon emploi en danger à cause de ce que disent les syndicats. Je ne crois pas qu’ils défendent les véritables intérêts des travailleurs”, commentait, sceptique lui aussi, Miguel Angel, un fonctionnaire de 51 ans, qui, sur un quai de la gare d’Atocha, attendait patiemment son train pour aller travailler.

A Madrid, 30% en moyenne des métros et des bus devaient circuler, selon l’accord de service minimum. Les services de santé doivent fonctionner comme un jour férié. Dans le reste du pays, 30% des trains régionaux étaient prévus de même que 20% des trains nationaux. Les compagnies aériennes Iberia, Air Nostrum et Vueling ont elles annulé en moyenne 60% de leurs vols.

Cette journée de grève générale est la sixième depuis le rétablissement des libertés syndicales en 1977. La précédente remonte au 29 septembre 2010, sous le gouvernement socialiste.

Pour le chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy, au pouvoir depuis cent jours, elle intervient au pire moment: sous l’oeil de ses partenaires européens inquiets de l’état des finances publiques du pays, le Conseil des ministres doit approuver vendredi le budget 2012, marqué par des coupes sévères.

photo_1333005761245-1-1.jpg
à Madrie (Photo : Javier Soriano)

Le gouvernement, qui tente de réduire à 5,3% du PIB en fin d’année le déficit public, après un dérapage jusqu’à 8,51% en 2011, a déjà dévoilé des coupes budgétaires de 8,9 milliards d’euros et des hausses d’impôts pour 6,3 milliards.

Mais le chemin est encore long: différents économistes évaluent autour de 50 milliards d’euros le montant des coupes et/ou rentrées nécessaires sur l’année pour atteindre l’objectif, en tenant compte de la récession qui devrait réduire le PIB de 1,7% en 2012.