L’ANME veut recadrer le Plan solaire tunisien, avec une démarche et des objectifs clairs

noura-lazreg-anme.jpgL’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie (ANME) a récemment lancé un appel d’offres international en vue de revoir le Plan Solaire Tunisien, officiellement adopté en octobre 2009. Explications de Mme Noura Laaroussi Benlazreg, sa directrice générale.

WMC: Qu’attendez-vous du bureau d’études qui va être sélectionné pour concevoir le plan solaire ?

Noura Laaroussi Benlazreg: Durant les dernières années, nous ne sommes quand même pas restés les bras croisés. Nous avons en particulier réalisé une série d’études: sur les besoins en formation professionnelle, toutes qualifications et niveaux confondus, sur les créneaux des énergies renouvelables potentiellement industrialisables, sur le mix énergétique pour la production électrique dans le but de chiffrer les objectifs en matière d’énergies renouvelables -cette dernière étude dont nous aurons les résultats d’ici quelques semaines et qui nous dira si réellement nous aurons besoin de 1.000 mégawatts de renouvelables en 2016 et de 4.000 mégawatts en 2030-, mais également sur l’agriculture, le transport –qui est énergivore-, le bâtiment, etc.

Toutes ces études aideront le bureau d’études à concevoir un vrai plan solaire, ayant notamment une démarche et des objectifs très clairs. Comme le Plan solaire marocain ou allemand, avec un planning et le financement aussi. D’ailleurs, le financement nous ne l’avons pas. Quand nous approchons les banques, même pour de petits projets de rien du tout, elles n’adhèrent pas parce qu’elles ne sont pas sûres de la réussite.

En plus d’un nouveau plan solaire, nous attendons également du bureau d’études l’élaboration d’un plan de communication offrant des arguments permettant de faire adhérer les investisseurs et les développeurs d’énergies renouvelables. De cette façon, on pourra voir clairement le rôle de l’administration -qui, malheureusement, ne joue pas assez le sien dans le cadre de la réalisation du Plan solaire- et de la STEG dont le rôle doit être limité.

D’ailleurs, nous avons réalisé des études sur le cadre réglementaire dont nous allons soumettre les conclusions au ministère et ce sera au gouvernement de faire son choix entre miser sur des investisseurs, quitte à limiter sa part, ou maintenir le monopole de la STEG qui sera tenue de réaliser les objectifs du Plan. On doit être clair à ce sujet. Mais j’imagine mal le gouvernement écarter le privé. Et il faut dissiper cette impression qu’ont les investisseurs, y compris étrangers, que la STEG constitue un obstacle au développement des énergies renouvelables.

Y a-t-il de l’intérêt de la part d’investisseurs privés pour réaliser des projets dans ce secteur?

Il y a de l’intérêt à la fois pour de petits et de grands projets. D’ailleurs, la manière dont les fiches projets du Plan solaire ont été élaborées –avec une capacité limitée à 10, 30, ou 50 mégawatts- ne veut rien dire. Car celui qui veut réaliser une ferme éolienne ou une centrale solaire cherche la rentabilité –et le gouvernement aussi qui se soucie du coût du kilowatt/heure. Quand on se voit imposer 10 ou 15 mégawatts, on peut ne pas atteindre le seuil de rentabilité. Donc, il faut laisser le choix à l’investisseur.

A titre d’exemple, il y a des investisseurs allemands qui veulent réaliser 2 gigawatts et qui ont fait réaliser par Comete Engineering une étude de faisabilité sur un site à Kébili. Donc, ils sont avancés. Lorsqu’ils s’adressent, nous leur promettons de les aider. Mais quand ils vont à la STEG, on leur dit pourquoi vous venez chez nous, faites ce que vous voulez, personne ne vous en empêche. Quand ils ont rencontré le ministre de l’Industrie, celui-ci a demandé un complément d’informations. Une fois qu’ils les auront communiquées, ce dossier va passer en conseil de ministres pour qu’il prenne les décisions nécessaires.

Où en est le projet Elmed?

Ce projet qui date d’avant le Plan solaire n’est pas en train d’avancer. Il s’agit de construire des centrales utilisant du charbon et des énergies renouvelables, de réaliser l’interconnexion entre la Tunisie et la Sicile pour vendre de l’énergie verte. Mais en faisant le suivi du projet, je n’ai jamais eu de réponse de l’organe chargé de la réalisation sur l’état d’avancement. Mais j’ai appris qu’ils ne peuvent réaliser l’interconnexion que lorsqu’ils auront trouvé un marché. Lorsqu’il a rendu visite au ministre de l’Industrie (fin février 2012), Corrado Clini (directeur général de l’Energie italienne, ndlr) m’a dit si vous trouvez un marché à l’échelle européenne nous pourrons commencer l’interconnexion car Terna n’est qu’un transporteur. On sent qu’il y a un certain relâchement.

Mais on dit que la partie italienne veut se débarrasser de la composante énergies renouvelables du projet…

Non, dès le départ, la majeure partie de l’électricité du projet Elmed devait venir du fossile. Et cela nous a voulu des critiques de la part de l’Union européenne qui veut favoriser l’énergie verte.

Quand la nouvelle version du plan solaire verra-t-elle le jour?

Initialement, nous avons fixé la date du 5 mars pour la réception des offres mais sur insistance de beaucoup de bureaux d’études, nous avons reporté le dernier délai d’une dizaine de jours. Nous allons essayer de réduire la durée de la phase de dépouillement parce que nous avons enregistré retrait de 35 cahiers des charges. Nous aurons le nouveau Plan solaire d’ici la fin de l’année. Et agrément par le gouvernement nous lancerons notre campagne de communication.

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